Trahison Piquante

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Kassandra n'avait aucune envie de jouer au Quidditch en ce début d'après-midi. Et c'était bien la première fois que cela lui arrivait. Même la fois où elle avait eu beaucoup de fièvre, pendant sa première année, cela ne l'avait pas empêchée d'enfourcher son balai et d'offrir la victoire à son équipe en marquant cinq buts. Il faisait un temps magnifique. Un ciel bleu comme on en avait pas vu depuis des semaines. Pas une once de vent au ras du sol. Elle observa furtivement la foule au dehors derrière le rideau des vestiaires. Aucune chevelure dorée caractéristique. Cependant cette couleur était presque omniprésente dans les gradins. Couplée au rouge, elle éclaboussait les bannières menaçantes des Vifs Flamboyants. Ces banderoles changeaient progressivement de couleur, pour laisser apparaître le vert profond des Bois Souverains. Le vacarme était assourdissant.

« Voici l'équipe hybride de cette saison, rejointe par Léa Gourmaud et Clémence Okamura des Lynx ! Mesdemoiselles et messieurs, un tonnerre d'applaudissements pour les Bois Souverains ! » tonna la voix amplifiée du commentateur.

Le stade trembla, les spectateurs tambourinant avec leurs pieds sur les marches de bois.

« En face d'eux, les Serres Vengeresses ! »

On ne martela pas les gradins. Il y eut des sifflets, beaucoup de sifflets. Des centaines de voix s'élevèrent :

- Eh les Aigles c'est des Sang-Mêlé, làlalilalalà, des Sang-de-Bourbe, des enculés, làlalilalalà...

Kassandra se boucha les oreilles avec force, le cuir de ses gants étouffant le chant obscène de la foule. Elle vit l'arbitre se placer au milieu du terrain, à égale distance des deux équipes. Les terribles Cognards et le minuscule Vif d'Or jaillirent de la malle posée au sol, cinq mètres plus bas. Puis le Souafle fut à son tour projeté en chandelle dans les airs. La jeune poursuiveuse leva le manche de son balai et s'élança à toute vitesse, profitant des capacités dernier-cri de son cadeau de Noël. Mais ce n'était pas la seule à posséder un tel équipement, et les deux joueuses arrivèrent en même temps sur la balle écarlate. D'un violent coup d'épaule, Clémence Okamura éjecta Kassandra de sa trajectoire et récupéra la balle. Cette dernière se rattrapa à temps, sa mâchoire lui faisait mal. Le stade rugit d'extase.

- Ça va ? s'enquit rapidement Lucie Leroy en passant à côté d'elle.

L'intéressée hocha rapidement la tête et fléchit ses bras, raffermissant sa prise sur son balai.

« Okamura, Adimi, Molas, interception de Hoffmann, Rosales...Rosales toujours... »

Kassandra effectua un tonneau pour éviter un Cognard. Des sifflets. Elle ne vit pas tout de suite le deuxième arriver, et l'évita de justesse dans une manœuvre peu élégante. Un « ooooh » malheureux retentit. La balle lui tomba des mains.

« Reprise d'Adimi, passe à Molas, Okamura, Okamura qui s'approche de Leroux...et buuuuuut !! Les Bois Souverains ouvrent le score de cette rencontre, avec un magnifique tir d'Okamuraaaa !! »

Le public explosa. Le chant reprit, mais Kassandra ne l'entendait pas, il y avait tout simplement trop de bruit autour d'elle, et tous ses sens étaient concentrés sur la reprise du jeu. Hugo Hoffmann lui fit un signe. Elle acquiesça de la tête. Les deux joueurs se placèrent de chaque côté de Florian Molas, qui tenait le Souafle dans sa main. Son balai n'était pas particulièrement performant, ce qui fait que les deux poursuiveurs des Aigles n'eurent pas de difficulté à maintenir leur tenaille sur la distance. Au moment de plonger sur son adversaire pour terminer la manœuvre, Kassandra sentit quelque chose claquer dans son dos. La douleur fut si soudaine qu'elle piqua directement vers le sol, incapable de reprendre le contrôle de son balai. Sa vision périphérique se brouilla sous l'effet de la vitesse. Thomas Rajden la rattrapa en se portant à son contact.

