Calandra
Je suis réveillé par une sensation humide sur mon visage. J'ouvre les yeux pour découvrir le visage d'une jolie jeune femme aux yeux campanule et aux longs cheveux noirs attachés en une queue de cheval.
- Êtes-vous une nymphe des bois ? lui demandé-je d'une faible voix.
Ses yeux s'arrondissent et ses joues s'empourprent, puis elle éclate de rire en déclarant :
- On m'a donné bien des noms, mais jamais on ne m'avait encore appelée "nymphe des bois". Vous n'êtes pas mort, m'informe-t-elle sur un ton plus sérieux. Je suis heureusement arrivée juste à temps.
Les images de mon combat contre les trois voyous me reviennent en tête et je l'interroge :
- Que s'est-il passé ?
- Je passais non loin de là où vous vous êtes effondré lorsque j'ai entendu des cris. Je me suis approchée précautionneusement pour voir ce qu'il se passait et j'ai bien fait, car en arrivant sur place, je vous ai trouvé allongé à côté de trois cadavres, en train de vous vider de votre sang. Je vous ai aussitôt amené dans ma maison pour vous soigner.
Je porte une main à ma blessure située sur l'abdomen et constate qu'elle est désormais bandée. J'en déduis qu'il en est de même pour ma jambe. Je me tourne vers ma sauveuse pour lui demander, avec étonnement :
- Pourquoi ne pas m'avoir amené voir un médecin ?
- C'aurait été tout bonnement inutile. Je n'ai pas de quoi payer un médecin et, en plus, je n'ai rien à envier à leurs connaissances et à leur savoir-faire.
- Comment est-ce possible ?
- J'ai été élevée par un médecin. Il m'a enseigné son métier. Il regrettait souvent que je ne sois pas un garçon car il avait conscience que personne n'accepterait une femme pour médecin. Les hommes nous en croient incapables, sauf lui. Il savait que j'en avais les capacités alors il m'a toujours encouragée dans cette voie. Son dernier conseil était même : "N'abandonne jamais tes rêves. Ne laisse pas les autres décider de ce dont tu es capable ou pas. Il n'y a que toi qui puisses réellement connaitre ta véritable valeur."
Une lueur de tristesse traverse ses yeux au moment où elle évoque son être cher. Je tente de me redresser, mais elle m'en empêche en posant ses mains sur mes épaules :
- Patience. Il vous faut du repos.
- Je n'ai pas le temps de me reposer. Je suis attendu.
- Est-ce important au point de risquer votre santé ?
- Oui, car la santé de plusieurs personnes est en jeu.
- Comment ça ?
- Les villageois du duché de mon maître ont besoin d'un médecin. Plusieurs d'entre eux sont gravement malades.
- Je peux vous conseiller quelques bons médecins qui étaient des connaissances de mon père, mais il vous faudra patienter avant d'aller les voir. . .
- Je n'ai pas besoin d'aller voir ces médecins. J'en ai déjà trouvé un. . . ou plutôt une. . .
Ses yeux s'écarquillent lorsqu'elle comprend mon sous-entendu et elle me demande, en se désignant du doigt :
- Moi ? ! Pourquoi moi ? Je ne suis même pas officiellement médecin, j'en ai juste les capacités. . .
- C'est suffisant. Le fait que je sois encore en vie est la preuve que vous êtes talentueuse dans ce domaine. Je n'ai pas besoin d'autres raisons pour faire mon choix.
- On dirait bien que, finalement, mon père n'était pas le seul à croire en moi, dit-elle en essuyant une petite larme qui perle au coin de son oeil.
- Et nous ne serons pas les seuls. Je suis sûr que mes maîtres et tous les habitants du duché partageront mon avis. La seule question qui reste est : êtes vous d'accord ?
- Bien sûr que oui ! s'exclame-t-elle en se jetant à mon cou, me faisant rougir par la même occasion. Mon rêve va enfin se réaliser. . . grâce à vous. . . Merci ! Merci infiniment. . .
- Robert. Mon nom est Robert, dis-je en posant une main sur son dos.
- Je suis enchantée de faire votre connaissance, Robert, déclare-t-elle en s'écartant de moi pour me regarder dans les yeux.
- Tout le plaisir est pour moi, mademoiselle. . .
- Calandra. Je m'appelle Calandra.
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