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En sortant de l’hôtel où elle vient de rencontrer ce journaliste français, Emmanuelle ne sait plus quoi penser. Elle l’avait presque oublié, elle avait réussi à se dire qu’il n’avait été qu’une aventure, une récréation. Et ce journaliste venait tout bouleverser. Il la ramenait six ans en arrière, à la fin de cette aventure qui avait duré deux ans, et qui c’était interrompue brusquement, sans que rien ne le laisse présager.
Elle n’avait plus aucune nouvelle de lui depuis septembre 2020. Aucun mail, aucun appel, pas de sms. Alors même qu’ils s’écrivaient, s’appelaient tous les jours. En deux ans, ils avaient échangé des milliers de mails du plus tendre au plus érotique. Elle l’avait aimé, profondément, et malgré la distance qui les séparait, ils avaient réussi à se rencontrer trois fois après leur première rencontre.
Et puis d’un coup, plus rien, c’était comme s’il avait cessé d’exister.
Emmanuelle est maintenant partagée entre l’envie de savoir ce qu’il est devenu, quelle a été son histoire. L’envie de lire ce carnet, dans lequel elle pense pouvoir trouver des réponses. Et l’envie de laisser tout cela derrière elle.
Toute à ses pensées, elle ne remarque pas qu’elle est observée. Un homme, se trouve de l’autre côté de la rue et ne la quitte pas des yeux.
Elle entre dans sa voiture, démarre et part.
Elle rentre chez elle, et, en attendant l’arrivée de son mari, sort le carnet de son sac et l’ouvre. La photo, imprimée simplement sur une feuille puis découpée, la plonge immédiatement dans ses souvenirs.
Elle se rappelle.
Aéroport d’Orly, Juin 2019
Cette photo, elle et lui, en selfie. Prise à l’aéroport, en Juin 2019 à la table d’un café, le Starbuck.
Elle était arrivée, juste sortie des transports en commun. Il l’attendait depuis un moment, son avion étant arrivé un peu plus tôt.
Le premier contact avait était tendre, ses bras autour d’elle, son nez dans ses cheveux. Il l’avait conduite à une table, commandé des cafés. Ils avaient discuté, comme à leur habitude, de tout et de rien, juste pour se parler. Mais cette fois là, l’image allait avec les voix, et ils ne s’étaient pas quittés des yeux. Parfois, comme mue par une force invisible, sa main à lui venait caresser doucement ses doigts, où sa paume, son avant bras.
Les échanges qu’ils avaient depuis quatre mois étaient devenus de plus en plus tendres, amoureux. En dehors des jeux érotiques, un véritable amour était né. Il lui décrivait parfois comment il aimerait la prendre dans ses bras, juste pour un câlin, juste pour la sentir contre lui.
C’est cette pensée qui l’avait faite se lever et venir sur ses genoux. C’est cette envie, ce besoin de sa tendresse qui l’ait amenée à poser la tête sur son épaule en lui murmurant à l’oreille.
- Je veux mon câlin.
Il l’avait alors entourée de ses bras, posé le menton sur sa tête. Il avait embrassé ses cheveux alors qu’elle effleurait sa mâchoire de ses lèvres. Et, tout doucement, leurs bouches s’étaient jointes, d’abord tendrement, se découvrant pour la première fois. Puis le baiser était devenu plus profond, plus lascif. Ses mains à lui étaient passaient sous les vêtements, explorant sa chaleur, sa douceur. Elle, les mains sur sa nuque, le pressait contre sa bouche. Le baiser avait duré longtemps, rattrapant tous ces jours où ils avaient tant désiré ce moment.
Le « Je t’aime » fût commun quand leurs lèvres se séparèrent. Exprimé pour la première fois les yeux dans les yeux plutôt qu’à travers une boite mail ou un téléphone. Cela les avait fait rire, et ils s’étaient levés pour quitter le café, après avoir fait ce selfie, tous les deux, joue contre joue.
Ils avaient ensuite simplement déambulé dans le terminal, main dans la main, ou serrés l’un contre l’autre, s’arrêtant parfois devant la vitrine d’une boutique pour échanger un baiser langoureux.
Ce jour là, elle n’avait pas beaucoup de temps. Il l’avait accompagnée jusqu’à l’Orlyval où ils avaient attendu ensemble la rame qui devait les séparer. Assise sur ses genoux, elle avait profité de sa tendresse, des ses baisers, de ses caresses. Il s’était fait de plus en plus pressant, ses mains passant de son dos à son ventre puis à ses seins, comme s’il voulait imprimer la chaleur de sa peau et la fermeté de ses formes dans son esprit avant de la quitter.
Elle n’avait pas pu s’empêcher de laisser partir la rame, voulant profiter encore un peu de lui.
En entrant dans la suivante, elle s’était assise de façon à ne pas le quitter des yeux. Et, alors que la rame s’éloignait, elle avait pu lire un dernier « je t’aime » sur ses lèvres.
Ce soir là, allongée à côté de son mari, elle avait rêvé de lui.
C’est le bruit de la porte de son appartement qui la sortit de ses pensées. Elle range rapidement le carnet dans son sac à main, et accueille son mari d’un baiser, essayant de ne pas lui montrer son trouble.
Sa décision est prise, elle contactera le journaliste dés que possible.
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