Chapitre III. Passage devant Saint Pierre
Mercredi est arrivé, depuis le début de la semaine, je me remets dans le bain des cours qui reprennent déjà la semaine prochaine. Après une matinée remplie de physique, je me prépare pour ma sortie de cet après-midi. Nous nous sommes tous donné rendez-vous devant la cathédrale à 13h15 pour être sûr qu’Henri trouve. J’arrive vers 13h10 et j'aperçois Henri qui est déjà sur le parvis avec à une dizaine de mètres de lui, Thibaut un de mes amis. C’est vrai que j’aurais pu leur faire une description de lui. Je m’approche d’Henri, Thibaut étant plongé dans son téléphone :
— Hey, ça va ! T’es là depuis longtemps ?
— Ah salut ! Ouais, je vais bien, et je suis là depuis 12h50 environ.
— Quoi !? Mais pourquoi si tôt ?
— J’avais peur d’être en retard, dit-il en riant.
— Toi, tu vas bien t'entendre avec Thibaut, il est toujours en train de nous dire : “être à l’heure, c’est être en retard”. D’ailleurs, il est là-bas, vient.
On se dirige alors tous les deux vers mon ami. Une fois à son niveau, je lui mets une petite claque derrière la tête pour le sortir de son téléphone. Après un cri des plus masculins, il se lève et me rend gentiment le coup à l’épaule. Nous sommes rapidement rejoints par les trois manquant à l’appel qui arrivent vers 13h20 et prennent un savon de Thibaut. Je présente alors mes amis à Henri. Il y a Joachim, le matheux de la bande, pour le coup, c’est le seul d’entre nous. Amine, qui est une sorte de boute-en-train, ou plutôt le premier partant quand il s’agit de faire une connerie. Thibaut, qui comme il a pu le voir aime quand les choses se déroulent à la perfection, ce qui se voit à ses résultats d’ailleurs. Et enfin Élisa, qui est un peu la maman du groupe, on peut le dire.
À la fin des présentations Henri éclate de rire, nous le regardons tous avec des grands yeux rempli d'incompréhension, ce à quoi il me dit :
— Je suis désolé, mais ton groupe de potes, on dirait le début d’une mauvaise blague, dit-il en continuant de rire.
— C'est-à-dire ? lui dis-je interloqué
— C’est un juif, un musulman et un chrétien…
— Il est coupé dans sa phrase par Joachim et Amine qui explosent de rire à leur tour.
— C’est vrai que quand on y réfléchit deux secondes, ajoute Thibaut.
Les trois finissent de rire après une bonne minute à ne pas pouvoir s’arrêter. Je prends ça pour une certaine acceptation de leur part d’Henri dans le groupe. Il reste encore Élisa qui est restée assez silencieuse. Après cela, nous nous dirigeons tous vers le quai de la Loire. Nous y arrivons une quinzaine de minutes plus tard avec une marche tranquille. Nous nous installons en terrasse d’un bar, et une fois les commandes prises nous commençons à parler de tout et de rien jusqu'à ce qu’Élisa se lance dans son interrogatoire avec Henri.
— Et donc… Tu viens de Nantes ? dit-elle avec un ton beaucoup plus lourd que la conversation qui avait lieu jusqu'à maintenant.
La table se divise alors en deux entre Henri et Élisa, je suis au milieu de ce début d'interrogatoire qui est crucial si mon p’tit blond veut intégrer pleinement ce groupe. Eli sa, c’est un peu Saint-Pierre qui choisit qui entre ou pas quand on y réfléchit. Tout le monde se tourne alors vers Henri qui est encore en train de boire. Il pose son verre et répond sur un ton beaucoup plus apaisé :
— Ouais ! C’est ça et toi d’Orléans du coup, finit-il en riant.
— Tu as de l’humour, c’est bien, Bon t’es dans le même lycée que nous, mais tu connais déjà ta classe ou pas ?
— Ah, euh, nan, vous la connaissez ?
— Oui, pour l’instant, car il peut toujours y avoir des petits changements, ces trois zigotos sont dans la même classe, dit-elle en désignant Thibaut, Amine et Joachim, Marcus, et moi sommes dans la même classe. Sinon, pourquoi t’es venu ici, reprit-elle.
Sur cette question, le visage d’Henri laisse paraître une légère panique, il se recule dans son siège et croise les bras, après un petit temps, il répond la voix un peu hésitante :
— Ma mère voulait changer d’air et ouvrir son propre salon de coiffure.
