Les enfants raffolaient des contes de nona Anne-Marie. Pour l’épiphanie, Anne-Marie leur suggérait : « Tout à coup, le roi Balthazar prêta l’oreille :

- N’entendez-vous rien ? demanda-t-il aux autres.

Melchior et Gaspard écoutèrent à leur tour :

- Ne serait-ce pas plutôt, fit le premier, le vent qui fait bruire les branches ou les appels d’un rossignol perdu que l’écho apporte jusqu’à nous ?

Mais Gaspard montrait la route : « Avançons toujours ! dit-il. Murmure du vent ou chanson de rossignol, le bruit nous guidera. »

C’est à partir de ce moment-là qu'Anne-Sophie se mit à chanter. Sa mère l’emmenait avec elle à Sartène où elle s’essayait aux polyphonies corses.

Le chien de Michel, Frac, un grand Montagne des Pyrénées croisé avec un Setter accompagnait régulièrement les enfants dans leurs escapades et délaissait son maître. Michel emmenait fréquemment leur fils pour des tournées de reconnaissance forestière. Sur les pentes du "Trou de la bombe", non loin de la bergerie de Palieri, parmi les genévriers de Phénicie et les coronilles de Valencia, tout en lui désignant les taravelli (Asphodelus aestiva), il demanda à Marc-Antoine l’origine de l’appellation "Trou de la bombe" ?

- Mi, on a tiré au canon dedans ?

- À quelle heure mon béou ? Non, c’était du temps où le bon saint Martin, moine bénédictin, regardait le diable s’évertuer à labourer un champ. Il souriait, le tournant en ridicule. Et pourquoi te moques-tu ? S’emporta le diable. Parce que, quand bien même tu t’y appliques, je jure que tu n’arriveras pas à tirer un sillon droit ! Et le diable s’appliqua… mais dévia. De colère, il saisit le soc de la charrue et le jeta avec rage contre la montagne. Le soc la traversa dans un bruit de bombe ! Tout simplement ! Viens, en montant là-haut, on peut voir la mer des deux côtés, tant les Sanguinaires d’Ajaccio que l’île d’Elbe côté italien.