- Putain Kass...mais c'est une faute ça bordel, une faute ! Qu'est-ce qu'il fout l'arbitre ? cria t-il avant de repartir vers un Cognard proche, sa batte redoutablement levée.

Ce bref moment suffit pour laisser les Cerfs reprendre l'avantage. Un nouveau but fit vibrer la foule.

« 20 à Zéro pour les Bois Souverains, mais que font les Serres Vengeresses ? » résonna la voix du commentateur.

Elles essayent de jouer, se dit Kassandra, dont la concentration fut ébranlée par la douleur. Elle se massa rapidement le dos et replongea au cœur de l'action.

« Mayers, Hoffmann, Rosales...Hoffmann, Gomez est en difficulté à droite des anneaux des Cerfs... »

Les vociférations des spectateurs couvrirent l'annonce du but. La jeune fille tapa dans la main levée de ses coéquipiers. Le match commençait vraiment. Il y eut un coup de sifflet. L'arbitre était intervenu pour séparer Lucie Leroy et Léa Gourmaud, qui semblaient en être venues aux mains. Un penalty fut accordé aux Aigles.

Kassandra s'approcha du but adverse, la balle dans les mains. Elle tenta de faire le vide dans son esprit, comme à chaque penalty, ne pensant qu'à l'angle de son tir.

- Eh grosse pute ! vociféra quelqu'un sur sa gauche, parmi la masse d'élèves.

Les sifflets se firent de plus en plus présents, transperçant les tympans de la jeune fille. Elle crispa sa prise sur le Souafle, arma son bras tremblant...et tira. Des éclats de rire moqueurs. Son tir n'avait même pas touché la partie externe des anneaux de but. Elle donna un coup rageur dans le vide, sentant l'émotion monter.

Le match reprit de plus belle, Kassandra évita d'autres Cognards projetés dans sa direction par Léa Gourmaud, l'une des batteurs adverses, qui semblait avoir pour seul objectif de désarçonner le plus de poursuiveurs des Aigles. La rage qu'elle mettait dans chaque coup de batte était perceptible. L'autre représentante de l'équipe des Vifs Flamboyants, la poursuiveuse Clémence Okamura, n'était pas en reste, et disputait férocement chaque balle. Elles voulaient venger leur équipe, Kassandra l'avait bien compris. Et il était hors de question que de pareils mauvais-joueurs l'emportent, mêmes'ils faisaient désormais partie de l'équipe des Bois Souverains. Les minutes s'écoulèrent, deux nouveaux buts pour les Cerfs. Les Aigles étaient à cran. Ignorer le plus mauvais public de l'histoire du Quidditch était peut être possible en début de match, mais avec la frustration et la fatigue qui commençaient à poindre, leurs visages se durcissaient, et leurs passes perdaient en précision. La jeune poursuiveuse rousse déchira la manche d'un adversaire lors d'un contact brutal entre plusieurs joueurs. La foule hurla à la faute, et le penalty fut accordé malgré les protestations des Serres Vengeresses. Clémence Okamura précipita son tir.

Celui-là ne passera pas, se dit Kassandra.

En effet, la balle suivait une trajectoire bien trop prévisible pour qu'elle ne soit pas arrêtée par Théo Leroux, le gardien des Aigles. Mais ce dernier détourna vivement la tête en direction du public au dernier moment. La jeune fille porta la main à sa bouche, les yeux écarquillés. Le stade gronda. Le Capitaine, Thomas Rajden, se porta au contact de Théo, et au vu des traits de son visage, il ne lui dit pas que des mots doux. Le gardien protesta en gesticulant vers la foule en contrebas. Puis le sifflet retentit. Kassandra aperçut la mine déconfite de Lucie Leroy, alors que son homologue des Bois Souverains faisait un tour d'honneur du stade, le point levé et fermé sur le Vif d'Or.

La mine sombre, la jeune fille regagna les vestiaires, son maillot trempé de sueur.

- Je pense qu'ils ont eu ce qu'ils voulaient ces bâtards de Lynx non ? Ils vont peut-être nous laisser tranquille maintenant... lâcha Gabriel Mayers, le troisième poursuiveur de l'équipe.

