Je sors complètement claqué de ma semaine d’épreuves du bac, mon objectif m’obligeant à bosser jusqu’au dernier moment pour être sûr de l’atteindre, Charlène, de son côté, boucle ses partiels comme si elle venait de descendre un piste verte, tranquillement, sans avoir eu l’air de forcer. Il me reste deux jours pour me requinquer avant notre départ pour la capitale, et ce concert qui promet d’être fabuleux, nous avons prévu de rester quatre jours, de visiter le maximum de choses avant l’arrivée des touristes.

Le jeudi 21 juin, nous prenons le TGV en fin d'après-midi, et après trois heures de trajet nous débarquons Gare de Lyon comme deux paumés, puis direction l'hôtel Trianon Gare de Lyon, à quelques centaines de mètres de la gare, pratique pour les transports en commun, le repas est pris en amoureux dans la chambre, une nuit torride s’en suit...

Le lendemain, nous jouons aux touristes de base avec l'enchaînement Tour Eiffel, Champs de Mars, Arc de Triomphe, Champs Elysées avant de nous rendre au Stade de France pour le concert;

Il est dix huit heures lorsque nous arrivons sur place, le privilège des places debout sur la pelouse, mais en carré or, nous permettant de rentrer au dernier moment en profitant de la proximité de la scène.

Une fois arrivés à l'intérieur du stade, je prends une claque monumentale, je suis de la génération France 98, et me retrouver ici, sur cette pelouse, lieu de cet exploit, ce doublé de Zidane, c’est déjà quelque chose, mais si vous rajoutez en plus, tout ces fans, rassemblés ici pour acclamer ACDC, légende mondiale du hard-rock, c’est juste indescriptible. Je suis aux anges, même si nous détonnons un peu au milieu de cette foule pourtant hétéroclite, je sais qu’une fois les premières notes jouées, nous ne ferons plus qu’un.

- Mon bébé… Merci… C’est magnifique… Je…

- Attends, le concert n'a pas encore commencé…

- J’anticipe, je sais pas si j’aurai encore assez de voix à la fin… Si tu me vois partir dans un pogo… Retiens-moi, je t’en supplie.

- Non, je te pousse au milieu, ça te calmera…

- Comme tu veux…

- Je déconne, je te lacherais pas d’une semelle…

Bon je passe rapidement sur le concert, il me faudrait des heures pour tout décrire, je dirais simplement que The Offsprings, ça a été une tuerie totale, je passe deux heure de pur délire, à sauter comme un gamin.

Pendant la seconde partie, nous filons à la buvette nous restaurer, boire une bonne bière, et souffler un peu sous la fraîcheur relative des tribunes.

Lorsque nous retournons sur la pelouse, nous retrouvons sans problème un point de vue plutôt pas mal, légèrement sur la droite, à une dizaine de rangs de la scène, le fait que le nombre de places soit limité permet d’avoir une certaine tranquillité, de ne pas nous marcher dessus.

Dès les premières notes de Stiff Upper Lip, l’ambiance monte encore d’un cran, la voix de Brian Johnson déchire l'atmosphère, les solos d'Angus Young, dans son style si caractéristique nous emportent, le show se déroule autant sur scène que dans le public. Je vis un des plus beaux moments de ma vie pendant ce concert, je retrouve une joie sans mesure, je chante à m'en faire péter les cordes vocales, saute, danse comme jamais et Charlene semble impressionnée par l’énergie que je dépense à chaque seconde. You Shook Me All Night Long, Thunderstruck, Hells Bells, Highway to Hell, T.N.T., For Those About to Rock , resteront à jamais gravés dans ma mémoire et dans celle de mes cordes vocales.

C’est totalement aphone que je termine la soirée, essayant tant bien que mal de me faire comprendre dans le brouhaha du métro, ma libération arrive dans la chambre de l'hôtel, où le silence me permet enfin de me faire entendre de Charlène.

- Alors mon coeur, tu t’es régalé?

- C’était génial… Merci mon amour…

- Tu le mérites tellement… Tout cet acharnement pour remonter la pente depuis un an…

- Et toi?

- C’est pas trop mon truc à la base, mais je me suis éclatée aussi… En concert c'est autre chose...

