Chapitre 8
C’est carrément un labyrinthe, y’a des couloirs de partout et aucune trace d’eux.
Mon pauvre Garret.
Je vais finir par penser que je suis la pire des tantes.
J’ouvre toutes les chambres que je croise sur mon passage. Ils sont introuvables.
Je la chope, je la défonce.
Enfin, faut pas trop que je l’abime, c’est quand même mon corps, merde ! J’ai toujours l’espoir d’y retourner un jour. Je ne sais pas comment, mais si on l’a fait une fois, y’a pas de raison pour ne pas recommencer.
Je longe à nouveau un de ces interminables couloirs lorsqu’une voix familière interrompt ma recherche.
« Ça va ma boulette ! Tranquille ! Pendant que tu te fais casser la rondelle, je te rappelle que la Véro se cache toujours dans le bâtiment ! »
C’est Lapin ! Mais qu’est-ce qu’il raconte ?
Il a craqué ou quoi ?! Et c’est qui la boulette ?
Y’a du mouvement.
Ça y est je les vois. Véro sort d’un local, accompagnée de Garret.
C’est bon, je la tiens. Ils ne m’ont pas vu.
Ils ont un peu d’avance mais Garret galère à courir avec sa camisole, il se mange la bouche tous les cinq mètres. Allez ! Je me tape un sprint.
Black-out. Plus de lumière.
Merde, c’est quoi ça encore. ? J’ai dû dévier sur le côté.
Je me ramasse la gueule. Pas évident de courir dans l’obscurité.
La lumière se rallume.
Je me retrouve à moitié avachie sur une poubelle. Véro court toujours. Je me relève, elle arrive au bout du couloir, faut pas que je les perde de vue.
Je suis crevée. Il est vraiment pourri ce corps, aucune endurance, vivement que je rentre à la maison, bien au chaud dans mes cinquante-cinq kilos.
Je me rapproche. Je ne suis qu’à quelques mètres. Elle a du mal à ouvrir la porte. On dirait qu’elle est verrouillée. Coup de bol.
C’est bizarre de se voir de dos. Mais faut quand même reconnaitre, que j’ai vraiment un bon cul.
Oh la garce ! Elle s’est coupée les cheveux ! Ça me gonfle !
La porte s’ouvre. Fait chier, c’était trop beau. Ils se font la malle.
Je franchis la porte à mon tour.
Bon, ils sont partis à droite ou à gauche ?
Je file à droite, on verra bien. Les murs des couloirs ont changé de couleur. Ce doit être un autre service.
J’arrête de courir, je suis à bout de souffle. Je marche pour un peu récupérer et passe devant plusieurs chambres vides. C’est bizarre, je jette un coup d’œil vite fait à l’intérieur, les chambres sont dénuées de déco. Pas de lit, pas de meubles, juste des cellules capitonnées.
Bizarre qu’elles soient toutes ouvertes.
J’arrive au bout, je croise une interne.
Une jolie petite brune.
- Bonjour, excusez-moi, vous n’auriez pas vu une jeune femme avec un enfant courant dans les parages ?
La jeune fille hésite, réfléchit puis avec une toute petite voix me répond.
- Oui bien sûr, il y a quelques secondes ils sont passés par là, me dit-elle en me montrant une porte.
Bingo, Véro, ça va être ta fête.
- Merci beaucoup, je lui balance en reprenant ma course.
J’ouvre la porte.
Trois types se tiennent devant moi.
Á première vue, je dirais que ce sont aussi des internes, ils sont habillés en blanc, mais lorsque j’aperçois le plus grand des trois, enfermé dans sa camisole qui se met à hurler. « Fille ! La fille ! La fille ! »
Je me dis que peut-être, je viens de tomber comme une gourde dans un piège de dangereux psychopathes souhaitant profiter quelques instants de leur liberté.
Bref ça pue.
Je referme la porte, qui bien sûr ne sera pas restée longtemps fermée.
Les trois dingos me prennent en chasse.
Je repasse devant la petite brune.
