Chapitre 3 : Les autres

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Hélène était à mes yeux la plus chanceuse des femmes. Sans qu'elle n'eût à provoquer la mort, cette dernière venait la chercher sans poser de question. Une nouvelle fois, j'allais la perdre ainsi que cet espoir qui, chaque instant de ma vie m'animait : celui de la revoir un jour. Allongé sur le sable, je m'étais alors fait une promesse : Si elle partait, je partirais avec elle. Je ne la laisserai pas m'abandonner une fois encore. Les médecins ne jaugeaient que difficilement le temps qui lui restait à vivre mais je savais que désormais, je serai à ces côtés. Comme un ange, elle ne m'avait jamais vraiment quittée et le ciel désirait nos retrouvailles pour qu'elle vienne me dire au revoir.

Cette nuit avait ressemblé à toutes les autres nuits entre copains. Nous l'avions passé à discuter, en regardant les étoiles. Jamais nous n'avions autant ri et pleuré à la fois. Je me souvenais petit à petit combien je l'aimais et combien m'avaient manqué ces liens d'amitié capable de nous transporter jusqu'au bout du monde. Mon cœur s'attendrissait. Hélène me guérissait de ma maladie en même temps qu'elle me parlait de la sienne.

Le soleil se levait doucement sur nos deux corps fatigués par la longue nuit et il fallait à tout prix que je rentre, car si mes parents voyaient ma couchette vide, ils risqueraient de se faire un sang d'encre.

Hélène se réveillait

  • Hely ?
  • Ça faisait longtemps qu'on ne m'avait pas appelé comme ça, me répondit-elle
  • Tu fais quelque chose dans les 10 prochains jours ?
  • Pourquoi me demandes-tu ça ?

Je lui offrit ma main afin de l'aider à se relever.

  • Viens avec moi.
  • On va où ?
  • Tu verra. Il faut juste que je passe par chez moi avant.

C'était mon rôle de digne fils que de prévenir mes parents de la raison de mon absence prochaine. À 6h du matin, ceux-ci dormait encore mais trouverait sur le plan de travail de la cuisine un petit papier rédigé par mes soins avec les mots suivant "Je pars. On se revoit vite. Ne vous inquiétez pas."

Précipitamment, je remplis un sac a dos de quelques bricoles pour survivre, et sortis. Hélène m'attendais. De nouveau, elle riait. Je suivais alors le rythme. Nous étions heureux. Tout deux savions que nous allions faire a deux ce que, seul, nous n'avons jamais eu le courage de faire : Fuir.

La gare ne se trouvait qu'à quelques kilomètres qu'elle et moi parcourions avec une certaine aisance.

  • Où m'emmène-tu ?

Je refusais toujours de répondre.

Le train roula quelques heures et la destination de ce dernier fût annoncé. "Toulouse, 5 min d'arrêt" hurlait le contrôleur. À l'arrivé, nous traversions la gare pour monter dans l'autocar en direction de la plage de la vigie.

En descendant, une main galante se tendis vers la valise d'Hélène.

  • Attendez mademoiselle, je vais vous aider.
  • Non, non, ne vous inquiétez pas je....Thomas ?
  • Salut Hélène, répondit Thomas, avec un grand sourire.

De tout son cœur, Hélène le serra dans ces bras.

Madeleine et Henri étaient là aussi. Au grand complet, la bande s'était réunie. Des années durant je n'avais osé proposer quoi que ce soit et voilà que mes retrouvailles avec Hélène ne m'avait pas fait hésiter un seul instant sur l'idée merveilleuse de nous réunir tout les 5. D'un simple SMS pendant qu'Hélène dormait, je fis sans doute la chose la plus importante de toute ma vie. Elle m'avait guérie de cette soif de solitude, de cette aigreur prématurée.

Le bonheur que faisais éclore nos retrouvailles n'avait aucun pareil.

  • Allez, allons-y dis-je.

Nous arrivames un port. Le soleil parvenait tout juste à son Zenith et le vent était suffisament doux pour être qualifié d'agréable. Le bateau flottait sur les quelques vagues de juillet. C'était un petit voilier, suffisant pour mettre en œuvre notre projet d'évasion. Dans un sentiments d'excitation, Thomas, à qui l'ont devait ce bateau sans savoir comment, ce qui n'était sans doute pas plus mal, Henri et moi, mettions en place la voile pendant que les filles discutaient sur le pont avant d'enfin parvenir à larguer les amarres. La liesse rendait intense chacun de nos mots. C'était parti. L'aventure faisait son grand retour.