- J’ai vu… Je suis content que t’ai aimé…

- Allé une bonne douche et dodo…

- Avec plaisir… Et une bonne cuillère de miel…

Le samedi, nous découvrons le Paris des premiers touristes, la ville grouille dans tous les sens, et nous continuons notre visite de la capitale, plutôt au ralenti, Panthéon, Jardin du Luxembourg, Notre Dame, Place de la Bastille, pour finir par le Cimetière du Père Lachaise, lieu de repos d’un grand nombre de personnalités comme Jim Morrison, Apollinaire, Champollion, Daudet, Oscar Wilde, Proust, Molière... La journée fut magnifique pour tous les deux, et c’est encore éreintés que nous regagnons notre hôtel pour une nuit de repos bien mérité.

Dimanche, il ne nous reste que le Louvre à visiter, puis un détour par le cimetière Montparnasse, pour nous rendre sur les sépultures d’autres grands noms comme le couple Sartre / De Beauvoir, Gainsbourg, Baudelaire, Reggiani, avant de prendre le train du retour.

- Merci ma puce… J’ai passé trois jours magnifiques…

- De rien, ça faisait longtemps que j’étais plus venue ici, je me souvenais pas que c’était aussi fatiguant.

- J’avais jamais foutu les pieds ici, faudra qu’on revienne, y’a tellement d’endroit à visiter encore… J’aurai aimé faire les Catacombes, la cité des sciences, le château de Vincennes, Les Invalides…

- On en a encore des tonnes à découvrir… Mais je suis contente de rentrer…

- Je t’aime ma puce, tu m’as offert quelque chose de magnifique, d’inoubliable.

- Tu l’as amplement mérité, t’as fait tellement d'efforts, tellement de progrès. Je suis si fière de toi…

- Merci…

Nous avons dormi tout au long du voyage retour, rêvant de ces trois magnifiques journées, de tous ces endroits découverts en si peu de temps, de ce merveilleux concert, blottis l’un contre l’autre.

De retour chez nous, je reprends mon poste au bar pour deux semaines encore, tandis que la miss se contente d’étudier quelques dossiers que lui a transmis Patrick, pour préparer son arrivée au centre pour l’été, de mon côté, j’irai bosser avec Gianni, dans un magasin de sport de Montgenèvre.

- Mister Lou!!! Enfin de retour!!! Alors c’était comment Paris?

- Salut Miss Thaïs. C’était génial… Ce concert de malades… On a visité Paris aussi…

- Quelle chance… J’en rêve de Paris…

- Et toi? Pas trop dur?

- Nickel… Clients sympas, patron sympa, boulot sympa… Merci mon Loulou.

- Tu reprends dans deux semaines de toute façon?

- Oui, pour l’été… Pendant que Mister Lou se repose à la montagne avec sa belle…

- Quoi? T’es jalouse?

- Un peu et tu le sais très bien...

- J’y vais pour bosser, Chou aussi…

- C’est pas le boulot qui me rend jalouse…

- Thaïs…

- Je sais, tu l’aimes, c’est la femme de ta vie, bla, bla, bla… Mais…

- Le baiser pour mon anniv’? On avait bu, je me suis un peu emporté, c’était juste pour te remonter le moral, rien de plus… Tu le sais très bien…

- Je te charrie… C’était pas un baiser en plus, juste un petit bisou de rien du tout, et même pas sur la bouche…

- Connasse…

- En plus, j’ai trouvé quelqu’un… Je te l’ai pas encore dit…

- Super… Je le connais?

- Peut-être… Beau-frère…

- Non!!! Jure-le!!!

- Je t’expliquerais… Là j’ai fini mon service, faut que je file… Bisous le Beauf’...

Je suis sur le cul, c’est vrai que physiquement il se ressemblent beaucoup, grands, blonds aux yeux bleus, assez minces, mais des caractères totalement opposés, mon frère, si introverti, encore plus timide que moi… Avec Thaïs, si exubérante, toujours en train de se faire remarquer… Le feu et la glace…

Cette nouvelle me réjouit au plus profond de moi, il sait ce que j’ai enduré, il connaît le chemin à parcourir, et même si Thaïs essaie de donner le change, je sais qu’elle souffre encore sous sa carapace et qu’elle a besoin de quelqu’un qui la comprends et qui peut l'aider.

Lorsque je rentre à l’appart pour annoncer la nouvelle à Charlène, elle semble ravie elle aussi.