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Un cauchemar mielleux et écœurant de douceur. Les gens qui se penchent au-dessus du berceau et qui s’extasient devant lui. Le monde s’est mis à tourner autour de lui. Combien pèse-t-il ? Il fait ses nuits ? Et ses dents ? Lui, lui, lui, toujours lui, et cette furieuse envie de le laisser là entre les mains de ces bonnes femmes dont la vie tourne autour de leur gamin.
Il sourit à tout le monde sauf à moi comme s’il savait qu’il me ronge le cœur et me rogne les ailes. Comme s’il savait qu’entre nous ça n’allait pas être possible, que ça n'avait rien d'une évidence. Pourtant j’essaie. Je le berce, lui raconte des histoires, lui fait écouter du rock…
Nous avons revendu la moto et pris un crédit pour nous offrir une voiture familiale. Nous discutons de notre avenir quand le petit dort. Nos visions sont tellement différentes que je me demande ce qui nous a rapprochés un jour.
J’aurais pu accepter ce petit appartement et cette voiture s’il m’avait serrée fort contre lui. J’aurais presque pu me plier à la normalité s’il m’avait encore regardée. J’aurais pu… s’il m’avait fait l’amour en oubliant le petit ou ses désirs de procréer.
Je comprends mieux pourquoi ma mère m’a toujours détestée. Ça doit être dans nos gènes, une incompatibilité du cœur mère - progéniture. Il a vu que notre enfant me mettait les nerfs à vif et que la jalousie m’étouffait. Il m’a secouée en me disant de grandir et de cesser de n’aimer que moi ! Que moi ? Non que lui. J’ai voulu qu’il souffre autant que je souffrais à cause de cet enfant.
D’où je suis, je vois notre enfant qui gazouille dans les bras de sa nouvelle famille. La femme qui le berce contre son sein l’aimera tellement plus fort que moi. J’en arrive presque à me déculpabiliser. Si seulement je ne le voyais pas lui, traînant de villes en villes comme une âme en peine. Le désespoir lui creuse le visage, je voudrais pouvoir sentir une fois encore son torse sous mes mains et lui prodiguer ma chaleur. Prendre soin de lui comme je n’ai jamais su le faire. Lui rendre le sourire. Si seulement j’avais pu aimer ce bout de nous. Si j’avais pu supporter que la passion s’essouffle pour devenir un amour tendre, je n’aurais pas vendu notre enfant pour ma liberté.
Vendu.
Vendu mon enfant.
Vendu mon âme au diable.
Vendu mon cœur.
Quand il a compris ce que j’avais fait, il est devenu comme fou. Il y avait autant de violence dans ses yeux que dans ses gestes. A chaque coup de couteaux, une larme se formait dans ses yeux. M’assassiner le tuait. Son amour pour moi le déchirait, mais mon acte le révoltait Iil s’est surpris à me détester si fort… Tellement fort que ses mains se sont couvertes de mon sang.
Quand il a réalisé ce qu’il faisait il a quitté la chambre et m’a laissée là me vider de mon sang…
Et me voilà morte le regardant survivre. Je sais qu’il me rejoindra bientôt, il ne peut vivre sans moi. J’attendrais le temps qu’il faudra mais la mort me le rendra. A voir sa douleur, il ne devrait pas tarder à me rejoindre. Ce sera ma deuxième chance de l’aimer.
Lui et moi c’est comme une évidence. Lui sans moi, une aberration, je nous ai tués mais c’était la seule façon de le récupérer…
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