Sombres passés
Je me réveille en sursaut, couverte de sueur et les yeux humides. Je prends de grandes inspirations, comme si l'air me manquait, tentant tant bien que mal de retrouver mon calme. Mon coeur bat aussi vite que lors de cette terrible nuit que j'ai revue en songe. . .
Je pose une main sur mon front et ferme les yeux pour tenter d'oublier cet infâme souvenir, en vain. Je me revois dans cet étroit tunnel, pleurant de douleur en comprenant que la femme qui m'avait sauvé la vie venait d'être massacrée par nos assaillants ! Je me revois dans ce sombre passage secret, courant, malgré la fatigue, pour m'éloigner autant que possible du danger qui planait sur moi. J'ai couru, encore et encore, jusqu'à enfin sortir du charnier qu'était devenue ma demeure et me fondre dans la nuit.
Je revois les corps jonchant le sol, le sang tachant les murs et les flammes embrasant tout sur leur passage sans aucune pitié ! Les cris de rage, de peur et de douleur reviennent torturer mes oreilles ! Je sens mon corps trembler et les larmes me monter aux yeux.
C'est alors que j'entends, au milieu de tous ces sons d'antan, la voix de mon époux :
- Linaë ? Est-ce que tout va bien ?
Je tourne la tête dans sa direction pour le voir s'asseoir et me demander :
- Que se passe-t-il ?
- Je vais bien, le rassuré-je promptement en essuyant mon visage du revers de ma manche. J'ai juste fait un mauvais rêve.
Je sens ses bras m'entourer et m'attirer à lui, tandis qu'il me dit d'une voix rassurante :
- C'est fini. Je suis là. Il ne peut rien vous arriver tant que je suis à vos côtés, je ne le permettrai pas, je vous le promets.
Je me blottis contre lui pour mieux profiter de la chaleur de son corps et lui souffle :
- Merci, Mathieu. Merci infiniment. Je me sens déjà mieux.
Il se rallonge, sans me lâcher, et je sens bientôt sa poitrine, sur laquelle ma tête est appuyée, se soulever et s'abaisser au rythme de sa respiration endormie. Il est retourné dans le monde des rêves, mais je n'ai pas l'intention de le rejoindre, plus maintenant que j'ai fait ce terrible cauchemar !
Je pensais pourtant en être débarrassée, car je ne l'avais plus refait depuis le soir où j'étais enfin arrivée au château royal de Lakisle, mais il semblerait que la découverte du tragique passé familial d'Aurélie et Calista et des horribles parents aux côtés desquels mon mari a grandi ait fait ressurgir ces souvenirs enfouis. . .
On dirait bien que tous les habitants de cette demeure ont un sombre passé qui continue à les hanter sans relâche, comme s'il avait fait le serment de les torturer jusqu'à la fin de leurs vies et peut-être même au-delà. . .
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