III
6h45, le réveil sonna, Charles se réveilla et l’éteignit machinalement. Il se redressa, s’assit sur le bord du lit, se frotta les yeux, attrapa son pyjama, l’enfila, mit ses chaussons et émergeant doucement se dirigea vers la cuisine. Là il prépara son petit déjeuner : un thé, un kiwi et quelques tartines de pain beurré. Le petit déjeuner avalé, il fit une rapide toilette, silencieuse, pour ne pas réveiller Jeanne qui s’était rendormie. S’en suivit une lecture en diagonale des dernières actualités. Rien de nouveau, rien qui ne vaille la peine d’être lu en tout cas se dit-il. Il regarda alors son agenda numérique : 9h, rendez-vous avec Me Vellere, Notaire.
Il était encore tôt un peu plus de sept heure et demie, cela lui laisserait le temps de se préparer tranquillement. Il posa alors sa tablette sur la table à manger et se dirigea vers le jardin où il savoura les premiers rayons du Soleil. Après le rendez-vous, qui ne devrait pas être très long puisque sa mère ne possédait pas grand-chose et qu’il en était le seul héritier, il irait sur sa tombe puis il irait trier et ranger les affaires qu’elle laissait derrière elle. Il savait déjà qu’il faudrait se débarrasser de nombreuses choses, mettre le passé en boîte. Le passé de sa mère ne sera plus, et c’était aussi un peu le sien qui disparaissait avec elle. Après tout, c’était sûrement l’ordre naturel des choses se dit-il. Les plus vieux partent, les plus jeunes restent, et c’est à eux de « nettoyer », de récupérer ce que les autres ont laissé. Il flâna dans son jardin, regarda les fleurs s’ouvrirent, arracha une ou deux fleurs abîmées et laissa les abeilles commencer leur longue journée de travail.
C’est fascinant se dit-il ; de si petites bêtes qu’on pourrait écraser d’un revers de la main, jouant, malgré elles, un rôle capital dans le maintien de tout un monde. Se rendaient-elles compte du poids qui repose sur leurs ailes ? Savaient-elles que les fleurs usent d’elles pour se reproduire qu’elles étaient les esclaves inconscientes d’un système bien plus grand qu’elles ?
Il suffit que l’une d’elle s’enfonce dans une fleur afin d’y récupérer du nectar pour sa ruche puis s’enfonce à nouveau dans une fleur voisine pour que, malgré elle la fécondation florale ait lieu. En agissant de façon « égoïste », elle fait le bien commun. Son acte intéressé sert une communauté qui la dépasse, qu’elle n’imagine même pas.
Il avait toujours été fasciné par les insectes. Les eusociaux en particulier. Et s’il n’avait pas choisi un métier stable qui lui permettait d’assurer un niveau de vie convenable, il aurait à coup sûr choisi l’apiculture. Mais il lui avait fallu faire un choix de raison. Le regrettait-il à présent ? Ce matin oui, le reste du temps en général non. Enfin disons que le reste du temps, il ne se posait pas la question.
Le bruit des pas de Jeanne derrière lui le sortirent de ses rêveries.
« -Comment s’est passée ta nuit ?
-Plutôt bien. Et la tienne ?
-J’ai eu du mal à trouver le sommeil et me suis endormi tard, mais le reste de la nuit a été plutôt calme.
-Ton rendez-vous est dans une petite heure, tu as bien réuni tous les papiers demandés ?
-Oui, normalement tout est prêt. Je vais aller vérifier une dernière fois. »
Ils se dirigèrent alors tous deux vers la cuisine où Jeanne déjeuna d’un thé et de quelques biscottes arrosées de miel, tandis qu’ affairé à sa tâche, Charles fouillait dans une pochette, et marquait sa liste quand il trouvait le papier demandé. Après quelques minutes, toute la liste était cochée, il avait donc tout ce que lui demandait le notaire.
« -Je vais devoir y aller.
-Déjà ? Tu as encore un peu de temps tu sais ?
-Oui mais je préfère arriver en avance qu’en retard, on ne sait jamais ce qu’il peut se passer sur la route.
-D’accord. Tu rentres tout de suite après le rendez-vous ?
-Non, je vais passer voir maman et j’irai faire un peu de tri dans ses affaires.
-Oh. Je viendrai te filer un coup de main si tu veux.
-Non, merci. C’est gentil chérie, mais j’aimerai me retrouver un peu seul dans la maison.
-Je comprends, pas de problème. Tu rentreras manger ce midi quand même ?
-Oui, ne t’en fais pas. Allez, je décolle. À tout à l’heure. Je t’aime.
-Moi aussi. À tout à l’heure. »
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