2) L'épouvantard

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Même s'il était longuement resté abasourdi par l'article de « La Gazette du Sorcier », Remus était néanmoins parvenu à mobiliser le peu de forces qui lui restaient pour rassembler ses affaires. Ce fut à ce moment précis qu'il se rendit compte que quelque chose lui manquait. Le fait d'avoir probablement infecté une innocente l'avait amené à oublier que sa baguette lui manquait. Peut-être était-ce encore l'une des rares choses qui lui restait, maintenant qu'il n'avait plus son poste à Poudlard. Il claqua sa langue, contrarié. Il l'avait laissé tomber lors de sa métamorphose, prêt du Saule Cogneur. Sans doute s'y trouvait-t-elle encore... Il allait quitter son bureau pour la récupérer lorsqu'il vit qu'une imposante silhouette sombre et vêtue de noir se tenait près de la porte. Un détraqueur ? Non. Severus Rogue. Décidément, la fatigue lui jouait bien des tours, ce que ne manqua pas de lui faire remarquer son désormais ex-collègue :

-Ta mine te trahi, Remus... Une nuit difficile. Pour nous tous, d'ailleurs.

À ces mots, Remus détourna brièvement les yeux. Ces images où il se voyait jeter au sol Rogue et ses protégés revint un instant le culpabiliser. Le sinistre maître des potions se rapprocha alors de lui et lui tendit sa baguette de cyprès.

-Ramassée hier soir. Tandis que tu t'en allais courir après ton ami Sirius au clair de lune...

De nouvelles images. Lui. Sirius. Un loup-garou et un chien. Du sang, des crocs et des griffes... Il secoua brièvement sa tête, espérant ainsi balayer momentanément ces mauvais souvenirs. Il rangea alors calmement son outil magique dans sa poche, adressant à Severus un regard à la fois fatigué et inexpressif. L'homme au cheveux gras ajouta alors de sa voix toujours aussi froide :

-Il fallait qu'ils sachent Remus. Les évènements de la nuit passée appuient mon geste. Je suppose que la même déduction habite ton esprit.

Remus ne répondit rien. Préférant ne pas lui offrir un quelconque signe de mécontentement... ce que Severus n'aurait que trop apprécié.

-Tu as toujours convoité ce poste, Severus.

Il se recula de lui puis désigna la pièce d'un mouvement de bras :

-La place est libre. Ou, devrais-je dire : sera libre. Il me reste encore quelques bagages à plier.

Une façon courtoise de lui faire comprendre que sa présence dans la pièce n'était plus désirée. Rogue se détourna donc, lui adressant un dernier regard de mépris. Il allait passer le pas de la porte lorsque Remus l'interpella une dernière fois :

-Et merci pour la baguette.

Severus haussa ses épaules et l'homme fatigué continua de ranger son matériel. Accidentellement, il renversa le coffre renfermant l'épouvantard. Il s'était attendu à en voir sortir une pleine lune mais, à sa grande surprise, ce fut une toute autre chose qui en émergea. La créature avait en effet prit les traits d'une jeune femme petite, svelte et à la longue chevelure ondulée. Elle était la réplique parfaite de ce portrait que Remus avait vu dans le journal. Elle était la victime de Pré-au-Lard. Une certaine Mila ! Lupin se recula alors de quelques pas, extrêmement mal à l'aise et comprit qu'il ne lui serait pas facile d'aborder cette malheureuse personne. La culpabilité le rongeait beaucoup trop... et pourtant, il se devait de la voir. En tant que loup-garou, il était le mieux placé pour lui faire part de toutes les contraintes et attitudes à avoir face à cette malédiction. Aussi, il lui aurait paru plus qu'immoral de ne pas assumer ses responsabilités en ne s'identifiant pas auprès d'elle comme l'auteur – involontaire, certes – de cet acte abominable. Il aurait été la pire des crapules de ne pas le faire. Enfin, c'était Dumbledore lui-même qui lui avait demandé de la retrouver. Mais cette rencontre l'effrayait plus que tout... d'où la forme actuelle de l'épouvantard qui le pointa d'un doigt accusateur, ce qui réveilla en lui ces souvenirs auxquels il n'avait pas encore osé accéder...

D'abord, les assauts féroces de Buck contre lui. Le lycanthrope avait tenté d'effrayer la créature magique en montrant ses crocs, mais en vain. Il avait donc été contraint de prendre la fuite en émettant plusieurs petites plaintes canines suivies d'un long hurlement dépité, laissant derrière lui deux étudiants encore sous le choc et leur puissant protecteur ailé.

Le loup-garou avait ainsi longuement continué sa course folle et enragée à l'aide de ses pattes démesurées dans la Forêt Interdite. Blessé et épuisé, il ne s'était arrêté qu'après s'être assuré d'avoir mis suffisamment de distance entre lui et l'hippogriffe. Haletant bruyamment et déçu d'avoir été par deux fois empêché d'enfoncer ses crocs dans la chair humaine, il s'était approché d'un petit cours d'eau pour au moins étancher sa soif. Une bien maigre consolation. La surface du ruisseau lui avait renvoyé l'image d'un long museau squelettique, peu velu, à peine duveteux au niveau du cou et au-dessus duquel se trouvait un semblant de chevelure grisonnante, Seul vestige de l'humain à qui il avait volé ce corps. Ses oreilles pointues s'étaient ensuite redressé brusquement quand des voix se firent entendre non loin. Il avait relevé sa gueule pour apercevoir, dans l'ambiance lunaire qui avait désormais habillé la forêt, trois humains. Une jeune femme, un jeune homme et un autre plus âgé coiffé d'un haut de forme. Sans plus attendre, le monstre vorace avait foncé sur eux. Bénéficiant de l'effet de surprise, il était parvenu à mettre la fille au sol via un puissant revers de patte avant d'enfoncer ses mâchoires dans son épaule. Cette voix empreinte de peur avait alors retentit :

-Mila ! Mila ! Non !

Et plusieurs jets de lumières avaient éclairé l'endroit. Le monstre avait été frappé par plusieurs sorts très douloureux qui l'avaient obligé à de nouveau battre en retraite... Les humains avaient préférés porter secours à ladite Mila tandis que la créature à gueule de loup s'était écroulée vaincue à l'abri des regards entre quelques buissons épais.

-Mila ! se surprit à répéter Lupin en revenant à lui, plus que perturbé par cette scène effroyable.

L'épouvantard continuait de le pointer du même doigt accusateur.

-Mila, je...

Il secoua sa tête. Ça n'était qu'un épouvantard, après tout.

-Ridiculus... articula Remus faiblement sans même s'intéresser au résultat produit par son sortilège, las.

Il s'appuya ensuite contre un siège et ne cessa de répéter :

-Mila... Mila...  

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