Le chêne solitaire
Au commencement de ma vie, j'étais un fier chêne, épanoui dans ce paisible parc public. Mon feuillage généreux apportait une douce ombre aux rires des enfants qui couraient sous mes branches. C'était une époque bénie, où chaque rayon de soleil qui filtrait à travers mes feuilles me remplissait de joie.
À cette époque lointaine, la douce mélodie du vent dans mes feuilles était ma symphonie préférée, et le chuchotement des oiseaux qui avaient élu domicile dans mes branches était ma compagnie quotidienne. Je me nourrissais de la lumière du soleil, absorbant chaque rayon comme une caresse bienfaitrice. Les saisons dansaient autour de moi, et chaque changement était une nouvelle aventure, du bourgeon printanier à la mélancolie de l'automne.
Mais peu à peu, une ombre sombre s'est abattue sur mon existence. Les humains, pourtant les gardiens de ce parc, se sont transformés en destructeurs. Ils sont venus avec des couteaux cruels, gravant des injures dans mon écorce robuste, laissant des cicatrices qui marqueront à jamais ma mémoire silencieuse. Les jours où la haine des hommes atteignait son paroxysme, j'étais le réceptacle de leurs vices. Les flots d'urine, les déchets des chiens errants, les étreintes maladroites d'ivrognes en détresse - tout cela me blessait profondément. Je me suis mis à détester cette humanité que j'avais un jour choyée de mon ombre bienveillante.
Pourtant, malgré la douleur de ces agressions constantes, je ne pouvais m'empêcher de continuer à respirer, à fournir inlassablement de l'oxygène à ceux qui me maltraitaient. Je m'en voulais pour cela, pour ma propre faiblesse et ma dépendance à leur égard.
Ainsi va la vie d'un chêne dans un monde d'ombres et de lumières, où la beauté de la nature se heurte à la cruauté de l'humanité. Mon existence est empreinte de douleur et de regrets, mais je persiste, espérant que, peut-être un jour, l'homme comprendra la valeur de la nature qui l'entoure et changera son chemin, apaisant ainsi le tumulte dans mon cœur de chêne solitaire.
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