- Ya intérêt, je rejoue pas dans ces conditions moi ! grogna Théo Leroux.

- Nous allons jouer tant que nous pouvons jouer, notre équipe est au complet au moins ! rétorqua Thomas Rajden.

- Elle ne le sera plus si ça continue comme ça... sanglota Lucie.

Hugo Hoffmann se précipita sur elle.

- Qu'est-ce que tu racontes Lulu ? Tu vas pas nous quitter, pas pour trois abrutis parmi les spectateurs ! Tu veux pas abandonner ton super jeu à cause d'eux quand même ! C'est ce qu'ils veulent ! s'exclama t-il.

Lucie posa la tête sur son épaule.

- Ils étaient pas trois là...ils...ils ont parlé de mon père...

L'expression d'Hugo passa de la surprise à la compassion.

- Ma pauvre...s'il te voyait voler sur un balai...

L'attrapeuse éclata en sanglots.

Kassandra retrouva Julie à la sortie des vestiaires.

- Alice... commença t-elle.

- ...n'est pas là, et Margot non plus... termina son amie.

La jolie rousse lui tomba dans les bras.

- Mais toi t'es toujours là...

- Ah ça oui ! Je te laisse pas toute seule dans ce stade de tarés ! s'exclama Julie.

Elles ne dirent rien pendant un court instant.

- Je veux pas parler de Quidditch, pas pour le moment, confessa sinistrement Kassandra.

- Je comprends va...viens on va se promener, il fait super beau aujourd'hui ! répondit son amie avec un grand sourire.

Un sourire de quelqu'un qui a quelque chose derrière la tête.

Elles s'enfoncèrent dans les Jardins, sublimés par le soleil.

- ... ce qu'il pense de moi tu vois...

De la musique parvint à leurs oreilles lorsqu'elles passèrent devant un petit pont. Julie décida de l'emprunter, hâtant le pas.

- Ju ? s'interrompit Kassandra.

Je dois la soûler avec mes histoires à force... pensa t-elle d'un air triste avant de la suivre.

De l'autre côté, elles se déplaçaient sur un sol de pierre. Ces dernières n'avaient pas de forme géométrique précise, au contraire d'un bon nombre d'éléments dans l'architecture de l'école. Elles s'imbriquaient parfaitement pour former une mosaïque terne. La jolie rousse s'arrêta net, interdite. Margot pinçait doucement les cordes de sa guitare, un grand sourire illuminant son visage. Ses yeux bleus allaient du manche de son instrument aux lignes de la partition qui trônait sur un petit pupitre. Celui-ci lévitait au dessus du sol et était placé devant le banc sur lequel elle était assise. Un chignon nouait ses cheveux d'un noir profond.

- T'es sûre que tu vas y arriver ? Voilà un peu de public pour t'aider ! s'amusa Eliot Klein en apercevant Kassandra et Julie.

Il effectuait les mêmes accords simples, mais avec beaucoup plus d'aisance que sa camarade. Cette dernière leva la tête, vit ses amies, rougit d'un seul coup, fit un petit geste maladroit de la main, et continua de jouer.

- Je vais y arriver, chut rooh ! répondit-elle en tournant la tête vers le beau luxembourgeois.

- Si tu es si sûre alors...

« La première fois, c'était quelque chose dans tes yeux »

« C'est cette étincelle qui m'a fait tomber »

« Je n'ai jamais été aussi heureux »

« Je ne pensais qu'à m'approcher de ces derniers... »

La voix d'Eliot Klein était assurée, posée sur le tempo lent de la ballade. Elle fut bientôt rejointe par celle plus faible et hésitante de Margot, qui trahissait quelques difficultés à jouer et chanter en même temps. Il fallait en plus y ajouter le regard de ses amies. Mais Margot se concentrait pour garder le rythme du morceau.

Kassandra sentit quelque chose se déchirer en elle, c'en était trop. Ses nerfs fondirent. Son cerveau fut brusquement assailli par un flot incontrôlable d'émotion. Elle ressentit l'exact contraire du bonheur intense qui habitait Margot. Cette journée était définitivement horrible. Elle ne pouvait plus penser. Elle ne pouvait plus rien dire. Ses jambes se mirent en mouvement d'elles-mêmes.

