Chapitre VIII : "Flirt approfondi"

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Le Lundi commença plutôt bien, lorsque qu’Henri m’interpella alors que je m'asseyais à ma table :

— Marius, c’est vrai ?

— Ça dépend de quoi tu parles, oui je fais un mètre soixante-dix-sept, non je ne suis pas Batman.

— T’es con, nan je parle de Madeleine.

— Ah ? T’as entendu quoi ?

— Bien que vous sortiez plus ou moins ensemble.

A cet instant précis je me suis dis que ce n’était pas possible le nombre de commères qu’il y a dans ce lycée. Et c’est vrai que je n’avais pas vraiment réfléchi au statut de ma relation avec elle. A ce stade je préfère dire plutôt “flirt approfondi”, une espèce d’entre deux. Mais ce n’est pas pour autant que je m’inquiète, connaissant la capacité de mes camarades à déformer les histoires dans tous les sens.

— Je ne dirais pas ça, je parlerai de “flirt approfondi”

— Mouais, ça me parait être un terme pour avoir un pied dedans et un dehors.

— Que veux-tu, je fais les choses bien.

— Ouais, je vois ça, c’est dommage marmonne-t-il.

— Pardon ?

— Nan rien.

La discussion s’arrête sur ça, le cours débutant, et surtout le sujet épuisé. Je profite de la récréation matinale pour aller voir Madeleine et lui demander ce qu’il en était de cette petite “rumeur” nous concernant. Face à ma question, celle-ci prit un air gêné et me dit qu’en réalité elle avait juste dit à une de ses amies que nous nous étions embrassés la veille, et que de là le bouche à oreilles et les déformations qui en découlent ont fait leur travail. Je profite de cette petite entrevue pour parler de ma vision des choses et donc de ce que j'appelle flirt approfondi, ce qui la fait bien rire, elle est cependant d’accord avec ma vision des choses et veut faire les choses au bon rythme également. J’ai pu remarquer au passage les quelques regards posés sur nous, accompagnés de moult chuchotements pendant que nous parlions. La capacité des gens à s’occuper de ce qui ne les regarde pas m’étonnera et m'énerve toujours. Le reste de la matinée s’est passé dans le plus grand calme, et ennui d’un cours de mathématique. C’est à la pause méridienne qu’un événement ramena de l’huile sur le feu des fans de ragots. Alors que nous prenions place tous sur une table comme à l'accoutumée, une bande de filles passe devant nous et l’une d’entre elles s’arrête à notre niveau : Madeleine. Et là, tel un instinct de défense animal, toutes les autres s'arrêtent et font demi-tour pour savoir ce qu’elle a. Elle les rassure et leur dit qu’aujourd’hui elle ne mange pas avec elles, ce qui provoque l’étonnement général tant de leur côté que du nôtre. Étonnement accompagné de quelques filles me fusillant du regard, en guise d'avertissement ou de menace, je ne saurai dire. La petite dizaine de fille s’en va à une autre table au compte-gouttes et Madeleine s’assied devant moi. Même si je dois dire que la situation me flatte, le fait d’entendre des petits bavardages sur ce qu’il vient de se passer m'énerve un peu. Madeleine me donne alors un petit coup de pied pour attirer mon attention et désigne mon téléphone du regard. Je regarde celui-ci et vois un message d’elle qui me dit d'arrêter de faire attention aux gens, ce qui me fait sourire. Il n’en faut pas plus pour qu’Amine se colle à mon épaule et me demande à qui je parle avec ce grand sourire. Toute la tablée le regarde avec des yeux de merlan frit. C’est alors que Madeleine lève un peu la main et dit :

— À moi.

Il se contenta d’un “Ah ok”, avant de devoir y aller, la sonnerie annonçant le début d’un magnifique cours de SES pour Amine Joachim et Thibaut. Il ne reste qu'à notre table Élisa, Madeleine, Henri et moi. Pour une raison que j’ignore personne n’ose parler jusqu'à ce qu’Élisa commence un micro interrogatoire de Madeleine, chose plutôt normale venant d’elle. Au détour des réponses de celle-ci, je vois Henri perdu dans ses pensées en train de jouer avec sa purée, mais je n’en prends pas plus compte et continue de suivre la session question réponse qui se déroule sous mes yeux. Et je peux dire qu’il se passe plutôt bien vu qu’Élisa et Madeleine commencent à bien rigoler, même si c’est en partie sur mes défauts, qui selon moi sont inexistants

Après cette session d’attaque plus qu'infondée, nous quittons Madeleine pour rejoindre le beau et doux monde du cours d’histoire-géographie, ou j’apprends qu’Élisa valide Madeleine. Même s'il n’y a rien de vraiment concret entre nous, c’est une information qui me fait plaisir. J’en profite ni une ni deux pour faire ressortir mon côté rebelle en sortant discrètement mon téléphone afin d’en parler à celle-ci et de lui proposer un nouveau petit rendez-vous. Malheureusement pour moi, j’aurais fait un piètre ninja et mon cher professeur tapant sur la table en s’exclamant :

— De Marincourt ! Téléphone !

