Alors qu’elle s’amusait au parc avec ses amies, Jelena, alors âgée de sept ans, se fit embêter par trois jeunes filles. Elles ne voulaient pas les laisser jouer dans cette partie du parc car, selon elles, c’était leur endroit. Cependant, Jelena n’était pas une fille qui se laissait faire. Elle fut la seule parmi ses copines à s’opposer.

— On ne bougera pas, et vous n’allez rien faire du tout !

Louisia, l’une des trois jeunes filles, la menaça :

— Tu ferais mieux de ne pas prendre la confiance, sale gamine. Toi et ta bande de pisseuses, vous feriez mieux de dégager !

Malgré le fait qu’elles aient neuf ans, et Jelena seulement sept, elle leur mit une bonne correction à elle toute seule. Les trois filles partirent en pleurant, menaçant Jelena de revenir.

Au même moment, une dispute éclata entre Chris et Micka. Eux, John, et certains garçons de leur école, aimaient s’amuser en jouant à la bagarre. Chris, n’ayant jamais été très athlétique, finissait toujours par devoir être aidé par Mickael. Mais cela l’agaçait : n’aimant pas demander de l’aide, il laissa exploser sa colère.

— Ça suffit ! cria-t-il. Arrête de te prendre pour le plus fort à chaque fois, je n’ai pas besoin de ton aide !

— Hein ? Mais qu’est-ce que tu racontes ?

— T’es toujours là à vouloir faire le chef, arrête de croire que tu vaux mieux que nous !

— Arrête de dire n’importe quoi. À aucun moment je me crois être le chef ou mieux que toi ou John. C’est normal que si l’un est en difficulté, les autres viennent en aide. On est frères.

— J’aurais très bien pu m’en sortir tout seul pendant la bagarre. Tu voulais juste me faire passer pour un bouffon devant les autres ! Et arrête avec tes histoires de frères, les seuls frères ici, c’est toi et John.

— Du calme, les gars — demanda John. Chris, tu sais très bien que ce n’est pas pour ce genre de choses que Micka agit comme ça.

La dispute prit de l’ampleur, et Chris décida de partir.

Le lendemain, alors que Jelena jouait encore avec ses amies, elle fut interpellée par trois garçons. Il s’agissait des grands frères de Kelly, qui se tenait juste derrière.

— Alors c’est toi qui as tapé notre sœur, hein ? Tu te prends pour qui, sale gamine ?

Malgré son fort caractère, Jelena ne put rien faire. Les garçons la maintinrent pendant que Louisia la frappa, le tout sous les yeux de ses amies, bien trop lâches pour intervenir. Ensuite, ils lui donnèrent rendez-vous dans un lieu à l’abri des regards, où elle devrait leur apporter la modique somme de 50 Karas (équivalent de 50 €) le lendemain. Ils lui interdirent d’en parler à qui que ce soit, sous peine de représailles.

Le soir même, Chris sentit sa sœur triste. Mais il eut beau lui demander ce qu’elle avait, elle refusa de dire quoi que ce soit. Le jour suivant, Jelena, qui avait volé de l’argent à son père, partit vers le lieu de rendez-vous. Une fois sur place, elle vit les trois grands frères déjà là, accompagnés de leur sœur.

Ils avaient tous les trois dix ans, mais l’un d’eux semblait être le meneur. Il prit la parole :

— T’as pris du temps, la pisseuse. T’as les sous, j’espère !

Jelena acquiesça, baissa la tête et s’approcha d’eux, au même moment…

— Touchez pas à ma sœur, bande d’enculés !

Chris, qui l’avait suivie discrètement, surgit avec un énorme bâton et frappa le meneur à l’épaule, par-derrière.

— Bordel, chopez-le !

À trois contre un, Chris se débattit comme un lion pour défendre sa sœur. Sa rage lui donnait des forces : il réussit à rendre quelques coups. Mais la différence d’âge et de gabarit fit la différence. Peu à peu, il ne sentait plus son corps. Il commençait à perdre conscience quand…

Le meneur, qui le rouait de coups, se prit un violent coup par surprise. Même de dos, il reconnut qui c’était : c’était Mickael.

— Je suis désolé de t’avoir énervé, Chris… C’était pas ce que je voulais — déclara Micka, peinant à mettre des mots sur ses pensées, encore trop jeune. Mais même si tu me détestes, t’es mon frère. Donc je continuerai à venir t’aider, que tu le veuilles ou pas.

Chris comprit à quel point son égo avait pris le dessus et l’avait fait réagir de la pire des façons.

— Bande d’enfoirés ! Vous avez osé faire du mal à notre frère ! — hurla John, étranglant de chaque main les deux autres garçons.

En tournant la tête, le meneur vit Jelena, complètement apeurée, téléphone à la main. Il comprit alors que c’était elle qui les avait appelés. S’ensuivit un combat entre deux fratries de trois frères chacun, qui se conclut par la victoire de Chris, Micka et John.

En rentrant chez eux, le père de Chris était furieux en découvrant que quelqu’un lui avait volé de l’argent. Jelena, réalisant qu’elle avait perdu le billet dans le feu de l’action, était tétanisée. Elle eut peur de se dénoncer. Mais ce ne fut pas nécessaire : Chris se dénonça à sa place. Ce soir-là, leur père le roua de coups. Pourtant, Chris était heureux que ce soit lui et non sa sœur qui ait souffert.