- Pourquoi tu réagis comme ça ? cria Julie.

Kassandra se mit à courir. Elle courait tellement vite dans les Jardins, que les larmes sur ses joues ne pouvaient couler jusqu'à son menton.

Comment a t-elle pu me faire ça ? se disait-elle.

C'est cette question qui ressortirait inlassablement du trouble magma qui submergeait son esprit. Margot était son amie, bien qu'elles avaient toutes les deux de forts caractères, et qu'elles ne parvenaient pas toujours à s'entendre. Mais ce n'était pas possible, ce ne pouvait pas être vraiment elle ! Et pourtant si...elle avait osé...

Pourquoi est-elle toujours meilleure que moi ? se dit-elle, misérable.

Lorsqu'elle fut sûre de s'être assez éloignée de cette scène cauchemardesque, elle s'arrêta. Elle ne s'était jamais aventurée aussi profondément dans les Jardins. En levant la tête, elle n'aperçut aucun bâtiment dans le ciel bleu. L'endroit était très calme. Devant elle se trouvait l'encadrement ouvragé en pierre d'une porte. La dite porte était manquante, et l'ouverture ouvrait sur un espace dégagé. La jeune fille s'y engagea, attirée par le miroitement d'une fontaine plus loin. Elle déboucha dans un magnifique jardin perpétuel.

Elle vit tout d'abord la forêt de statues et de vases. Puis elle s'avança sur les dalles de pierre polie. Les parterres de fleurs rosées s'étendaient sur différents niveaux. Une eau claire coulait le long de canaux, qui pouvaient aisément être franchis à l'aide de nombreuses dalles en arc. Il y avait des sculptures et des bancs ciselés, des nénuphars qui parsemaient les cours d'eau. Une délicieuse odeur de rose flottait dans l'air. Kassandra avait l'impression d'être complètement ailleurs. Elle n'avait jamais vu quelque chose de semblable. Elle s'assit sur l'un des bancs de pierre blanche. Cette école recelait d'une telle beauté, c'en était à peine croyable.

Mais on y trouve autant de mocheté, pensa t-elle en s'essuyant les joues.

Elle se sentait terriblement seule. Normalement, dans ces moments là, une seule personne parvenait à la réconforter. Alice. Mais celle-ci n'était pas là, elle l'avait abandonnée. De nouvelles larmes vinrent s'échouer sur son uniforme bleu-pâle. Au bout d'un moment, un léger rire lui fit lever la tête. Il venait de plus loin, en contrebas. Kassandra s'approcha discrètement, descendant quelques marches. Quelqu'un l'avait-il vu pleurer ? Affolée, elle se retrouva face à un treillis métallique blanc, qui formait une sorte de cloison circulaire. Un banc de la même forme s'insérait au pied de celle-ci. Des voix venaient de l'autre côté. La jeune fille se jucha discrètement sur le banc, ses jambes en contact avec la pierre froide.

À travers les arabesques de métal, elle put constater la présence de deux élèves assis, quelques mètres plus bas. Ils lui faisaient face. Il y avait une fille et un garçon. La fille était brune, et le garçon aussi. La fille était belle, le garçon était beau. Ils paraissaient plus âgés qu'elle. Le beau garçon avait son bras autour de l'épaule de la belle fille. Celle-ci était lovée au creux de son cou. Elle portait une barrette ronde toute rose. Ils se parlaient doucement en observant les nuages dans le ciel.

Ils sont trop mignons... pensa Kassandra.

Mais son esprit tourmenté lui joua des tours. Elle imagina Margot et Eliot Klein à la place des deux amoureux. Elle voyait distinctement le beau luxembourgeois qui caressait avec douceur les boucles noires de Margot. Et cette dernière...cette traîtresse...elle ne le quittait pas des yeux, lui susurrant tendrement des mots doux. Tout revint d'un seul coup : la sombre colère, la profonde tristesse, les larmes abondantes. Sans réellement y faire attention, elle fit descendre avec véhémence ses doigts le long du treillis. Les voix se turent. Puis le garçon demanda, d'une voix peu assurée :

- Julien c'est toi ? C'est pas ce que tu crois mec...

Kassandra ne bougea pas, interdite.

- Julien ? continua le garçon en se levant.

