Il ne le savait pas encore mais, pour une fois, il aurait mieux fait de rester au lit.

Pablo est un perfectionniste, chaque chose qui mérite d'être faite mérite d'être bien faite. Quand, par-dessus le marché, tu prétends faire payer des gens pour qu'ils te l'achètent, tu te dois d'être irréprochable. Alors, même si parfois il avait l'impression d'être Atlas portant la terre quand le réveil sonne, il s'ébroue rapidement et se force à sourire. C'est sa façon à lui de se motiver. Chaque journée est un défi autant qu'une opportunité à saisir. C'est un artisan ; de la vie et dans la vie. Il ne croit pas au destin ou aux chemins tout tracés. C'est à chacun de creuser son sillon, de l'embellir, de le faire aller là ou on veut se rendre. Ce n'est pas toujours facile, il faut parfois faire des détours, mais le jeu en vaut toujours la chandelle. S'il travaille dur et fait de son mieux alors même la pire des journées est profitable. Pablo est un optimiste réaliste.  C'est comme ça qu'il aime se définir. 

Quand il a annoncé qu'il reprenait l'affaire, il a vu dans ses yeux toute la détresse qu'un homme peut accumuler pendant sa vie de père. Il rêvait pour lui d'étranger, d'études universitaires, de réussite sociale et financière, de cartes postales du bout du monde. Il avait pétri du levain depuis ses douze ans pour que son fils n'aie jamais à le faire. Il avait trimé comme un con, sacrifiant une partie de ses rêves pour que ce petit con prétentieux tente de prouver toute une vie durant qu'il pourrait faire mieux que son paternel. 

Dans les premiers temps, les disputes étaient quotidiennes. Une fois ils ont failli en arriver aux mains pour un bout de baguette trop - ou pas assez, c'est selon - cuite. C'est quand même un sujet suffisamment brulant pour s'entre-tuer.