1/ Non, je n’ai pas l’esprit de Noël

Alexandra s’approche doucement du père Noël. Celui-ci tient dans ses bras un énorme cadeau bleu, entouré d’un ruban doré. Magnétisée par le présent, elle ne se trouve plus qu’à quelques centimètres pour l’attraper. Pourquoi cela ? Quelle clef mystique vient de la débloquer ? Elle qui refusait en principe de déballer le moindre paquet. Sa présence aurait-elle permis de lui transmettre cet esprit magique ? Confuse par le charisme de l’homme en rouge, elle décide de se laisser aller, de céder à sa proposition, consentir d’ouvrir son premier cadeau de Noël depuis tant d’années. Des souvenirs chaleureux de cette fête lui reviennent. Elle, enfant, en train de s’émerveiller devant le sapin, de hurler de joie en apercevant le verre de lait bu, de montrer fièrement à ses parents la carotte croquée pour le renne, de s’enthousiasmer en découvrant ses jouets.

Avant qu’elle puisse arracher l’emballage, son attention se porte vers le coin du salon. Elle remarque une silhouette à terre, dans la pénombre, mal cachée derrière un canapé. Comment ? La peur la gagne. Choquée, elle y distingue finalement, allongés sans vie, deux corps. Qu’est-ce donc ? Non. Du sang. Du sang partout qui coule. C’est… C’est… Papa ! Maman !

Alexandra se retrouve paralysée. Elle regarde le père Noël dans les yeux, qui sans crier garde, lui inflige un coup directement dans le ventre. Son visage joyeux s’est transformé en un air terrifiant. Le souffle coupé, elle n’a ni le temps de crier ni celui de s’enfuir. D’un geste vif, l’homme en rouge lui assène son poing en pleine figure. Un coup suffisant pour étourdir la jeune fille, chutant au sol. Enfin, elle va s’endormir, après tant de nuits sans sommeil. Allongée sur le tapis, sa vision s’obscurcit, faisant disparaître ses parents de son champ, eux dont la vie a été enlevée par l’être qu’elle déteste depuis tant d’années.

– Rudolph, tu peux sortir de ta cachette. Je l’ai crevée ! crie le faux père Noël.

– Putain, elle m’a fait peur la mioche ! répond un deuxième homme, sortant de derrière le canapé. Bien joué, mon gars, t’es un sacré acteur, dis donc. Cette petite conne t'a réellement pris pour le Papy Noël.

– Ouais, même moi, j’ai du mal à y croire que ça ait fonctionné. Bref, les parents sont zigouillés, la fille évanouie. On va pouvoir manger et dormir au chaud ce soir. Et départ aux aurores.

– Parfait ! J’espère que la tempête de neige ne perdura pas.

– Au pire, on trouvera une autre maison, demain.

– Et on fait quoi pour ces deux gosses ? On les bute ?

– Rudolph, voyons, c’est évident ! On n’est pas des monstres quand même, réplique-t-il en agrippant une corde. Ligotons la fille, et laissons le gamin découvrir le spectacle demain matin.

Joyeux Noël les enfants