Hannebelle et Falguière
Guidomex et Vallia marchaient au gré de la direction pointée par le rarigix. L’inquiétude du retour n’effleurait aucunement leur esprit, ils n’auraient qu’à suivre l’inverse de l’aiguille pour rentrer. Mais cette solution présupposait que rien ne vint perturber leur quête.
« Une idée de la manière de procéder pour nos recherches? demanda Vallia en plissant les yeux devant l’océan blanc.
— Aucune, mise à part suivre le rarigix.
— Alors on va continuer à errer comme ça ?
— Tu as une autre idée ?
— Non mais. commença Vallia en baissant son regard inquiet.
— Tu fais ton Ashron la non ? Tu es en train de t’en vouloir parce que nous avons perdu Hellie et que nous avançons au-devant de sérieux ennuis.
— Bon, ça va. » répondit Vallia, agacée.
D’un rire appuyé, Guidomex tenta de détendre l’atmosphère pesante de leur situation. Car depuis leur arrivé, Hellie était introuvable et leur recherche risquait de les perdre dans un désert uniformément blanc et vide, dont seul un lointain et épais nuage brisait l’horizon séparant le sol maculé et le ciel où trônaient quatre grands Solars.
« Nous devrions peut-être rebrousser chemin et revenir au village ? demanda Vallia après une heure de pénible et chaude marche.
—Tu as raison. Et ce nuage qui s’approche semble gigantesque. Je ne suis pas sûr que l’on puisse le supporter à découvert.» répondit Guidomex en scrutant l’amas de particules qui grossissait à vue d’œil.
D’un pas décidé, tous deux firent demi-tour pour revenir à leur point de départ. Mais le maelstrom ne sembla pas vouloir les laisser s’échapper et rapidement, des bourrasques de vent caressèrent leur visage. Ses caresses, au début douces et agréables, devinrent lentement gifles et griffures. Leurs yeux, d’abord plissés pour éviter d’être submergés par le sable, durent ensuite s’abriter derrière leurs mains, puis leurs habits pour se protéger.
Le combat qu’ils menèrent face au maelstrom durant encore de longues minutes, avant que la visibilité ne fussent tellement réduite qu’il ne percevaient plus rien devant eux. La force du vent provoqué par la tempête s’abattant sur eux freinait leur avancé, et le sable commença à s’infiltrer dans leurs vêtements et leurs yeux.
« Je commence vraiment à fatiguer. prévint Vallia.
— Tient bon, nous devrions atteindre le village dans peu de temps en gardant la cadence. »
Les paroles de Guidomex peinèrent à masquer son inquiétude, le village étant encore loin. Mais que pouvait-il dire d’autre ? Et comment aurait-il pu envisager qu’une simple tempête allez peut être avoir raison d’eux? Après tant de choses surmonté ensembles.
Soudain, des bruits d’étouffement parvinrent aux oreilles de l’Eraien. Vallia commençait à suffoquer et sa respiration se saccada à mesure que les particules s’infiltraient, poussées par la violence du vent. Ses bourrasques, fortes et appuyées, se firent alors de plus en plus violentes. Au-dessus d’eux se trouvait le plus fort de la tempête et ses halos de poussières faits de sable et de gravats, allaient les engloutir pour ne plus laisser tracer de leur passage.
D’un geste désespéré, Vallia rassembla ses forces pour lancer Aurora. Le halo de lumière contra ceux de sables mais ses forces la quittant, et sa pratique n’étant plus ce qu’elle était, la protection ne put être suffisamment efficace.
« Vient contre moi ! » s’écria Guidomex.
Immédiatement, Vallia se blottit dans les bras de l’Eraien, qui tenta tant bien que mal de la protéger des bourrasques. Soudain, un bruit cristallin se fit entendre et une gigantesque barrière de glace se matérialisa tout autour d’eux pour séparer le vent violent de leur corps meurtri. Plus aucunes particules ne leur fouettaient le visage et les deux compagnons purent à nouveau ouvrir les yeux.
A la vue de la protection bleue azure, un étau vint compresser le cœur de Vallia. Cette hud de glace ne pouvait être que celle d’Ashron. Ses yeux de nouveau voyant scrutèrent les alentours, emplis d’un espoir retrouvé, mais aucune trace de lui. Seules trois silhouettes, deux grandes et une de taille normale, se dessinèrent devant elle.
« Hellie ! Enfin nous te trouvons ! s’écria Guidomex en reconnaissant leur amie.
— Je vous ai cherchés partout ! lui répondit-elle.
— Mais que fais-tu ici ?
— Ces deux personnes qui voyageaient vers un village près d’ici m’ont retrouvé perdues dans ce désert blanc. Et comme vous, nous avons été pris dans cette tempête et mes nouveaux compagnons ont fait un abri de glace pour nous protéger. Nous avons attendu que celle-ci passe et je vous ai vu.
— Merci, sans toi, on était finit.
— Et vous alors ? »
Guidomex conta le récit de leur arrivé sur cette nouvelle planète. A sa fin, Hellie s’approcha de Vallia.
« Tu vas bien ? demanda-t-elle.
