Depuis une semaine, Steve gardait espoir. Le cadavre de sa bien-aimée n’avait pas été retrouvé. Peut-être qu’elle était en vie. Peut-être qu’elle allait revenir ?

 La psychologue l’avait mis en garde, lui avait expliqué que l’absence de corps pouvait favoriser le déni de la mort, puis à plusieurs reprises, elle avait déclaré :

— Votre compagne est morte.

 Au fond de lui, il le savait : Claire avait été dévorée.

 En entrant dans sa salle de bain, il se déshabilla et fila sous la douche. L’eau chaude qui d’habitude le réconfortait, l’apaisait ne lui fit aucun effet. Il imaginait Claire en morceaux en train de se dissoudre dans l’intestin d’un canard géant.

 Au bout de longues minute une question le tira de sa torpeur : pourquoi avait-il été épargné ?

 Après être sorti de la douche, Steve empoigna sa serviette et s’essuya énergiquement avec. En frottant l’horrible excès de poils sur son torse, il se rappela de son adolescence.

 D’un coup, il dégaina la tondeuse électrique avec l’envie de supprimer cette toison qui cachait ses pectoraux. En quelques secondes, Steve en fut débarrassé et il put contempler cette tache de naissance qu’il avait oublié. Elle avait une forme de canard. Il la caressa lentement, puis il frissonna face l’évidence. S’il était encore en vie, c’était à cause de cette marque.

 Le jeune homme enfila un boxer. D’un pas nonchalant, il se dirigea dans le salon, puis il se laissa choir sur le canapé avant d’allumer la télévision. D’une voix emplie de gravité, un journaliste annonça un discours imminent du président de la république. En réponse aux multiples attaques de canards géants, il était contraint de réagir. Directement concerné, Steve augmenta le volume.

« Chers français, chères française, je partage votre douleur. Je pense aux victimes, et à leur famille.

Ce terrorisme sauvage doit cesser. Chacun d’entre vous doit pouvoir se déplacer sans crainte d’être dévoré par un canard.

Dès demain, dans toutes les grandes villes de France, des militaires seront déployés.

Dans les villages, dans les hameaux, j’invite les chasseurs à prendre les armes pour protéger leurs concitoyens.

J’invite aussi, les experts en biologie, en chimie à Paris. Venez vous joindre aux équipes déjà présentes. Ensemble, en unissant nos compétences, nous trouverons rapidement une solution pour éradiquer cette menace inédite.

Ne succombez pas à la peur. La France est forte, la France résistera, la France vaincra. »