- Salope ! Pourquoi tu ne veux pas jouer avec Julien ?! Reviens ! Reviens !
Sa voix criarde résonne dans tout le couloir.
Elle aussi, se met à me talonner au cul.
Bordel, j’ai pas besoin de ça. Je ne sais pas où je vais. Je cours à l’aveuglette.
Je me retourne. D’autres les ont rejoints.
L’air aussi barré qu’eux. Ils hurlent en chœur des trucs comme « La fille ! Chopez-la ! Viens ! Allez viens ! »
Ils sont presqu’une dizaine.
Je prends un peu d’avance, ça doit faire longtemps qu’ils n’ont pas fait d’exercice. Sauf peut-être celui à quatre pattes, il va super vite.
Bon… Encore un choix à faire.
Je me retrouve devant une porte et un couloir. Jusqu'à maintenant, on ne peut pas dire que j’ai prise les meilleures décisions.
Je ne vais pas pouvoir continuer à cavaler comme ça.
Je tente un truc.
J’entrouvre la porte, me déchausse, pose un escarpin devant et file me cacher derrière un distributeur de boissons.
Ça passe ou ça casse.
Je les entends qui arrivent. Ils sont trop excités.
Si ça foire, je suis foutue.
Le type à quatre pattes devançant tout le monde, s’arrête devant ma chaussure.
Il la renifle.
Les autres barges arrivent à ses côtés.
Le gars se relève, ouvre doucement la porte et murmure
« La fille…La fille ».
Lentement mais fermement décidé à passer enfin un bon moment, la troupe de psychopathes franchissent la porte de la cafétéria.
C’est pas passé loin, on a évité le drame.
Je sors de ma cachette, marche quelques secondes et ouvre une énième porte.
Le choc.
Je me retrouve nez à nez avec Véro.
Elle a l’air aussi surprise mais apparemment elle reprend vite ses esprits.
Elle me file un puissant coup de genou dans le ventre.
Je m’écroule par terre. Elle repart dans le sens inverse. J’arrive plus à respirer. Elle m’a tuée le bide.
Elle avance tranquillement. Garret se ramasse la gueule. Elle souffle, sort une énorme machette.
Ah ? Elle s’est faite aussi un tatouage sur le bras.
Elle coupe les lanières de la camisole du petit, lui fout la lame contre la gorge et le pousse devant elle.
Je peine à me relever. Je rampe sur le sol.
Faut pas qu’elle se barre.
Faut pas qu’elle lui fasse du mal. Lapin t’es où ?!
Elle arrive devant un ascenseur, la porte s’ouvre.
Non, ne partez pas ! Encore…
Je me remets debout et prends appui contre le mur.
Elle rentre dans la cabine. Se retourne vers moi.
La lame toujours collée contre la gorge fragile de mon petit Garret.
Elle me sourit. Elle tient sa revanche.
La porte se referme. J’accélère le pas.
Je mate l’écran de l’ascenseur, ils descendent et s’arrêtent au sous-sol.
Je prends les escaliers.
Merde, la porte est verrouillée. J’ai la tête qui tourne. J’enfonce le bouton de l’ascenseur.
L’attente est interminable. La porte s’ouvre, je m’engouffre dedans.
Je tapote comme une hystérique sur la touche -1.
J’arrive enfin.
Un parking. Je scrute les alentours.
Personne.
Je baisse les yeux. Du sang… Je trempe mon doigt.
Il est frais. J’ai peur. D’autres traces, je les suis.
Elles sont de plus en plus grosses. Pourquoi lui ?! Pourquoi se venger sur lui ?! Les marques sanglantes laissent présager le pire.
Un corps qu’on traine. Ou bien un corps qui se traine avant de se vider complètement.
La trace tourne à gauche derrière une ambulance.
Pas un bruit. J’avance doucement. Peur de ce que vais trouver.
Je ferme les yeux. Je tâtonne le véhicule et le contourne. J’envisage le pire.
Mon Dieu, faites que je me trompe.
J’ouvre…
Putain d’intuition féminine.
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