— Vous paierez pour votre imposture, comte de la Tour.

— Comment Edgar ? s'exclame Geoffroy étonné, manquant de renverser sa coupe de champagne. De quoi parlez-vous ?

Le majordome s'approche de lui.

— Monsieur, je suis à votre service depuis bien longtemps. Vous déléguez toutes les tâches, y compris celle d'écrire. Je vous trouve des idées, corrige vos fautes, discute avec les autres auteurs du site, envoie des messages privés, bref en un sens je suis « Jeff le conteur ».

— Ne dites pas n'importe quoi ! s'emporte Geoffroy. Il ne peut y avoir qu'une seule personne sous ce pseudonyme, et c'est moi !

— Détrompez-vous monsieur.

Edgar se tourne vers l'assistance.

— Dites-moi, vous tous. Est-ce que l'un d'entre vous s'est aperçu que nous étions deux personnes différentes dans nos discussions sur Scribay ?

Tous se regardent et secouent la tête sans dire un mot.

— Vous voyez, on ne peut jamais savoir qui se cache derrière un pseudonyme, il peut très bien être utilisé par plusieurs personnes. Votre œuvre est la mienne. Et vous, Geoffroy de la Tour, êtes le protagoniste de mon histoire et non l'écrivain.

Après un instant de silence, Audrey s'écrie tout à coup :

— Ça veut dire que vous vous êtes servi de moi Edgar ?

Il se tourne vers elle.

— Miss Audrey, grâce à vous j'ai passé la plus belle nuit de ma vie, et pour cela je vous en remercie. Vous êtes une femme hors du commun avec une imagination débordante, je n'oublierai jamais. J'ai été ravi de faire connaissance avec vous tous, vous êtes incroyables, vous êtes les auteurs les plus talentueux que j'ai rencontré. Mais nous ne pouvons pas nous quitter comme ça. Il reste une dernière petite chose. Certains d'entre vous n'ont pas eu la joie de goûter à mon délicieux breuvage, nous allons y remédier de suite.

Geoffroy regarde le verre qu'il tient à la main, incrédule. Lola se tourne vers François l'air désespéré.

— Je crois qu'il parle de nous, je t'avais dit qu'ils étaient tous bizarres.

Il acquiesce d'un signe de tête, encore moins rassuré qu'elle. Audrey, Lola et François sont maintenant encerclés par les autres et ne peuvent sortir de la dépendance.

— Eh oui, conclue Edgar. Vous êtes les personnages principaux de mon œuvre, et je suis l'instigateur de ce meurtre su Scribay !

***

Un tonnerre d'applaudissement retentit dans l'auditoire.

— Bravo Edgar ! B-r-a-v-o ! J'ai adoré ! Mais je ne savais pas que vous écriviez.

— C'est une de mes passions depuis longtemps, mais je n'avais jamais osé faire lire un de mes écrits à qui que ce soit.

— C'est très bien, vous devriez continuer. Il y a quelques petites incohérences mais rien de très grave. En tout cas, cette petite histoire était vraiment divertissante. Bon, je ne possède pas un manoir sur une île déserte et n'ai pas la somme de dix-mille euros à vous offrir ; je peux juste vous désigner, je pense à l'unanimité, grand gagnant de ce concours et la publication de votre nouvelle dans le numéro du mois prochain. Félicitations Edgar !