Vide
Une crampe, légère, supportable. Puis une autre, plus longue, plus forte. À la troisième, l'inquiétude naît. Ton esprit cherche des solutions pour les faire passer. T'allonger, ne plus bouger, te reposer.
Rien à faire, elles reviennent.
Certaines te font grincer des dents. D'autres te poussent à te dire que ce n'est rien.
Tu essaies de te rassurer : ça doit être normal.
Puis, le sang. L'angoisse revient au galop.
Cette fois, pas question d'ignorer le signal. C'est ta pause, alors, après avoir prévenu ta chef, tu files à l'hôpital.
L'attente te semble interminable. Le stress augmente à chaque patient. Les conversations te tourmentent.
Et l'angoisse te grignote les entrailles aussi sûrement que les crampes.
L'heure de retourner au travail sonne, tu attends toujours. Le ventre noué, tu t'éclipses sur le balcon de la salle d'attente. Tu appelles le boulot. Ils sont un peu ennuyés de ton retard, mais bon, tu es à l'hôpital, ils ne peuvent rien dire.
Enfin, ton tour vient. Quand tu t'installes, tu n'es plus qu'une boule de nerf, prête à pleurer à la moindre contrariété. L'interne, un brave gars, te paraît aussi angoissé que toi. Il ne parvient pas à mener l'examen à bien. La mort dans l'âme, il t'annonce qu'il doit appeler le médecin.
Toi, tu ne sais pas trop quoi penser, tu te rassures comme tu peux : c'est un étudiant, un élève, il apprend, il ne sait pas : tout va bien. Tout va forcément bien. Tu t'inquiètes forcément pour rien.
Lorsqu'elle entre dans la pièce, avec son air de bouledogue, tu te crispes. Sa tête ne te revient pas. Sa mine contrariée non plus : tu la déranges, tu en es sûre.
Elle pousse presque l'interne pour prendre sa place, et en deux trois gestes, complète l'examen.
Puis, sans le moindre état d'âme, presque comme si tu étais invisible, elle se tourne vers le pauvre garçon :
– C'est normal que tu ne voies rien, ce n'est pas une grossesse évolutive.
Ton monde s'effondre. Tu t'effondres.
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