— Ca va.
— Qu’est-ce qu’il y a ? interrogea Guidomex qui remarqua sa mine grave.
— Rien. » répondit-elle en le fuyant du regard.
— Je me nomme Hannebelle. coupa une des deux silhouettes.
— Et moi, Falguière. ajouta la seconde.
— Je suis Guidomex et voici Vallia.
— La tempête semble se calmer. Nous allons pouvoir nous remettre en route ! » conclut Hellie en balayant du regard les halos venteux s’éloignant.
Dans un bruit cristallin évoquant à Vallia des souvenirs perdus, le mur de glace se disloqua et laissa le groupe nouvellement formé retourner au village. La route du retour fut ponctuée de questions et réponses entre Guidomex et Hellie, et Hannebelle et Falguière.
« Alors, vous venez d’où ? demanda Falguière.
— De très loin. répondit Hellie
— Et ça se situe où ce « très loin » ?
— C’est un peu compliqué. esquiva Guidomex qui ne voulait pas s’étendre sur le sujet.
— Viendriez-vous d’Emerala ? demanda Hannebelle en écarquillant les yeux.
— Qu’est-ce qui vous fait dire ça ? rétorqua Guidomex.
— Vos oreilles rondes et petites. Et vous êtes très petit pour des Raeiens.
— Raeien ?
— Oui, les habitants de Rae, notre planète. Mais comment pouvez-vous ne pas savoir ça ? Vous êtes vraiment bizarre.
— Nous avons fait un long voyage avant d’arriver ici et nous nous sommes perdus. expliqua Guidomex en espérant les convaincre.
— Mais que venez-vous faire ici ? Les Emeraliens n’ont pas pour habitude de s’aventurer en dehors de leur terre.
— Merci pour tout. Vous m’avez empêché d’errer pendant des jours dans ce désert. remercia Hellie en stoppant sa marche devant l’entrée du village, tout en ignorant la dernière question posée.
— Ce fut un plaisir. Faites attention à vous. répondit Hannebelle en s’éloignant du groupe avec Falguière.
Tout en regardant leurs sauveurs s’enfoncer plus profondément dans le village, Hellie, Guidomex et Vallia restèrent à l’entrée.
« Que fait-on maintenant ? demanda Guidomex
— L’auberge ? repondit Hellie
— Bonne idée, je suis vraiment fatigué.»
D’une circonférence ronde et surmontée d’un toit plat, l’auberge trônait à l’entrée des lieux et semblait les attendre. Le pas de la porte franchit, l’intérieur se composait simplement d’un comptoir, d’un espace emplis de tables et chaises, et d’un escalier mal entretenu. L’ambiance chaleureuse qui régnait dans l’endroit étaient accentués par le jaune foncés des murs concaves et les tableaux accrochés en épousant parfaitement leur forme.
Hellie ne s’attarda pas à l’entrée et se dirigea vers le comptoir.
« Que voulez-vous? lança le Raeien installé derrière, sans laisser le temps à l’Eraienne de dire un mot.
— Deux chambres s’il vous plait. demanda Hellie sans prêter attention à son attitude.
— Deux-cents gals.
— Gals ?
— Oui, gals. Deux cents.
— Nous n’avons pas de gals sur nous.
— Et vous comptez dormir ici sans échanger?
— C’est bon, c’est pour moi ! » coupa Hasrabel qui venait d’entrer.
— Hasrabel ? Que fais-tu ici ? demanda Guidomex en se tournant vers lui.
— Je ne suis jamais parti en fait. Et je vois que vous vous en êtes sortis et avez retrouvé votre amie ?
— Et tu es? demanda Hellie.
— Hasrabel, pour te servir belle créature.
— Et bien, je ne vois pas de raison de refuser une telle offre. » conclut Hellie, flattée par le compliment.
D’un geste ferme, Hasrabel plaqua plusieurs pièces métalliques et ovales sur le comptoir, et échangea pour les chambres des trois compagnons. Puis, sans dire un mot, tous montèrent à l’étage pour en prendre possession.
« Belles créatures, ma chambre est au fond à droite si vous êtes tentées. » proposa Hasrabel aux deux Eraiennes, un sourire charmeur ornant son visage gracieux.
D’un rouge écarlate, les joues d’Hellie se mirent à picoter à l’invitation du Raeien. Vallia quant à elle ne releva pas sa réflexion et continua son chemin.
« Elles ne peuvent pas. Nous devons parler. répondit sèchement Guidomex.
— Dommage pour vous. » rétorqua Hasrabel en souriant.
Après un geste de salutation, le Raeien prit le chemin de sa chambre et laissa le groupe seul dans le couloir sombre et calme. Puis, chacun se dirigea vers la sienne pour profiter d’un premier repos en ces lieux étranges. Guidomex s’assit sur le grand lit et commença à réfléchir à leurs prochaines actions. Vallia se précipita dans la salle d’eau pour vomir le peu qu’elle avait mangé avant de quitter Era. Et Hellie s’allongea délicatement sur la literie confortable et soyeuse, pour dormir un peu et repenser à ce sourire charmeur qui lui faisait tant d’effet.
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