La femme à la robe rouge (5)

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Jour 5 : 1h13

Peter regarda une dernière fois sa montre. L’heure approchait. Bientôt 1h15 sonnerait et avec lui la fin de son calvaire. Il ouvrit la porte de son appartement en grand et alla se coucher. Il ferma les yeux et attendit. Il n’eut pas longtemps à attendre.

Les pas.

Il arrive.

Peter savait désormais à quoi s’en tenir. L’homme à la hache. L’amoureux d’Élizabeth rendu fou par la haine marchait dans le couloir. Peter frissonna. Il entendait le raclement de la hache sur le sol. La peur prit de nouveau possession de lui quand il entendit les pas dans son salon. Et là il la sentit.

Elle est là.

Elle est près de moi.

Peter se força à ouvrir les yeux. La femme à la robe rouge était juste à côté de lui. Elle le regardait de toute sa haine. Et là Peter comprit que ce n’était pas lui qu’elle regardait mais le lit. Ce lit qui devait être situé à l’endroit même de son propre lit. Ce lit nuptial où elle avait connu la pire des horreurs. Ce lit responsable de son malheur. Son regard remonta pour s’ancrer dans celui de Peter. Et là il y a vu toute sa peine. La peine de cette femme si belle qui avait tout perdu. Elle qui était si douce et qu’on avait battue à mort. Peter osa un regard sur son ventre. On pouvait voir la tache de sang. Il comprit qu’il s’agissait de la marque du coup de hache. Soudain, la femme tourna son regard vers le salon. Elle avait entendu l’homme arriver. Peter tourna son regard lui aussi vers ce dernier. Il faisait encore plus peur que ce qu’on lui avait décrit. Il devait faire plus de deux mètres. Ses bras étaient plus larges que la tête de Peter. Une longue cicatrice barrait son visage, lui donnant un air mauvais, un air de haine pure. Mais ce qui frappa le plus Peter fut qu’il était recouvert de sang. Le sang de ses victimes. Il traînait sa hache derrière lui comme un fardeau trop lourd à porter. Il ne quittait pas la femme des yeux. Derrière lui le sol devenait rouge. Puis ce fut le tour des murs. Peter comprit enfin ce que la vieille dame avait voulu dire par « un massacre ». Il n’y avait pas un endroit de la pièce qui n’était pas recouvert de sang. Peter était terrifié. Il n’avait pas prévu ça. Il voulait juste faire se rencontrer ces deux êtres qui se cherchaient depuis si longtemps. Les deux êtres en question se regardèrent. L’homme arrêta de bouger. On pouvait voir la peur s’écrire sur son visage. Cela faisait 150 ans qu’il n’avait plus vu sa belle. Cette dernière porta la main à son ventre. Le sang coulait à flots désormais. Elle le regarda d’un air terrifié. Elle ne comprenait pas. Pourquoi lui avait-il fait du mal ? L’homme tomba à genoux et plongea ses mains dans le sang. Il avait tellement honte. Elle devait tellement lui en vouloir. Cette dernière s’approcha de lui et lui caressa la joue. Des larmes de sang coulèrent des yeux de la belle coulant sur le visage de la bête. Ils s’aimaient. Et ils se voyaient. Ils se retrouvaient. Ils s’embrassaient enfin. Peter soupira de contentement devant la scène qui se jouait sous ses yeux. Il n’était pas expert en fantômes mais n’était-ce pas le moment où on pouvait dire que leurs âmes iraient en paix maintenant ? D’un même mouvement les deux amants se retournèrent vers Peter. Ce dernier se sentit glacer au plus profond de ses os. L’homme se releva et attrapa sa hache. La haine était revenue dans son regard. Il leva la hache et la fracassa sur le lit. Peter eut juste le temps de se jeter à terre. L’homme continua à abattre sa hache sur le lit. Une fois celui-ci détruit il jeta son dévolu sur les murs. Il fallait détruire cette pièce qui avait été cause de tant de malheur. C’est à ce moment-là que Peter se décida à s’enfuir. Il en avait trop vu. Il se hâta vers le salon et là resta frappé de stupeur.

Ils étaient là.

Ils étaient tous là.

Toutes les personnes tuées par l’homme à la hache étaient là. Ils avaient les yeux rivés sur Peter. Derrière lui on entendait la bête enfoncer sa hache dans les murs. Elle n’avait pas remarqué les nouveaux venus. Peter se demanda s’il avait eu raison de faire se rencontrer ces deux-là. Un homme s’approcha de lui. Peter eut l’impression de se voir dans un miroir. Cet homme lui ressemblait étrangement. Il avait le même maintien, la même démarche. Une longue cicatrice s’étirait sur son coup. Alors Peter comprit. Cet homme qui lui ressemblait c’était le mari de la femme à la robe rouge. Tout cela était à cause de cet homme. Ce dernier regardait Peter avec un sourire narquois. Et alors il comprit en entendant les pas derrière lui. Peter se retourna juste à temps pour éviter la hache. La bête avait reconnu son rival en Peter. Il l’avait tué une fois et il était tout disposé à recommencer. Peter tomba à terre et essaya tant bien que mal de s’enfuir. La bête s’avançait vers lui de sa démarche lente. Il leva bien haut sa hache et s’apprêta à l’abattre. La femme à la robe rouge se tenait derrière lui. Ce n’était plus de la haine qui se reflétait sur leurs visages mais la soif de vengeance. Et l’homme abattit la hache.

- « Calmez-vous Monsieur Schubert. Tout va bien. Vous êtes en sécurité. »

Peter ouvrit les yeux. Il était dans la pièce blanche. Un homme en blouse blanche était penché sur lui. Ce dernier le regardait avec compassion. C’était la pièce de sa vision. La lumière l’aveuglait au-dessus de son lit. Il avait mal à la tête. Il voulut se protéger les yeux de la lumière trop vive mais il s’aperçut qu’il était attaché. D’une voix douce l’homme reprit la parole.

- « Monsieur Schubert, pouvez-vous me dire où nous sommes ?

- Je ne sais pas. Où est l’homme à la hache et où est la femme à la robe rouge ? Ils veulent me tuer. Ils veulent se venger. Aidez-moi ! AIDEZ-MOI !

Peter hurla ces derniers mots. Il voulait sortir. Il avait peur. L’homme à la hache avait essayé de le tuer. Il allait revenir et finir le travail. Il lui fallait fuir. L’homme à la blouse blanche soupira et reprit d’une voix lasse.

- « Nous sommes à l’asile Sainte-Anne. Il y a quelques jours votre ex-femme vous a trouvé dans votre appartement divaguant sur une hache et une mystérieuse femme. Personne n’a réussi à vous faire entendre raison alors on vous a confié à mes soins. Il n’y a pas d’homme à la hache ni de femme en robe rouge. Personne ne peut entrer ici alors calmez-vous. Je vais vous détacher. Voilà. Doucement. Maintenant je vais vous laisser quelques minutes. Une infirmière va vous porter votre repas. Je reviendrais après. Tout ira bien Monsieur Schubert. Vous ne risquez rien ici. »

Le médecin se retira laissant Peter seul. Ce dernier s’assit sur son lit et prit sa tête entre ses mains. Avait-il vraiment rêvé tout ça ? Était-il fou ? Sûrement. Il soupira laissant la peur s’enfuir loin de lui. Il se redressa et ouvrit les yeux.

La dernière chose qu’il vit fut la bête levant sa hache. Dans un dernier élan de lucidité il entendit la femme à la robe rouge qui riait tandis que la hache s’abattait sur son crâne.

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