Je lui donne donc mon téléphone et demande à Élisa de me rappeler de ne plus jamais utiliser mon téléphone en classe. Le reste de la journée suit son cours et je suis rejoint lors de la récréation par Madeleine qui me demande pourquoi j’ai soudainement décidé de laisser ses messages en vue. Je lui explique ma mésaventure et la séquestration de mon téléphone jusqu’à 17 h. Elle rigole et se moque de mon triste sort jusqu'à ce que la sonnerie signe la fin de cette petite entrevue. Elle me quitte en me donnant un simple baiser sur la joue et s’en va aussi vite qu'elle était arrivée. C’est à cet instant que je me retourne et vois Joachim Thibaut et Amine se moquer de moi, l’un en se faisant un câlin à lui-même et les deux autres en mimant le baiser sur la joue.

— Vous êtes vraiment immatures les gars….

— Peut-être, mais toi, tu es rouge pivoine, me dit Amine.

Je me rends alors compte qu’en effet, je rougissais pas mal en posant ma main sur ma joue.

— Nan, mais c’est le froid.

— Il fait trente-deux degrés, me glissa Élisa.

— Oui, bah, c’est bon hein, ça a sonné allez en cours ! Dis-je en partant d’un pas rapide.

Nous retournons tous en cours sous les railleries de mes trois comparses masculins. La journée se termine rapidement et je peux enfin libérer mon téléphone de sa séquestration chez le principal qui ne manque pas de me passer un petit savon. Puis je rentre du lycée à pied accompagné d’Élisa et Henri, Élisa qui nous quitte rapidement devant prendre une autre direction. C’est à ce moment que commence une sorte de blanc où personne n’ose parler où seuls nos bruits de pas sont présents. Je décide alors de sortir mon téléphone pour répondre à Madeleine à qui je n’avais pas répondu depuis le fatidique cours d’histoire. Mis à part les cinq derniers messages étant des interrogations de celle-ci sur mon mutisme soudain malgré le fait que les messages étaient considérés en vue, elle me demandait à quelle sorte de rendez-vous je pensais et quand. Je lui propose donc une sortie simple, et la discussion reprend sur les modalités de ce nouveau rendez-vous.

Soudainement, je me sens propulsé en avant, je tombe sur le dos et vois passer derrière moi une voiture klaxonnant. Je regarde sur ma droite et vois Henri le visage terrifié, c’est alors qu’il me dit :

— Putain Marius, je n'ai pas arrêté de te dire de ne pas traverser, t’as failli crever !

— Je… je ne comprends pas ce qu’il vient de se passer…

— T’as traversé en étant pris dans ton téléphone.

— Oui, je parlais à Madeleine, mais je n'étais pas si pris…

— ça fait une minute que je te parle que tu réponds avec des “hum”, et là t’as traversé comme ça, donc nan t’étais pas là !

Nous sommes rejoints par le conducteur qui s’est arrêté en warning une dizaine de mètres plus loin.

— Ça va les enfants ?!

— Oui, merci monsieur, et vraiment désolé pour ça, il ne faisait vraiment pas attention… Répondit Henri.

— T’es sûr ? Parce que tu saignes là.

Nous regardons tous le pantalon blanc d’Henri qui en effet est déchiré et rougis par le sang.

— Ah, je me suis juste écorché en tombant, ce n’est rien merci !

Suite à ça, l'homme propose de nous ramener chez nous, mais nous refusons étant donné que nous sommes à deux minutes de chez Henri. Nous nous relevons du trottoir, je ramasse mes affaires qui sont tombées, dont mon téléphone qui est assez mal au point. J’aide Henri à se relever et je le soutiens pour marcher jusque chez lui. Le hasard des choses fait qu’en arrivant devant chez lui son père rentrait des courses au même moment. Il sort de la voiture et se rue sur Henri lui demandant ce qu’il s’était passé et commence à parler de choses que je ne comprend pas. Son inquiétude me paraît sur le moment peut-être un peu dans la surréaction, mais ça doit être le genre de papa poule comme on voit parfois. Henri commence alors à le calmer et à lui expliquer ce qu’il s’est passé, le regard de son père se tourne alors vers moi, et, je vois dans celui-ci un mélange de colère, de joie, d'inquiétude et peut-être un peu de méfiance. Il me réprimande alors un peu sur mon manque d’attention et ouvre la porte et m’invite à rentrer avec eux, ce que je refuse poliment, mais il me fait remarquer que je suis également amoché au niveau des bras et qu’il faut désinfecter.

Je me retrouve alors dans le salon salle à manger, assis sur une chaise à me faire désinfecter les mains par le père d’Henri. Je me sens d'ailleurs ridicule de faire la grimace quand on m’applique le désinfectant alors qu’Henri lui n’a même pas bronché une seconde malgré le fait qu’il soit vraiment bien amoché. Nos blessures soignées et un verre de jus gentiment offert par le père d’Henri. Celui-ci me ramène chez moi en voiture, tout en me disant de faire plus attention à l’avenir, ce qui je dois l’avouer est mérité un minimum. Après quelques minutes de trajet il me dépose devant chez moi et repart en me saluant de façon un peu plus chaleureuse qu'à notre rencontre.

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