La révélation

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Pierre fut auditionné par le commisaire Kervella au sujet de ce secret. Il avait donc un rapport avec leur voyage en Chine. Il n'avait pas du tout prévu qu'on le questionnât sur son secret. Il se retrouvait dans la même situation que son ami Gurvan. Qui plus est, les policiers avaient mis la main sur un morceau de conversation entre Gurvan et Pierre sur le bloc-notes. Il n'en menait pas large face aux questions du commissaire.


Il inventa une explication, à la hâte, pour détourner les soupçons. Il fit croire que Gurvan et lui avaient pris des photos dans le musée de la tombe du Roi des Yue du Sud alors que c'était interdit. C'était cela le secret. Le commissaire Kervella partit d'un grand éclat de rire, signe qu'il n'était pas très convaincu par cette explication. « Ce qui s'est passé à Canton en 2004, c'est notre secret à ne surtout pas révéler » avait griffonné Pierre, précisément, sur le petit rouleau.





- Quel est ce secret à ne surtout pas révéler ? Martelait le commissaire 





- Les photos interdites du tombeau du Roi, au musée de Canton, répétait Pierre.





- Qu'y avait-il de si secret sur ces photos ?





- La ...la momie du Roi de la dynastie, Zhao Mo, se souvint Pierre, creusant avec difficulté dans ses souvenirs.





- Et vous allez me faire croire que ces photos pour touristes constituent un secret indicible ? s'énerva le commissaire.





Mais Pierre n'en démordit pas, il résista à la pression et n'avoua pas le meurtre.





Ayant entendu tous les témoins, le commissaire décida de se rendre à Agen, dans le Lot-et-Garonne, en train, afin d' interroger la sœur et les parents de Gurvan. Il avait toujours de bonnes intuitions et pressentait qu'ils allaient lui en apprendre un peu plus sur le personnage : M. Gurvan semblait un peu spécial. Pourquoi, par exemple, était-il si indifférent à la mort du facteur alors qu'il disait l'apprécier ?


Le quartier de la gare de Quimper était en pleine rénovation. De grands panneaux annonçaient ce réaménagement. Des démolitions étaient en cours. Le projet était appelé « 765 avenue », allusion à la route départementale longeant la gare. Le commissaire se félicitait du fait que le trajet entre Quimper et Paris en TGV allait être raccourci de quarante minutes. Il acheta Ouest-France au point presse à l'entrée. Il avait tout de même plusieurs clés : les deux premiers crimes, il le sentait, avaient été perpétrés par Gurvan. L'absence d'alibi, l'arme du crime et le lieu où ils avaient été commis l'accusaient. Mais qui avait tué Gurvan ? Il n'y avait pas un, mais deux tueurs. Il fallait surtout, il en était certain, résoudre l'énigme autour du secret.


Peut-être que ses parents et sa sœur en sauraient davantage. Il n'était pas fâché de voir du pays, lui qui se sentait las, vivant une existence, en dehors de son métier, somme toute, monotone. Sa femme l'avait quitté le trouvant trop pusillanime et taiseux. Son chat, qui avait encore grossi, le réveillait à cinq heures tous les matins. Veronica, une de ses collaboratrices, ne l'aimait pas alors qu'il n'avait d'yeux que pour elle.


Il se rendit d'abord chez la sœur de Gurvan, Gaëlle, dans le quartier de l'hôtel de ville. Elle était très choquée par la mort de son frère. Ils s'envoyaient des e-mails de temps en temps, au moment des anniversaires ou de Noël mais elle vivait loin de lui et n'avait pas reçu de nouvelles récemment. Pour ce qui est du voyage en Chine de Gurvan, c'était devenu complètement tabou et elle ne se rappelait pas de grand-chose. Elle promit de réfléchir si des détails lui revenaient, susceptibles d'expliquer la mort de son frère.


Ce furent des parents éplorés qui accueillirent le commissaire Kervella. Ils habitaient dans une maison avec un grand jardin, près de l'aéroport d'Agen-la-Garenne. Le père de Gurvan était un passionné d'aviation. Ils n'étaient pas au courant pour le pigeonnier clandestin, mais quand le commissaire évoqua le secret, le père de Gurvan, en proie à l'émotion, finit par avouer : c'était son fils et son ami Pierre qui, lors de leur voyage en Chine, avaient rapporté un frelon asiatique à Agen. Ils avaient acheté un vase en porcelaine aux dessins multicolores pour l'offrir à la mère de Gurvan. Ils avaient vu l'insecte sortir du vase chinois, en soulevant le couvercle, et s'en étaient même amusés à l'époque.


L'hypothèse selon laquelle le frelon asiatique était arrivé dans un lot de poteries destinées à un pépiniériste du Lot et Garonne était fausse. Ce fléau qui menaçait désormais toute l'Europe relevait de leur seule responsabilité, ils s'étaient jurés tous les quatre de garder le secret depuis maintenant de longues années pour éviter l'opprobre sur eux et sur leur famille. Ils ne voulaient pas être montrés du doigt par tous les médias. Pierre fut mis devant le fait accompli, on étala les preuves. Le commissaire Kervella expliqua que Gurvan, trop confiant dans ses pigeons voyageurs avait dû faire une allusion trop claire au frelon asiatique venu d'Asie par leur biais en 2004 sur son message et que le facteur avait tout compris. Il l'avait payé de sa vie. Gurvan avait tué le facteur trop curieux et le voisin qui l'avait sans doute aperçu commettant son crime. Pierre avait tué son meilleur ami, se faisant passer pour le serial killer, pour éviter que le secret ne soit divulgué. Pierre finit par avouer. Il fut écroué à Rennes.


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