Chapitre 11
- Lucy, file-moi les clés ! Je laisse ma caisse de flic, on sera plus discret en civil.
Elle s’exécute et me balance le jeu. Je prends le volant.
Je m’installe, Lucy ouvre la portière côté passager.
- Non. Harry, passe devant. Lucy, toi tu t’occupes de ton neveu à l’arrière, il ne va pas tarder à se réveiller, je préfère que tu gardes un œil sur lui.
Harry est notre seule chance de retrouver Penny, je ne voudrais pas qu’il se fasse croquer en chemin, ce serait dommage.
J’allume le contact, sors du parking, je fais le tour du rond-point, rentre dans le parking et me gare à nouveau devant l’hôpital.
Je sors de la caisse devant les regards incrédules de Lucy et d’Harry.
Je traverse la porte d’entrée de l’hosto.
Dix minutes plus tard, je ressors.
- Tu me déçois, putain ! « Reste-là, surveille l’entrée et je reviens te chercher », tu parles ! Tu me laisses pendant que tu fais joujou avec un inconnu, se plaint Ed.
- Ça va, je suis revenu… C’est pas comme si je m’étais barré et t’avais oublié…
- J’ai tout vu ! Alors, c’était bien ?! On a bien fait la bagarre ? On a plus besoin de son Uppercut-tête-de-mort-de-l’enfer ?!
- Écoute, c’est pas ce que tu crois, c’est un malentendu, ne nous juge pas, les images que tu as vues sont sorties de leur contexte, je le rassure.
- J’ai mal… murmure Ed.
Putain, on dirait une vieille dispute de couple sur le déclin. Je me ressaisis.
- Bon Ed, tu vas pas faire ta jalouse, on a du boulot. J’ouvre la portière et le balance sur les genoux de Lucy.
Je fais vite-fait les présentations.
-Harry, Ed.
- Enchanté, lui dit Harry.
- Mmm, lui marmonne Ed.
Cette fois-ci on trace, quitte le centre hospitalier pour s’engouffrer en centre-ville.
- Mais pourquoi avoir choisi de la planquer dans une école ? je demande à Harry.
- Officiellement, c’est le dernier endroit où l’on peut s’attendre à trouver une bombe mutante.
- Oui c’est sûr.
- Et officieusement, je pense que Kermit n’aime pas trop les enfants.
- Ah mais alors là, je le rejoins, putain, je peux pas les voir les mioches.
Harry me regarde surpris.
- Euh... Enfin j’irai pas non plus souhaiter leur mort, mais voilà quoi.
On n’est plus très loin. Je m’arrête à un feu rouge.
Ça me démange trop de le griller mais faut pas attirer l’attention.
Une jolie blonde traverse devant nous, la tête plongée dans son smart-phone.
Elle relève les yeux, me regarde, se décompose et part en courant.
- Elle n’est pas tranquille celle-là !
Feu vert, j’accélère.
Garret se réveille. Il baille à s’en décrocher la mâchoire. On est tous un peu stressés. Pourvu qu’il se tienne tranquille.
Je le regarde dans le rétro et lui demande.
- Salut petit, ça roule ?
Il regarde Lucy, lui sourit, caresse le crâne d’Ed.
- Oui Lapin, on est où ?
- On fait une petite balade…
Bizarre, ça fait un bail qu’il n’a pas lâché un sourire.
Encore un feu rouge.
Fait chier, c’est moins drôle de conduire sans gyrophare.
J’en profite pour me briefer sur la bombe.
- Et comment on la désamorce Penny ? Tu sais faire ça, toi ? je demande à Harry.
- Ah oui c’est super simple, elle est dans une capsule hermétique reliée à une console. Bouton rouge on l’éteint, Penny s’endort à jamais et bouton vert on active son réveil, ce qui prend une vingtaine de minutes, elle reprend ses esprits, panique, explose et disparaît à jamais.
- Y’a pas trop d’alternative pour elle, la pauvre, la plaint Lucy.
Pff mais qu’est-ce qu’il est long ce feu.
Plein le cul d’attendre, je le grille.
- Regarde, Lapin ! Tu passes à la télé, me dit Garret tout émerveillé
Qu’est-ce qu’il raconte ?!
Je mate sur la droite, une vitrine d’un magasin avec une dizaine d’écrans plats en expo. Les écrans diffusent des images de moi dans ma caisse de flic.
- Ah oui, je vous ai pas dit, j’ai tourné dans un reportage avant de venir.
Ils assurent à Canal 7, ils diffusent déjà les images ?!
- Euh…Lapin, tu devrais regarder un peu plus près, Lucy paraît inquiète.
Je me penche côté passager et observe attentivement les écrans.
Oh putain !
C’est pas mon reportage qui passe en boucle mais un flash-spécial reprenant ma course poursuite avec un bandeau jaune en bas de l’écran.
« Mort du préfet de police Cooper. Assassiné par le lapin tueur ». Puis mon portrait-robot s’affiche en plein écran « L’assassin court toujours ».
- Merde Lapin ! Si les agents tombent sur les infos, ils vont rappliquer d’une minute à l’autre, hurle Harry.
Putain, mais comment ils ont su ?!
- Oh ? Nous aussi on passe à la télé ! Trop cool, s’exclame Garret.
Sur un autre écran, je vois Garret qui fait coucou à l’arrière de ma caisse, suivi de deux oreilles blanches.
- Mais c’est nous ?! Où ils ont eu ces images ?! s’affole Harry.
En bas de l’écran, un autre bandeau jaune.
« Le lapin terroriste menace de faire sauter la ville »
- C’est en direct ! Merde, on est en direct sur Canal 7 ! Mais comment c’est possible ?!
C’est l’incompréhension totale. Je sors la tête du véhicule. Rien.
Lucy regarde derrière.
Rien.
Je pivote à gauche. Bande d’enflures.
Arthur se tient sur son scooter pendant que Dario fait un gros plan sur ma gueule.
Je passe la première. Faut qu’on se barre.
Lucy accroche sa ceinture.
- Merde Lapin, ils ne nous lâchent pas ! C’est quoi cette histoire de terroristes ?! Ils pensent vraiment qu’on veut faire sauter la ville ?
- Mais j’en sais rien, ils ont dû nous entendre dans le parking et en bon journaliste, ils balancent sans chercher à comprendre !
Faut qu’on éclaircisse cette histoire au plus vite avant que toute la ville ne nous tombe dessus.
Fait plaisir à Bertrand, il te le rend en caguant !
- C’est pas grave, on trouve Penny, on la désamorce et on dissipe tout malentendu, suggère Ed.
- Et on aura besoin de visibilité, donc on sème les deux connards mais pas trop…
J’accélère, mais de façon à les garder en vue dans mon rétro. Ils vont penser qu’ils nous pistent alors qu’on les promène gentiment. Quand on aura réglé la situation, mieux vaut pour eux qu’ils fassent leur mea-culpa en direct.
On arrive devant l’école.
Où ils sont ? je ne vois pas leur scooter.
Bon, je me gare devant le portail d’entrée. La caisse est bien en vue, ils ne peuvent pas la louper. Ça nous laisse un peu de temps devant nous.
- Allez, tout le monde descend ! On a du boulot !
On a une ville à sauver.
Rien que ça…
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