Le sourire avait disparu des lèvres de sa petite amie, qui baissait les yeux. Le garçon s'approcha, une étrange expression tordant son visage. Lorsqu'il disparut de son champ de vision, Kassandra consentit enfin à bouger. Elle se leva précipitamment, et se mit à courir sur la pierre polie. Elle pouvait entendre les pas du garçon derrière elle. Il l'avait prise en chasse. Elle sprinta entre les statues et les arbustes rosâtres, consciente qu'elle n'aurait pas dû se trouver là.

- Impedimenta !

Le sortilège turquoise frôla sa chaussure. Elle trébucha violemment, et tomba sur le côté, dans un parterre de fleurs. Quelque chose s'enfonça dans sa cuisse. Kassandra poussa un cri perçant et roula hors du massif.

- Mais t'es pas bien enfin ! La pauvre, t'étais obligée de lui jeter un sort ? s'écria une voix paniquée, au timbre féminin.

- Je...j'ai pas réfléchi...pourquoi elle nous espionnait d'abord ? répondit une autre, masculine.

- Mais on s'en fous de ça ! Elle a pas l'air bien là !

Elle discerna un visage inquiet se pencher au dessus d'elle, accompagnée de courtes mèches brunes.

- Tu t'appelles comment ? lui demanda la fille.

Kassandra ne répondit pas. Elle gémissait de douleur.

- Bon on va t'amener au Palais ma belle, n'essaye pas trop de regarder ta cuisse d'accord ? continua la fille.

La blessée hocha difficilement la tête, et préféra fermer complètement les yeux. Elle sentit deux bras puissants qui la soulevèrent du sol.

- T'as pas fait le stage de médecine toi ? demanda celui qui la portait.

- Si si ! Mais je ne sais pas quoi faire là, il ne faut pas infecter ce genre de blessures...imagine l'épine est enfoncée très profondément... répondit l'autre voix.

Une épine ? D'horribles images traversèrent son esprit.

- Oh là là j'espère que ça ne lui fait pas trop mal... continua la fille.

La douleur plongea peu à peu Kassandra dans un état léthargique.

Lorsque ses sens revinrent, ce fut pour lui signifier que la douleur atroce dans sa cuisse diminuait beaucoup. Elle ouvrit les yeux. Elle se trouvait dans l'un des lits douillets de l'Infirmerie. Un guérisseur était penché sur sa blessure. Les deux amoureux qu'elle avait surpris étaient à son chevet, anxieux. Lorsqu'il se redressa, le guérisseur exhiba fièrement une épine de quinze centimètres. Elle était crochue et dentée. La jeune rousse réprima un haut-le-cœur.

- Et voilà ! Une épine d'Ardor Spinosus, non toxique heureusement, mais possédant un venin douloureux. Demain vous ne sentirez plus rien mademoiselle ! la rassura l'homme.

- Vous pouvez rester quelques temps ici, le temps de reprendre vos esprits. À l'avenir, tâchez d'éviter ces buissons rosâtres ! conclut-il.

Kassandra acquiesça faiblement. Le guérisseur écarta brièvement les rideaux pour sortir et s'éloigna avec l'horrible épine.

- Ça va mieux Kassandra ? demanda la fille aux cheveux courts.

- Oui, répondit l'intéressée.

- Je m'appelle Zoé, et lui cet idiot...c'est Alexandre, continua t-elle en montrant du pouce son petit ami.

Kassandra remarqua que la barrette ronde de Zoé était composée d'un disque qui tournait tranquillement sur lui-même. La couleur de la barrette avait changée. Elle n'était plus rose, mais blanche.

- C'est moi l'idiot dans l'histoire ? s'indigna ce dernier.

- Eh oui monsieur, c'est pas moi qui a jeté un sort à cette petite fille toute mignonne ! s'exclama t-elle.

- C'est « ai jeté » déjà hein, rétorqua t-il.

- Ouais si tu veux...ça ne sert à rien d'essayer d'avoir le dernier mot, je retiens...bref, revenons en à toi ma belle !

- On t'a vu au match tout à l'heure, eh bah je pense que t'as vraiment un super potentiel, tu voles super bien ! complimenta Alexandre.

- Ah bon ? s'étonna Kassandra.

