Les flocons jaunes orangés en pétales de cerisier tombaient avec mollesse sur les chemins des lapins à cornes et à dent de lion, au pelage fauve verdâtre. Une petite crapule au chapeau d’or et d’argent filait tel le vent sous le couvert des fougères, rampait avec forte détermination dans les feuilles mortes, un tapi bruni par le temps et les intempéries.

 Le champignon souleva un œil, puis deux, et regarda autour de lui, et au-dessus. Rien. Il continua d’avancer avec discrétion et rapidité ; une ombre. Son objectif ? Un buisson de baies noires et juteuses, un mets savoureux pour un estomac affamé. Il n’eut aucune colline à gravir, aucun danger notoire, juste un autre champignon au bulbe étonné de le trouver là. Il était géant et sentait la maman, sans être la sienne. Il cueillait les fruits mûrs en toute quiétude pour sa progéniture, sur son chapeau coloré, elle piaillait son désir de se nourrir et à la vue de ce nouveau copain.

 Vif et voyou, le petit champignon d’or et d’argent s’élança sur le tas de baies aux pieds de la maman, et en chipa deux pour s’enfuir ensuite. Il ne fut pas poursuivi, il fut si maladroit que la maman – après le repas de ses bébés – n’eut aucun mal à suivre ses traces.

 Elle le retrouva perché sur un chapeau doré planté dans la terre meuble d’un bord d’étang à l’eau calme. Il se goinfrait de son chapardage sous le regard bienveillant de sa maman, encore trop faible pour le nourrir elle-même. Devant sa jeunesse et sa faiblesse apparente, le grand champignon – avec ses bébés – décida de lui offrir une partie de sa cueillette du jour, en soutient pour cette phase difficile dans la vie d’une jeune femelle.