De son chef, Henri mit sur une enceinte une partie de la discographie de Brel, dont le premier titre fût "Amsterdam" . Cette chanson était celle de notre adolescence. Une euphorie eût raison de nos échanges et nous poussa à la chanter en choeur. Quelle joie que de pouvoir renouer avec ce si doux sentiment : Celui d'avoir l'air con mais d'en avoir rien à foutre. Il n'existe plus belle demonstration de l'amitié que celle-ci.

Les garçons riaient, Madeleine chantait et surtout, Hélène souriait. J'étais le seul au courant de sa tumeur. Une fois la côte lointaine, je pris la barre de direction avec Hélène, pendant que les autres tentaient en vain de pêcher quelques poissons.

- C'est beau tu ne trouves pas ? dis-je

- Oh oui. Tu es toujours aussi fou.

- Pourquoi ?

- Tu as quand même décidé d'une excurtion en mer sur un coup de tête.

- J'en avais envie.

- D'ailleurs, tu n'as pas de nouvelle de tes parents ?

- J'ai pas de réseau mais bon, ils me connaissent, je ne m'inquiéte pas.

- T'avoir comme fils doit être épuisant, s'amuse t-elle. C'est ça que j'aime avec toi. Tu te fout de l'imprévu. Rien ne semble grave, tout parait si simple. Et le pire, c'est que tu parviens à nous embarquer dans tes projets de dingues.

- Si je n'avais personnes à embarquer, je n'irai pas moi même. Quand je te dis que j'ai besoin de vous.

- ça te fait pas trop flipper ?

- Non, j'ai déjà un peu navigué et Thomas m'a dit que nous avions des provisions pour 13 jours. Tant mieux parceque si notre vie dépendait de leurs qualités de pêcheurs, nous serions déjà tous mort.

Hélène explosa de rire. Une voix lointaine réagit.

- Eh, on vous entends les deux.

On charriait, Guillaume, répondis-je avant de rire à mon tour.

- Tu compte leur en parler ? dis-je d'une voix plus discrète.

- Oui, mais pas maintenant. J'ai envie de profiter.

L'arrivée de Thomas vers la cabine interrompa la conversation.

- Voilà nos chasseurs, ricanna Hélène. Vous vous en sortez ?

- On s'en sort tellement bien que je vais chercher des boites de conserves rétorqua Thomas. On verra demain pour les poissons, mais c'est pas gagné.

Nous laissâmes paraitre un rire complice et taquin.

Les vagues claquaient contre la coque et l'air emportait dans sa course les cheveux des filles, les garçons semblait heureux. Quant à moi, je renouais petit à petit avec le sens du mot joie. Quelque jours auront suffit à me faire oublier mon avenir dépourvu de projet et ce foutu cancer qu'est la solitude. Je n'avais désormais plus que 3 obsessions en tête.

Tout d'abord, j'écrirai. Dans quel but, pour quel raison, je n'en savais rien. Les passions qu'avait fait resurgir ces vacances m'avait donné envie de crier tout un tas de choses au monde, que seule la plume me donnera de dire. Alors oui, à notre retour, j'écrirai.

Ma deuxieme obsession sera, naturellement, de repartir avec eux, car, disait Zola " Rien ne developpe l'intelligence comme les voyages". Je comprenais enfin pourquoi j'étais malheureux : j'avais besoin de fuir.

Enfin, il me fallait être au côté d'Hélène. Ma vie n'avait plus d'importance depuis nos retrouvailles. Seule la sienne comptait. Son sourire face à l'épreuve était le temoignage d'un si grand courage face à la vie. Elle m'avait fait comprendre que les profs, les fleurs, le ciel, les impots, l'alcool, le loyers, les parents n'étaient plus que des membres d'un vulgaire décors lorsque l'ont refusait de les voirs s'imposer à nous. On choisit son bonheur. J'avais choisit le miens. Il s'appelait Hélène, les autres, et au fond, bien qu'il soit sans doutes le plus néfaste, je m'empresserai d'entacher cette si belle liste en y ajoutant le dernier composant : Moi.

A suivre

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