Chapitre 2 - Vendredi 13 mars
Je participe à l’hystérie générale dans les rayons du supermarché. Je remplis mon caddie, mais doucement, à mon rythme. Il y en a pour une semaine au lieu des trois jours habituels. Juste de quoi rester à la maison avec cinq bouches à nourrir. Des pâtes et du riz, c’est le festin de la fin du monde. Les allées sont encombrées par la peur, cependant on arrive à se frayer un chemin. Des retraités, des mères de famille et quelques couples attrapent des paquets à la volée. Il ne manque que les tongs pour se croire en été. Pas de promo ou de paëlla géante, mais le ciel bleu nous encourage à acheter.
Toutes les caisses sont ouvertes. C’est la première fois que je vois ça. Le grand ballet des tapis roulants s’en donne à cœur joie. Les articles tournent sur eux-mêmes sur un air de java.
Le fromage râpé se colle aux yaourts, le lait se frotte au PQ. Chacun fredonne sa chanson, seule la caissière soupire. Le spectacle n’a pas l’air de lui plaire. Dommage, elle est aux premières loges.
Je quitte ce théâtre au bras de mon caddie, un brin nostalgique. Quelques pas de danses jusqu’à la voiture, et je charge mes ballerines dans le coffre.
Direction la pharmacie. Là aussi la peur a posé ses valises, même si l'ambiance est plus feutrée. Les pas sont plus lents. On fait du surplace, on tourne doucement. C’est l’heure du slow. J’embrasserais bien la pharmacienne, mais elle se tient trop loin de la caisse. Un mètre de sécurité. Elle ne peut emballer que mon paquet sans solution hydro-alcoolique. Rupture de stock comme l’amour. Je sors et c’est toujours l’été.
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