Utopia

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N'avez-vous jamais rêvé d'une utopie parfaite, une ville sans chômage, sans pauvreté et qui met en avant votre famille ? C'est possible ! Rejoignez Utopia, la ville de vos rêves et votre vie ne sera plus qu'un longue fleuve paisible. Vous n'avez pas les moyens de vous y installer ni d'endroit où loger ? Ne vous inquiétez pas ! Utopia s'occupe de tout tant que vous gardez votre rôle de citoyen modèle. Devenez l'élite en gravissant les échelons et obtenez un appartement spécial utopia, il n'y a rien de plus simple. Ses habitants et son maire vous attendent avec impatience.

À bientôt à Utopia !


Tom se frotta douloureusement le crâne. Il en avait marre d'entendre ce spot dès qu'il allumait la radio ou la télévision. Il ne supportait plus qu'on le rabâche avec ce culte du parfait. Il se leva enfin de son lit pour atteindre la cuisine. Il se prépara rapidement un déjeuner qu'il engloutit en moins de deux ; la journée risquait d'être longue.

Il ouvrit une pile de courrier qu'il ignorait depuis une semaine mais il savait qu'il ne pouvait pas continuer à fuir comme ça. Il devait rendre ses comptes à Utopia. Dernier avertissement avant expulsion ; Taxes sur la famille et le mariage. Dernier avertissement avant expulsion. Ces mots résonnaient fort dans sa tête. Tom devait trouver un boulot au plus vite au risque de se faire expulser de la ville. Le maire voulait le plein emploi pour sa ville et bannissait tous ceux qui étaient restés au chômage trop longtemps, et apparemment c'était la dernière chance pour Tom pour trouver un emploi.

Tom ignora le deuxième courrier. Utopia se voulait être une ville riche en plein boom démographique, et tous ceux qui n'avaient pas encore d'enfant après un certain âge se voyait recevoir une taxe. La ville tenait à être une ville exemplaire avec des citoyens et une vie exemplaires. Tout le monde se devait d'être marié avant trente ans et avoir au moins un enfant avant trente-cinq. Malheureusement pour lui, Tom n'avait toujours pas trouvé l'âme sœur à trente-deux ans et il craignait de devoir payer la taxe sur les enfants d'ici trois ans ; et ça il ne pouvait pas se le permettre. Il était déjà au bord de l'expulsion. La télé continuait de tourner dans le salon « Prenez des cours de langue à moins de trente euros par mois ! Apprenez le desperanto rapidement ! » Le desperanto était devenue la langue officielle, une langue qui se voulait universelle et qui fut adoptée peu de temps après la création d'Utopia.

Elle était destinée pour que tous les migrants puissent se comprendre entre eux mais il était interdit de parler une autre langue que le desperanto. Si vous vous faisiez prendre à parler une langue étrangère vous risquiez encore une amende. Et si vous ne l'appreniez pas après un certain temps vous risquiez aussi l'expulsion.

Tom se décida finalement à sortir de chez lui, il avait besoin de prendre l'air.

Il se retrouva au parc central. Le paysage était magnifique, la pelouse parfaitement verte et les arbres parfaitement taillés. Un grand chemin de dalles parcourait l'ensemble du parc où les visiteurs se promenaient paisiblement. Tout était parfait au millimètre près, des agents d'entretien tenaient l'endroit vingt-quatre heure sur vingt-quatre et nettoyaient la moindre saleté. Utopia se devait d'être parfaite en tout point. Tout le monde était constamment sur son trente-et-un. Ils tenaient à garder leur statut de citoyen modèle. Tom se sentit bête avec ses fringues quelconques, ne pouvant pas encore s'acheter des vêtements de marque nécessaires.

Il passa devant les appartements spéciaux d'Utopia. Ils étaient parfaitement alignés et étaient d'une blancheur distincte. Seule l'élite avait le droit d'y habiter. Pour ça, il fallait avoir le statut de citoyen modèle qui s'acquérait après de dur labeur. Seuls ceux qui remplissaient tous les critères d'Utopia pouvaient y avoir droit, à savoir une famille complète, un travail et une hygiène de vie considérée comme exemplaire. Ceux qui arrivaient à atteindre ce but se voyaient ne plus devoir payer de taxe et gagner un appartement, tant qu'ils gardaient leur titre de citoyen modèle.

Il n'y avait pas de prison, tous les criminels se faisaient soit exécuter soit exclure. Les seuls criminels connus étaient des contrebandiers qui fabriquaient de l'alcool ou exportaient du tabac dans la ville. Utopia voulait une hygiène de vie exemplaire et tout ce que s'y éloignait était interdit. Tom avait tout plaqué pour rejoindre cette ville. Il y voyait là un futur salvateur mais il n'avait connu que la discrimination. Tout le monde lui tournait le dos avant qu'il n'apprenne le desperanto et il avait du mal à trouver du travail à cause de son statut d'immigré ; les sociétés mettant en avant les purs souches.

Utopia se voulait ville d'espoir et d'accueil mais Tom n'avait vu que des portes fermées depuis son arrivée. Il ne supportait plus ce culte du parfait impossible à avoir et le harcèlement social et moral posé par la société et ses dirigeants pour atteindre le but ultime.

Mais il ne pouvait pas revenir en arrière, il était allé trop loin pour ça. Et s'il devait jouer l'esclave de la société d'Utopia, et bien qu'il le fasse.

Il jeta un dernier coup d'œil vers les appartements resplendissants. Il en rêvait, bien sûr, mais il savait que c'était peine perdue. Seule l'élite de l'élite était récompensée et encouragée, bien qu'Utopia feigne de donner de l'espoir aux immigrés. Il n'y avait de place que pour les Utopiens ici, et Tom le savait tristement mieux que tout le monde.

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