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Emmanuelle roule sur la 400 en direction de Vaughan, elle a l’esprit ailleurs, loin avec lui, avec leurs moments, et surtout ce moment, celui où tout a changé. Ce moment qu’ils ont souvent évoqué tous les deux. Cette phrase qu’il a écrit, et qu’elle lui demandé de lui dire à l’oreille la deuxième fois qu’ils se sont rencontrés à Orly.
Ils échangeaient des mails plus ou moins ambigus à cette époque là, beaucoup de mails. Il l’avait entrainée dans ses jeux, où elle s’était petit à petit dévoilée pour lui. Ils avaient échangé des mots qui avaient fait monter chez elle un sentiment qu’elle ne s’attendait pas à ressentir. Ils avaient fixé des règles, et transgressé ces règles rapidement, une par une. Le 21 février 2019 elle devait lui envoyer quatre photos d’elle, pour qu’il la découvre encore un peu plus.
Il y avait donc eu ces quatre photos, en quatre mails différents, envoyés le soir, avant d’aller dormir. Elle savait qu’il découvrirait ces photos le lendemain matin à son arrivée au travail, et qu’il y répondrait.
Elle apparaissait entièrement nue, offerte. Et, alors qu’elle s’attendait à des commentaires crus, il avait été tendre, sensuel. Même à la dernière photo, celle de son sexe ouvert, pour lui.
Emmanuelle arrive chez elle, et se précipite sur son ordinateur. Elle a gardé les mails échangés avec lui, et c’est fébrilement qu’elle cherche celui-là. Elle ne le trouve pas de suite, s’énerve. Puis elle se souvient qu’elle avait utilisé ce mail un an plus tard, à la date anniversaire de ses mots.
Enfin elle le trouve, l’ouvre. Elle rougie devant la photo de son sexe ouvert, elle relit les mots.
Elle :
Pour finir...
...cette photo, juste avant que mes doigts ne jouent dessus.
Juste avant que ma mouille envahisse le carrelage de ma salle de bain.
Juste avant de gémir, doucement, en repensant à ce que je t'ai fait tout à l'heure.
Juste avant de crier, en imaginant tes doigts qui s'enfoncent en moi, qui se crispent, et ta voix.
Juste avant l'orgasme.
Lui :
Ta main droite vient se poser sur ton sexe, et tu l'ouvre pour moi,
m'invitant du regard à aller plus loin.
Et je réponds à ton attente. Ma main gauche remonte sur ton ventre est
se fait de nouveau caressante.
Je parcours ta fente du pouce droit. D'abord tes petites lèvres,
humides, puis je remonte sur ton petit bouton que je masse tendrement.
Du bout de l'index, je pénètre un peu, juste deux phalanges, afin de
recueillir un peu de ton nectar. Puis je le porte à ma bouche pour te
goûter.
Lui :
Vas plus loin.
Je veux te voir te masturber pour moi.
Elle :
Une vidéo ? Déjà ?
Je sais...tout va très (trop) vite entre nous.
Je sais pas si je suis prête tu sais.
J'ai envie, et peur ;) comme toujours !
Lui :
Non, pas de vidéo.
Une photo, de ton sexe après. Et de ton visage aussi, après que tu ais joui.
N'allons pas trop vite, je veux que ça dure.
Elle :
Ok.
Parfait.
Très bien.
Tu es...parfait.
Lui :
Parce que tu es parfaite.
Elle :
Va falloir que je me calme Sébastien...ou que toi tu te calmes, je sais pas, mais vraiment...sinon...
Lui :
Sinon quoi?
Elle :
Sinon...il risque de se passer des trucs. Enfin en moi.
Mais je me demande si c'est pas trop tard en fait.
Stop.
J'arrête.
Et enfin elle arrive à ce mail, à ce mail qui a tout déclenché. A ce mail qui a fait de la suite de leur histoire, une merveilleuse histoire d’amour. Elle ferme les yeux, elle n’a pas besoin de le lire. Même huit ans après, même alors qu’elle n’y pensait plus jusqu’à l’arrivée de ce journaliste, elle se rend compte qu’elle le connait par cœur.
Lui :
Emmanuelle, ma douce et belle Emmanuelle.
Ma petite éponge à sentiments, ma petite fontaine.
Ma belle, si tu savais à quel point c'est déjà trop tard.
Mais tu as raison arrêtons.
D'ailleurs, je dois m'en aller, à demain.
Je t'embrasse, fort.
Les mots résonnent dans sa tête, défilent derrière ses paupières closes. Ils remontent du plus profond de son âme, réinvestissent son esprit. Les mêmes sensations reviennent, le chaud, le froid, la larme de joie. Les frissons la prennent, la submerge. Et puis l’incompréhension arrive, et la colère. Pourquoi est il parti ainsi ? Sans explications, sans même un au revoir ? Et maintenant la tristesse, elle constate qu’il lui manque. Et la curiosité, elle veut en savoir plus, elle doit lire ce carnet, pour savoir.
Elle attrape son sac et en tire le carnet vert.
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