- Oui ! Je suis aussi poursuiveur, dans l'équipe des Crocs d'Argent ! Et je peux te dire que des Secondes aussi douées que ça, bah ça pousse pas sur les arbres !

Elle se rendit compte qu'Alexandre lui disait quelque chose. Elle l'avait probablement aperçu lors d'une rencontre.

- Oh merci...mais j'ai vraiment été nulle à ce match là...et ces chalados dans les gradins...

- Oui, c'était insupportable, tout ça pour une défaite quoi, les Lynx sont vraiment immatures ! déplora Zoé.

- Et leur histoire de pétition là, lamentable vraiment...

- De toute façon, venant d'Alban Simon, on pouvait s'attendre qu'à ça !

- Quand je pense que ta sœur est sortie avec...

- Oh je te rassure, elle est aussi bête que lui ! Qui se ressemble s'assemble non ? dit-elle en déposant un baiser sur les lèvres d'Alexandre.

Celui-ci réorienta la conversation :

- Pour revenir au match du coup, ne te dis surtout pas que c'est toi ou ton équipe qui n'ont pas assuré, je pense que je ne peux même pas imaginer l'impact des insultes et tout en pleine partie. Crois moi, j'en ai fait des matchs depuis que je suis ici, et je suis certain que tu iras très loin !

- C'est vraiment gentil, répondit sincèrement Kassandra, qui ne savait trop quoi dire.

- Oui oui il très gentil, mais il oublie quelque chose cet abruti ! reprocha Zoé en donnant un coup de coude à son amoureux.

- Euh...oui oui ! Oui excuse moi pour tout à l'heure, j'ai réagit n'importe comment, c'est juste que...

Sa petite copine lui écrasa le pied.

- Aie !

Zoé jeta un regard plein de reproches à Alexandre, et demanda :

- Au fait, si on peut savoir...c'est à cause du Quidditch que tu es venue dans le Jardin des Amoureux tout à l'heure ?

- Le « Jardin des Amoureux » , pas beaucoup d'inspiration ces botanistes... lâcha Alexandre.

- Euh...hésita Kassandra, un peu prise au dépourvu.

Elle eut la soudaine envie de se confier. Rencontrer, en dehors de ses plus-ou-moins-amies , deux personnes non hostiles à son égard et drôles en plus, lui mettait du baume au cœur.

- Humm...vu ta tête...je dirais qu'il y a autre chose... comprit Zoé.

La jeune rousse hocha timidement la tête.

- Je sais que ça ne fait vraiment pas longtemps qu'on se connaît, d'autant que notre première rencontre aurait pu se passer dans de meilleures conditions (ses yeux transpercèrent Alexandre), mais tu peux vraiment tout nous raconter, je vois bien dans quel état tu es, et à ton âge c'est super triste...on peut t'aider ! Enfin, JE peux t'aider si tu veux que l'autre idiot s'en aille, je pense qu'il comprendra sans problème, n'est-ce pas ?

- Tout à fait, Zoé est la meilleure psychologue de la Terre ! Quant à moi, je peux effectivement m'en aller, assura t-il en souriant.

- Ouais c'est ça, rattrape toi comme tu peux...

Ce fut salvateur pour Kassandra. Elle commença timidement à parler des incessantes moqueries, puis ses pensées se débloquèrent peu à peu, abreuvant ses deux auditeurs d'un torrent d'informations et de larmes d'émotion. Ils écoutèrent avec attention, posant des questions, tentant de trouver des solutions.

- Ma pauvre chérie, c'est compliqué la vie de star hein, sourit Zoé en la prenant dans ses bras, à un croisement sur la Grande Allée des Jardins.

- On est dans la même école OK ? Alors même si elle est quand même vachement grande, n'hésite pas à venir me voir quand tu veux ma belle, on mangera des gâteaux en se racontant nos histoires ! ajouta t-elle en dénouant son étreinte.

- À bientôt Kassandra, et ne t'inquiètes pas pour ce garçon, y'en a plein d'autres ici qui méritent une fille aussi mignonne et super que toi ! lui affirma Alexandre avec un clin d'œil.

La jolie rousse leur fit un dernier signe de la main, puis s'enfonça revigorée sur le chemin du Pavillon.

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