— D’accord, dit-elle en reprenant une gorgée de son thé glacé.
Ce petit interrogatoire a continué pendant une ou deux minutes, j’ai pu également apprendre des choses, comme le fait qu’en plus de chanter, il joue de la guitare, je savais qu’il faisait du piano, mais pas ça pour le coup. Mais aussi qu’avec tout ça, il a le temps de faire du sport tous les matins. Nos verres terminés, nous décidons de partir nous balader et nous poser sur un banc sur le bord de la Loire. Nous parlons de tout et de rien pendant deux bonnes heures, d'ailleurs Henri s’intègre bien, il rigole bien avec le petit trio Joachim, Amine et Thibaut. Élisa reste elle un peu en retrait, sûrement parce qu’elle doit encore l’analyser. Alors que nous parlons, Amine se lève et nous fait comprendre que pour lui, il est l’heure de partir, Henri demande regarde sa montre et voit qu’il est déjà presque 17h, il se lève aussi et nous remercie pour l’après-midi. Ces deux sont suivis par Joachim et Thibaut dans la demi-heure qui suit.
Je me retrouve alors seul avec Élisa sur ce banc.
— Alors, que penses-tu de lui ?
— De qui donc ? dit-elle avec un petit sourire.
— Du pape ! Bah non Henri, tu sais très bien, j’ai bien vu que t’as essayé de l’analyser toute l’après-midi.
— Tout de suite les grands mots, j’ai posé quelques questions et c’est tout.
— Oui, si tu veux, et alors ?
— Bien… Il me paraît gentil, il plaît aux trois autres en tout cas.
— Il ne plaît pas ? demandais-je un peu inquiet.
— Je n’ai pas dit ça, mais j’ai l’impression qu’il cache un truc, enfin… je ne sais pas.
— D’accord, je n’ai jamais eu cette impression, mais on verra bien.
— Oui, mais du coup pour répondre à ta question, oui, je “l'accepte”.
Ces mots, me rassurent, j’aurais eu assez mal au fond pour moi, mais aussi pour Henri qu’il se fasse rejeter comme ça alors que la rentrée n’a même pas encore eu lieu. On continue de parler encore un peu avec Élisa, avant de nous quitter vers 17h40. Une fois chez moi, je réponds aux questions de ma mère sur mon après-midi, elle me demande qui est ce fameux Henri. Le fait que je lui dise que c’est quelqu’un que j’ai rencontré à la chorale à l’air de la rendre de bonne humeur. Si toutes ces années, j’avais su qu’il me fallait juste un pote qui va à l’église pour l’amadouer, ça fait bien longtemps que j’aurais tiré Thibaut avec moi.
Je rentre dans ma chambre, mais à mon plus grand désespoir, je ne peux pas tomber tel un roc tombant d’une falaise, sur mon lit, celui-ci étant déjà occupé par une magnifique masse velue autrement appelé Cardinal. Je me met donc sur mon lit en toute délicatesse pour ne pas le déranger dans son sacro-saint sommeil, une fois totalement mis, celui-ci lève la tête me regarde et descend du lit. Ce n'est pas que j’ai envie de l’amener à la SPA là tout de suite, mais un peu quand même. Mais bref, je regarde mon téléphone et je vois un message d’Henri :
— Salut ! Encore merci pour aujourd’hui, je m'étais pas amusé comme ça depuis longtemps.
J’ai un léger sourire en voyant son message, auquel je réponds aussi vite.
— Salut, de rien, c’était un plaisir, tu as fait bonne impression auprès de tout le monde !
— Ah ravi de l’entendre ! Élisa aussi ? J’ai eu l’impression de me faire analyser toute l’après-midi ahah !
— Oui, t’inquiètes, elle fait juste attention à nous ! Mais elle n'a pas réussi à tout voir haha, tu lui caches encore des petits secrets ahah !
Sur le coup, son temps de réponse fut plus long, ce qui n’est pas un problème, la chose qui me fait me poser des questions, c’est que durant les deux ou trois minutes qu’il a mis à répondre, “est en train d’écrire” s’affichait en bas de mon écran. Il a dû laisser ton téléphone deux minutes le temps de faire un truc. Il finit par me répondre :
— C’est mon côté mystérieux ahah, si t’es sage, tu le verras, dit-il accompagné d’un émoji clin d'œil.
Nous continuions un peu de parler avant que je ne le laisse pour aller manger.
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