La mort n'est rien
Lorsque j’ai débuté mon travail auprès des personnes sans abri,
Je ne savais pas trop dans quoi je m’engageais
Chaque jour a été rempli de la découverte de leurs parcours de vie
Face à leur force et à leur résilience, je ne pouvais que les admirer
Le plus difficile dans cette expérience, c’est d’affronter la mort
Elle est présente au quotidien, jamais très loin, on pourrait s’y habituer
Leur vie ne tient souvent qu’à un fil, la mort fait partie du décor
Et pourtant, on ne devrait pas l’accepter, il faudrait se révolter
Bruno, c’est la première personne qui m’en a parlé
Il se savait malade, il n’avait plus aucun espoir
Pourquoi se révolter quand on se sait condamné ?
Quand le diagnostic est posé, pourquoi arrêter de boire ?
Il m'a évoqué son décès avec ses mots, il était résigné
Quand il nous a quittés, je l’avoue, j’ai pleuré
Et pourtant, Bruno, avant son départ, m’avait tout expliqué
Et ce qu’il m’a dit, en moi, je l’ai toujours gardé
Il m’a dit merci pour le travail effectué
Il m’a expliqué que notre accompagnement l’avait sauvé
Qu’il terminait le chemin de sa vie, non pas seul, mais accompagné
Que cela n’avait pas de prix, qu’il avait retrouvé sa liberté
Il a donné du sens à mon travail au quotidien
Il m’a expliqué qu’il avait apprécié notre respect à son égard
Il m’a fait comprendre que chaque jour, on peut faire du bien
Et que pour ça il suffit de changer son regard
Bruno avait pu reprendre son destin en mains
Il a fait avec moi une partie de son chemin
Jamais je n’oublierai cet entretien
Ni ses bagues sur ses mains
Son témoignage me permet de continuer au quotidien
Pour faire revivre et permettre de survivre à ceux qui n'ont plus rien
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