Vésanie
En un bruit assourdissant, les murs se sont effrités autour de mon être emprisonné. Sur un lit d'hôpital, étendue, agonisante ou plus tant finalement, la marâtre s'est envolée. Bloquée à l'entre deux mondes, ses cris perçants, emplis de cruauté et de méchanceté, s'élèvent dans le silence de mes insomnies. Et, mon cœur fait un tel vacarme lorsque les réminiscences, sombres et sournoises, habillent les recoins de mon esprit maudit. Les lanières de cuire résonnent encore, fouettant l'air tel un coup de tonnerre, jusqu'à mordre ma tendre chair. Enfant de l'oubli, je demeure stoïque quand les médecins m'expliquent les obscurs procédures. Mort clinique. Que se passe-t-il lorsque l'âme s'efface pour ne laisser qu'une enveloppe vide, une coquille fissurée pour un sourire demeurant caustique ? Plongée dans une nuit éternelle, son visage cendré, ses traits émaciés semblent encore me jauger. Qui suis-je pour juger les choix d'une femme à l'avenir brisé ? J'ai fragilisé le sentier sur lequel elle évoluait, vers la gloire et la célébrité, mais avais-je la possibilité de disparaître lorsqu'elle désirait simplement me délaisser pour vivre ses rêves passionnés ? Étais-je un nourisson polisson ou un gosse à martyriser pour raviver la flamme de ses souhaits éclaboussés ?
Dans l'âtre crépitent mes envies évanouies, celles qu'elle a salies en marbrant ma peau de trainées violacées, je les pleurs lorsque s'installe la nuit et ces souvenirs infinis. La douleur s'étend, mes veines brûlent en un feu ardent. Quand pourrais-je sourire et rire tel l'enfant insouciant que je n'ai jamais pu devenir ? Les échos de sa voix caverneuse s'entrechoquent contre les pans de ma désillusion, égarée ou évaporée, la sérénité ne m'étreint toujours pas.
Mama, comme une lame tranchante.
Mama, comme une larme sanglante.
Mama, comme une éclipse lorsque les étoiles sanglotent une mélodie chantante.
Mais, dans l'ombre de cette existence fanée, j'ai trouvé un soleil pour tenter de briller. Un regard mordoré qui me fait oublier, un instant, une seconde ou une éternité, les iris glacés de cette génitrice manipulatrice.
Un astre dans la nuit, lorsque la déesse nébuleuse semble trop épuisée afin de me sourire et m'enlacer pour un moment de paix.
Mon ange solitaire.
Mon roi lunaire.
Ma joie incendiaire.
Je l'admire lorsque les débris de mon esprit se heurtent contre les parois de mon cœur harassé. Dans ses yeux pétillent la malice et les secrets amoureux. Un coup de foudre ou un bleu à l'âme. Une folie furieuse dans les méandres de mes désirs abolis.
Ma jolie vésanie.
De mon cœur, il est la plus belle symphonie. Ma tragique mélodie, tel un hymne à l'amour alangui.
J'ai quémandé du temps au temps, pourtant, les pièces se sont mises à trembler et le sable, semblable à une tempête en plein désert, s'est emballé. J'ai soupiré mon plaisir lorsqu'il m'adorait en quelques étreintes passionnées. Lorsqu'il me chantait ses mots d'amour en gémissements fascinés. Enchevêtrés, des heures durant, je suis devenu l'homme comblé que j'espérais. Mais la mélancolie ne nous quitte que lorsque le ciel s'embellit. Les nuages gris, semblables aux prunelles de mama, ne se dissipent pas.
Les chagrins d'amour sont les plus beaux, les plus tristes lorsqu'ils sonnent faux. Ainsi, j'ai mal à l'âme, esseulé et dévasté. J'ai laissé s'éroder mon prince illuminé ; les sentiments s'étiolent et demeurent figés dans ma cage thoracique fracturée. Rien ne dure jamais vraiment, pas même la mélodie du vent de nos tourments. Alors, j'ai retrouvé mes illusions blessées, ce disque rayé qui me rappelle que mama est encore là. Pourrais-je trouver la force de l'enterrer et d'effacer les plaies qu'elle a laissée, et enfin, retrouver mon amour fatigué ?
Sur sa peau dorée, je souhaite déposer des milliers de baisers, un souffle éraillé et mes émotions fragilisées. Un enchevêtrement des sens et l'omission d'une existence malmenée.
Je résisterai.
Telle une promesse susurrée.
Je reviendrai.
Lorsque les étoiles chanteront une ode bienheureuse.
Quand mama sera effacée et mon âme capricieuse enfin ambitieuse.
Ma jolie vésanie.
Je parviendrai à déplacer des montagnes pour oublier mes tragédies passées ou simplement les panser pour de nouveau espérer. À tes côtés, mon ciel s'éclaircit mais l'instant est si mal choisi. Attends-moi, jusqu'à ce que sonne le glas et que les morceaux de mon cœur se rejoignent en hurlant ton nom.
Alors, ma jolie symphonie, pourras-tu aimer un être fragmenté, pour une merveilleuse éternité ?
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