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Les minutes s’écoulèrent dans la pénombre. Gaëlla attendait, yeux clos. Tout ce qu’elle avait à faire, c’était rester éveillée assez longtemps pour que Romickéo ne s’endorme.

Elle s’était convaincue qu’il devait forcément se reposer au cours de la nuit, pour tenir depuis son kidnapping. Elle devait juste rester en alerte et simuler d’être endormie, jusqu’au bon moment…

Au bout de ce qui lui sembla une heure, elle se risqua à entrouvrir les paupières avec lenteur. L’obscurité dans la cabane était telle qu’il était presque impossible de discerner si Romickéo, avachi sur sa chaise à quelques pas du matelas, la regardait ou fixait un point non loin d’elle.

Dans le doute, la jeune femme préféra attendre plus longtemps et s’empêcha de sombrer dans les abysses du sommeil une poignée d’heures supplémentaires.

Des bribes de la discussion qu’elle avait eue au cours de la soirée avec son ravisseur lui traversaient l’esprit par intermittence, au milieu de souvenirs heureux de son existence. Comme souvent, elle pensait à Hona, à son sourire, l’éclat de ses yeux clairs. Cette image, comme un baume sur son cœur meurtri, la réconfortait au cœur des ténèbres, lui donnait le courage de lutter chaque fois que le désespoir la saisissait.

Je vais m’en sortir, Hona, promit-elle, je n’ai rien abandonné. Tu vois, tes paroles d’espoir lors de notre dernier échange m’ont insufflé la force de me battre. Si je survis, je te retrouverai. Je te montrerai qu’on a raison de s’accrocher.

Son esprit commençait à s’engourdir lorsqu’un bruit feutré en provenance de l’entrée lui fit dresser l’oreille. Très prudemment, elle laissa ses paupières s’entrouvrir suffisamment pour distinguer les formes dans la pénombre. Il lui fallut quelques instants pour s’y accommoder et constater que le menton de Romickéo reposait contre le haut de son torse.

L’ombre qui dessinait ses orbites ne lui permettait pas de voir si ses yeux étaient ouverts ou fermés, mais elle estima que cette position laissait peu de place au doute. Un léger mouvement de son bras ballant indiqua à Gaëlla qu’il venait tout juste de glisser dans le vide, tandis que l’autre bras restait replié sur sa cuisse.

En dessous de la chaise, ce qui semblait être un morceau de pain reposait sur le parquet élimé. C’était donc ça qui avait produit le bruit en tombant de sa main, lorsque Romickéo s’était assoupi, déduisit la jeune fille.

Je ne dois pas perdre de temps, mais s’il vient à peine de s’endormir, le moindre mouvement risque de le réveiller…

Par mesure de précaution, elle choisit de patienter encore quelques minutes, pour s’assurer que son ravisseur ne soit pas simplement en train de somnoler. Un léger ronflement lui parvint enfin, confirmant que la voie était libre.

Après une inspiration, Gaëlla repoussa la couverture qui la recouvrait, l’enroula tant bien que mal autour de son poing malgré ses liens, et se mit sur ses jambes.

Avec des mouvements aussi lents et silencieux que possible, elle contourna le matelas pour se placer dos à l’entrée et au terroriste, tout en guettant la moindre réaction de sa part.

Puisqu’il bloquait l’accès à la porte, elle n’avait qu’une option de fuite : la fenêtre.

Face à elle, l’étroit carré vers sa liberté semblait l’appeler. Les rayons d’une lune rousse perçaient la vitre fêlée, pour tomber sur le parquet poussiéreux à ses pieds.

En deux enjambées discrètes, elle se rapprocha de son salut. Une latte craqua lorsqu’elle posa son talon dessus. Elle tourna la tête en arrière si brutalement qu’elle sentit une douleur aigüe lui pincer la nuque. À son plus grand soulagement, le menton de Romickéo reposait toujours contre sa clavicule, et ses ronflements ne discontinuaient pas.

Reprenant son courage, la jeune fille se tourna de nouveau vers la fenêtre. Elle avait l’impression que les battements de son cœur résonnaient dans toute la cabane et qu’ils pouvaient réveiller son ravisseur à tout instant.

L’avant-bras étroitement entouré de la couverture, elle se positionna au plus près du carreau brisé, et entreprit de décrocher les bouts de verre de la feuillure éclat par éclat, en les repoussant vers l’extérieur.

Fastidieusement, elle parvint à en extraire plus de la moitié, mais se retrouva face à une contrainte périlleuse : elle devait casser les derniers morceaux pour passer à travers l’ouverture. Et cela sans réveiller Romickéo, ni se mutiler en s’extrayant de la cabane...

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