premiers goûters
J’ai vite découvert les biscuits et autres friandises.
Ma mère mangeait beaucoup ce qu’elle appelait, de façon pudique et honteuse, « du sucré ». Douceur aux amandes, pistache ou pâte feuilletée, chocolat fondant au goût lacté et bonbons acidulés.
Mon demi-frère est né et nous avons déménagé une fois de plus, dans un petit village d’Ardèche.
Je commençais à présent ma dernière année de maternelle. Je portais des lunettes, et mon corps avait changé : j’avais pris quelques rondeurs. Ma mère compensait ses orgies de confiseries par des repas équilibrés : épinards et poisson, haricots, brocolis : j’ai très tôt découvert et appris à aimer les légumes.
Notre maison se trouvait à trois cents mètres de l’école. C’était une classe unique. Nous étions deux en maternelle : je me retrouvais au fond, avec un petit garçon qui ne parlait pas encore. Nous jouions aux Lego ou sous les tables, contre le radiateur.
Pendant ce temps là, la maîtresse faisait cours aux différents élèves : la lecture pour les deux écoliers du CP, les mathématiques pour les CE1-CE2, l’histoire pour les CM1-CM2. J’étais la plus jeune : pendant la récréation, nous nous aventurions dans la fontaine du village. Les filles m’entouraient, j’étais la chouchoute, le bébé que l’on protégeait. Cette sensation de sécurité et d’amour, réconfortante, je ne l’ai jamais oubliée.
Le soir, je rentrais seule. Je me remémore ce qui me paraissait être à l’époque, du haut de ma petite taille, une colline à monter pour atteindre la maison. Une grande cour bordait le bâtiment. Marc avait un chien : il ne m’appréciait pas. Il me mordait assez souvent. Ma mère prenait peur et je la rassurais.
C’est étrange, aujourd’hui tout cela me semble irréel, de nos jours un enfant est protégé, surprotégé entend-on parfois, alors ces instants sont comme faux, mensongers, remplis de honte aussi. Je me taisais, j’aidais maman : elle était fragile, mal.
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