LUCAS

Deux semaines plus tôt

Allocution de Ley

- Chers invités, bonsoir. L'Aurora Club vous souhaite une cordiale et chaleureuse bienvenue à sa vente aux enchères annuelle. Nous sommes ravis de vous compter parmi les élus de notre bel établissement. J'espère que vous passerez une excellente soirée en notre compagnie.

Plusieurs filles en sous-vêtements chics et aguicheurs, sans doute aussi belles les unes que les autres, sont alignées sur l'estrade, mais je ne vois rien de tout cela. Je n'ai même pas réellement écouté l'allocution de bienvenue de Ley Carré. Je suis tellement concentré sur elle, que ce qu'elle a pu dire me passe complètement au-dessus.

Je ne vois que ses jambes interminables encore rehaussées de talons aiguilles. Sa longue robe rouge fendue laisse entrevoir ses sous-vêtements de satins et de dentelles blanches. Son visage fin et délicat, sa bouche pulpeuse aux accents de fruits mûrs est un appel aux baisers.

Seigneur, sa chevelure ébène est la plus longue et volumineuse qui m'ait été donné de contempler. Je suis beaucoup trop loin pour distinguer correctement la couleur de ses yeux, mais son regard brûle d'un feu qui m'embrase littéralement.

Alors que je suis perdu à dévorer cette femme du regard, j'entends ricaner dans la loge. Agacé, je me retourne pour constater que Casey et, qu'Andres ne se privent pas pour se foutre ouvertement de ma gueule.

- Tu as l'air gravement atteint. me dit ironiquement Casey.

- Tu peux être honnête et nous dire depuis quand tu n'as pas baisé ? surenchérit Andres.

Il lève la main droite pour faire semblant de jurer.

- Promis, nous garderons le secret, n'est ce pas, Casey ?

Ils éclatent de rire, mais dissimulent leur bouche derrière leurs mains comme deux gonzesses afin de rendre leur hilarité plus discrète.

- Vous êtes vraiment deux enfoirés ! C'est à se demander si je suis vraiment votre meilleur ami. Je vois que cette situation vous distrait énormément !?

- Comment ne pas nous amuser de ton futur malheur ? Ce sera tellement bon de te voir perdre pour une fois !

- Pourquoi êtes-vous si sûrs de mon échec ?

- Parce que tous ceux qui s'y sont risqués, ont lamentablement échoué ! Cette belle créature ne se laisse approcher de personne. Et bien qu'elle soit une des principales coordinatrices du club, on ne l'a jamais vue s'exhiber avec un amant, contrairement aux autres. De plus, il semble, selon les rumeurs, que le propriétaire des lieux l'a déclarée intouchable ! me dit Andres.

- Impossible ! Et tous ces bruits de couloir, selon lesquelles le propriétaire de l'Aurora est une femme qui se cache derrière le pseudonyme de Vénus ?! Je vois mal cette fille être saphique !" dis-je. Ils haussent les épaules puis Casey finit par me rétorquer.

- Et pourquoi ne serait-elle pas lesbienne, Lucas ? Là, c'est ton orgueil qui parle ! Écoute, si j'étais à ta place, je ne m'aventurerais pas là-dedans ! Cet endroit nous offre tout ce à quoi des gens comme nous peuvent aspirer, et même plus. Mais ne t'y trompes pas, c'est avant tout du business ! La personne derrière l'Aurora ne prendra jamais le risque de révéler son identité et fureter pour en savoir plus c'est chercher les emmerdes. Ils sont parfaitement au courant de tous nos sales petits secrets, sans compter que tout ce à quoi nous accédons ici n'est pas forcément légal ! J'ai voulu te provoquer avec ce pari, mais tu n'es absolument pas tenu de l'honorer.

J'esquisse un sourire en coin, puis hausse de nouveau les sourcils. Putain, pas question de lâcher l'affaire ! Cette femme attise ma curiosité, sans compter que je veux me la faire de toutes les manières possibles. Et puis, laisser Casey poser, ses doigts sur ma sœur, n'est pas du tout envisageable. Merde, je pêche par orgueil et excès de confiance, mais tant pis.

- Tu comptes réellement aller jusqu'au bout ! s'exclame Andres avec fausse nonchalance.

Même affalé sur son fauteuil, Andres transpire le sex-appeal. Avec son air de Latin Lover, ses cheveux bruns/châtains et ses yeux noisette, il persuade n'importe qui de n'importe quoi. C'est pourquoi il est un si bon en tant qu'avocat d'affaires. Mais moi, c'est mon meilleur ami depuis beaucoup trop longtemps pour me laisser prendre à ses manipulations.

Il continue l'air de rien.

- Es-tu sûr que Kelly est bien ta sœur ? Sérieusement, Lucas? me dit-il.

- Oui, elle l'est . Mais je compte bien respecter ce pari, alors s'il te plaît, ne te réjouis pas trop rapidement, Casey.

Fort de cette résolution, le silence était retombé sur notre loge. Armés d'une tablette reliée à un écran de seule et unique personne; Ley Carré.

J'étudie tous ses mouvements, l'ondulation lascive de son bassin, le renflement voluptueux de ses seins, sa façon de se lécher les lèvres au plus fort des enchères, la souplesse de ses pas, la grâce de son port de tête, le balancement presque imperceptible de ses longs cheveux qui me font bander. À chacun de ses gestes, elle fait naître un intense désir au creux de mes reins que j'ai bien l'intention d'assouvir.

- Deux cent cinquante mille! Crie quelqu'un.

- Nous avons deux cent cinquante mille, qui dit mieux ?

- Deux cent soixante-dix mille !

- Bien, trois cent soixante-cinq mille ?

Le marchandage se déchaîne, créant une vive euphorie chez les participants. Pourtant seul le corps de Ley Carré me fait vibrer à cet instant.

- Quatre cent mille !

- Quatre cent mille une fois, deux fois, trois fois, adjugé pour quatre cent mille, loge numéro deux.

Par la suite, dix fille furent présentées mais seul Andres a surenchérit jusqu'à la dernière minute, au point de remporter l'innocence d'une jolie blonde. Alors qu'une des hôtesses de l'Aurora vient chercher Andres pour les formalités, je demande à parler à Ley Carré.

- Puis-je m'entretenir avec mademoiselle Carré ?

Inquiète, l'hôtesse se permet une question.

- Pardonnez ma demande, mais aurions-nous par le plus grand des hasards commis un préjudice ?

- Non, pas le moindre, je veux simplement m'entretenir avec elle quelques minutes.

- Très bien, je ferais part à mademoiselle Carré de votre désir de la rencontrer.

J'affiche un sourire séducteur, et la remercie. Andres et Casey ne se départent pas de leurs sourires moqueurs. Toutefois, je fais semblant de ne rien remarquer. Même s'ils n'ajoutent pas un mot, je sais parfaitement qu'ils n'en pensent pas moins. Quelques minutes plus tard, une jeune femme élégante vient me chercher dans notre loge.

- Monsieur Lambert, veuillez me suivre, mademoiselle Carré va vous recevoir.

Je la suis dans un long corridor jusqu'à ce que nous tombions sur une lourde porte de chêne travaillée avec une élégante inscription :

"Appartement de Ley Carré"

D'un geste, l'hôtesse m'invite à entrer et, sans demander son reste, s'en va sans un regard en arrière.

À peine ai-je franchi le seuil que celle-ci me questionne sans même me regarder. Bonsoir, monsieur Lambert.

- Que puis-je pour vous ?