22H00, 23H10, 23H45, 23H58, 00H12, je sens mon corps, tout mon corps, des pieds à la tête lutter contre une fatigue terrassante. Ma tête est lourde, mon visage est couvert de cernes qui se font de plus en plus importantes, et mon cerveau ne cesse de me répéter en boucle dors, doors, doooooors, sinon demain tu n'arriveras pas à te lever. Et pourtant, hélas, c'est mission impossible...

Pourtant, ma journée fut agréable. J'ai suivi mon rituel du soir qui consiste à humer et déguster un thé vert biologique certifié agriculture équitable. Puis, j'ai lu un chapitre de mon livre du moment : "Le bonheur au quotidien". Alors que d'habitude, ce rituel me permet d'être emporté par les bras de Morphée en seulement quelques secondes, ce soir c'est mission impossible. En effet, une idée obsessionnelle à la fois excitante et terriblement angoissante tourne en boucle dans mon esprit : demain, je passe à la télé dans l'émission une innovation pour une nouvelle vie avec à la clé un chèque de 1 million d'euros !

J'allume mon portable qui m'éblouit de son intense lumière bleue et là, je découvre avec stupéfaction qu'il n'est pas minuit mais 01H45 du matin.

Je n'ai plus le choix ! Je dois me lever pour prendre un somnifère !

Ma maison a beau être plutôt exiguë, cela me fait beaucoup de peine. Me lever, me déplacer jusqu'à la cuisine, ouvrir le placard, trouver la boîte que ma femme a peut-être déplacée récemment, me servir un grand verre d'eau, retourner dans ma chambre sans oublier de passer aux toilettes pour ne pas avoir besoin de me relever dans un quart d'heure. L'effort me paraît tout bonnement insurmontable !

Doucement, poussé par cette folle envie de dormir, je me lève, me dirige vers la cuisine et ouvre ce fameux placard. Je cherche, déplace désespérément les 30 boîtes d'efferalgan auxquelles ma femme tient religieusement "au cas où", déplace une dizaine de boîtes de comprimés alimentaires plus attaquées par la poussière que par nos sucs gastriques quand enfin j'aperçois le Saint Graal : IMOVANE somnifère. Pour ne rien faire tomber, je sors le plus précautionneusement possible la boîte et avale aussitôt un comprimé. Puis, je me dirige à toute vitesse vers les toilettes, j'entends un "boum" assourdissant qui s'accompagne d'une douleur atroce qui remonte et traverse tout mon corps depuis mon pied gauche. Je résiste pour ne pas crier, j'entre, je vaque à mes occupations et tente de rester debout malgré la douleur qui se fait de plus en plus forte et je me dirige de nouveau vers ma chambre pour pouvoir enfin dormir.

Je rallume le téléphone, il est maintenant 01H54 du matin. Je m'allonge ! Le simple effleurement de mon pied avec le lit me fait terriblement mal, mais enfin les bras de Morphée m'emportent.