19h30. Quand il passe la porte de chez lui, il ne sait plus qui il est, d’où il vient, ni si cette journée a réellement eu lieu.

Il doit avoir toutes les odeurs sur lui, même si dans le train qui le ramenait chez lui, il a tenté une toilette intégrale, il se sent sale, et salit.

Sabine est là. Elle a mis sa robe bleue. Elle sait qu’il l’adore. Elle lui saute au cou, heureuse, amoureuse. Grégoire soupire, l’embrasse. Journée compliquée, tentative d’esquive mais Sabine est surexcitée.

- Chéri…désolée pour tout à l’heure mais…viens.

Elle l’entraine près de la buanderie. Grégoire esquisse un sourire. Comment a-t-il pu penser une seconde que Fanny était là-dedans. Mieux vaut en rire.
Sabine lui presse la main, et tout en lui disant qu’elle l’aime, ouvre la porte de la pièce qui a tant posé de mystères quelques heures plus tôt.
Un énorme téléviseur accompagné d’enceintes géantes trônent au milieu de la pièce.

- Joyeux anniversaire mon amour.

Joy… ? complètement abasourdi, Grégoire manque de perdre connaissance. Son anniversaire…oui…évidemment. Sa femme s’est débrouillée pour cacher un home cinéma, elle est pétillante, pleine de vie, elle veut le surprendre, lui prouver son amour. Il doit réagir, il le doit…
Une larme coule sur sa joue.

- Merci ma chérie…C’est…C’est incroyable, c’est une superbe surprise je ne m’y attendais pas du tout…

Pour une journée d’anniversaire, Grégoire s’en souviendra. Lors du repas, Sabine lui vante les mérites de son cadeau, racontant ses échanges cocasses avec les vendeurs, puis les livreurs.

Grégoire est comme dans du coton, épuisé, vidé d’émotions pour en avoir vécu un millier en si peu de temps. Sabine est tellement heureuse d’avoir un mari comme lui, elle est éblouie, et pardonne ses silences.
Le voyant exténué, elle lui propose de remettre leur moment câlin au lendemain, et vient se blottir contre lui. Finalement, elle s’endort bien avant lui.

Lui…qui repense à elle. Qu’il ne reverra plus. N’entendra plus. Ne lira plus.

Quand il a retrouvé Fanny, il s’est jeté sur elle, lui a demandé 1000 fois si elle allait bien. L’a embrassée, cajolée, rassurée. Et puis, il a fallu expliquer.

Fanny avait juré, promis, de ne plus jamais vivre d’histoire cachée. Elle s’en est sortie, elle doit tenir sa promesse.

Alors, les yeux plein de larmes, ils se sont quittés.

« un dernier câlin » avait-elle demandé. Il l’avait serrée, fort, tellement fort qu’elle en garderait la trace à tout jamais. Elle avait tourné la tête, lentement, jusqu’à trouver ses lèvres. Hésitante, elle le voulait, une dernière fois. Son nez contre le sien, sa bouche s’ouvrit et alla à la rencontre de la sienne. Elle happait sa lèvre inférieure, faisait courir sa langue sur sa lèvre supérieure. Elle alla chercher son amour…dans un ultime baiser. Il caressa ses cheveux une dernière fois, lui murmura un je t’aime à peine audible, et la conduisit jusqu’à sa voiture, restée ouverte grâce à une manigance de leur bourreau commun.

Leurs doigts s’éloignèrent et avant d’éclater en sanglots, Fanny était partie.

Il n’oubliera jamais son visage, son image, sa voix. L’horreur de cette journée est à la hauteur de son amour pour elle. Et tout est bel et bien fini.

En fermant les yeux, il se laisser aller au rêve. Les doux souvenirs, ne garder que ça.

Et ne plus jamais, au grand jamais, être infidèle.

_-_- _FIN_-_-_