CHAPITRE 94 : « Shanpaï » « Toshio Yamashita-Kun »

« Bibliothèque du campus. »

Alors que son colocataire discute dans le parc avec ses nouveaux amis, Toshio profite de sa dernière journée de tranquillité avant la reprise officielle des cours pour terminer quelques recherches qui lui tenaient à cœur durant les deux mois de congé.

Il ne peut s’empêcher de sourire en constatant que depuis qu’il a cessé de prendre ses médicaments, son esprit travaille beaucoup plus rapidement que durant ces deux dernières années.

Si rapidement qu’en à peine quelques heures, il a abattu le travail qui d’ordinaire lui aurait sans doute pris plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

De se sentir retrouver ses facultés d’avant lui redonne goût à la vie, oubliant totalement son jumeau qui s’en voit rejeter au plus profond de son inconscient comme dans une prison devenue inexpugnable.

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Hoshio est conscient qu’il ne pourra plus s’échapper, l’esprit de son frère débarrassé de ces drogues qui l’affaiblissaient ayant pris en maturité et en puissance, ne lui laissera plus consciemment ou pas, la liberté de s’évader même que quelques heures durant son sommeil.

Comment en vouloir à Toshio d’avoir ce puissant désir d’exister, mais que va-t-il advenir de lui Hoshio et surtout de son amour sincère pour Xiao, il comprend alors que seul ce dernier qui connaît son existence pourra le sauver en faisant entendre raison à son jumeau.

Encore faudra-t-il qu’il s’inquiète de ne plus ressentir sa présence, que Toshio sans le vouloir lui fera sans doute plus ou moins oublier ne serait-ce que déjà du fait qu’il soit redevenu « normal ».

Hoshio est parfaitement conscient de l’attrait certain de ce corps attirant qu’ils devraient partager à deux et a minima de façon équitable, Toshio retrouvant la joie de vivre et le sourire irrésistible de son frère fera très vite oublier à Xiao l’existence de cette autre personnalité qu’est la sienne.

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Florian rase les murs depuis qu’il sait que plusieurs personnes sont venues pour l’interroger, il pourrait bien entendu faire en sorte que tout ne soit jamais arrivé, mais sa répugnance à trop jouer avec le temps a été plus forte mais peut-être également à cause du piment que lui apporte une telle situation et le voilà maintenant à peaufiner son personnage pour qu’aucun doute ne leur vienne quant à ce qu’il ne soit pas celui qu’il prétend.

Il arrive donc lui aussi à l’entrée de la bibliothèque, endroit des plus discret pour ne pas être repéré avec tous ces rayons de livres qui vous cachent à la vue.

La présence de Toshio lui amène soudainement un vif intérêt, il se place alors de façon à pouvoir l’épier sans que ça paraisse bizarre, mais surtout sans que son fils le repère.

Florian en oublie presque la raison de sa propre présence tellement sa curiosité d’en savoir plus sur son fils est grande, n’ayant eu avec lui que très peu de contacts depuis la première fois où ils se sont rencontrés pour le test d’entrée au club de basket.

L’aspect général de Toshio lui rappelle bien sûr le sien, avec pourtant quelques différences venant de la part des gènes transmis par sa mère.

Un petit rictus de fierté ferait comprendre à quelqu’un qui le surveillerait à son tour, combien il n’est pas peu fier d’avoir engendré même sans que ça soit de sa volonté, un tel spécimen aussi parfait d’humain.

Un petit soupir de contrariété à l’idée que peut-être il ne pourra pas lui laisser vivre sa vie, du moins pas comme son fils l’aurait sans doute souhaité, car il ne fait plus aucun doute pour Florian que quoi qu’il arrive, il lui sera impossible de faire comme s’il n’existait pas.

Le dernier dilemme mais pas le moindre qu’il va devoir résoudre est celui de sa double personnalité, pour cela il va lui falloir avoir de longues discussions avec l’un comme avec l’autre, avant de prendre la décision qui conviendra le mieux.

D’après la conversation qu’il a eue avec Xiao, il retrouve l’étrange similitude qu’il a lui-même vécue avec son frère jumeau et Florian doit bien se reconnaître dans le Toshio qui étudie actuellement sous ses yeux, plutôt qu’avec l’« Hoshio » que lui a décrit son « neveu » et qui lui fait penser inévitablement à Eldarian, surtout depuis qu’il connaît la façon des plus expéditives utilisée pour sauver la vie de son frère.

Il en est là dans son schéma de pensées à espionner son fils, quand il se laisse surprendre et sursaute au contact d’une main sur son épaule.

- Hep !!
- Il te plaît ?? Oui ?? Mais tu sais que toi aussi tu n’es pas mal, tu devrais juste changer tes affreuses lunettes mon lapin !!

Florian se tourne pour voir celui qui vient d’une façon très claire de lui proposer la botte en paroles à peine voilées, avec une mimique qui lui amène le frisson dans le dos tellement ce genre de personnage lui est antipathique de par cette façon maniérée de roucouler et de baver dès qu’un garçon lui plaît.

Il garde pour lui les remarques désobligeantes qu’il a en tête pour ne lui répondre que d’un ton neutre, mais qui sera parfaitement compris par l’hurluberlu fardé outrageusement qui le dévore actuellement des yeux.

- N’est-il pas interdit de parler à la bibliothèque ? De plus tu devrais améliorer tes méthodes de drague si tu veux avoir une chance !! Mais plus important encore, mieux sélectionné ceux sur qui tu t’exerces en recherchant dans ton profil, pour ça il te suffit de te regarder dans une glace pour comprendre !! Maintenant si ça ne te dérange pas de me laisser mater le beau gosse assis à la table, il m’intéresse, sois en sûr plus que toi et pas besoin de te faire un dessin pour t’expliquer, n’est-ce pas ?? Suffit de le regarder !!
- Sale gougeât !!

Le gars fusille Florian des yeux avant de s’éloigner, à la fois furieux et dépité, de sa démarche chaloupée qui amène une dernière grimace sur les lèvres de Florian.

- Pfft !! Décidément on en trouve partout !!

Son regard revient alors vers son fils qui repose le livre qu’il avait en mains pour en prendre un autre, mettant celui qu’il a terminé sur une pile déjà conséquente à sa gauche alors que celle à sa droite est presque terminée.

Florian ne peut s’empêcher de parler tout seul, heureusement à voix suffisamment basse pour ne pas être entendu.

- Ta façon de lire ne m’est pas inconnue, tu m’intéresses de plus en plus le sais-tu !!