77. Franck, pervers démasqué et dénudé

9 minutes de lecture

Rafaela

Je grimace alors que ma tête cogne contre je ne sais quoi et sursaute en me sentant balourdée. Mais qu’est-ce qu’il se passe ? Je me rends compte qu’outre mon crâne qui valdingue, j’ai également un bon petit marteau qui cherche à me fracasser. J’ai mal à la tempe et je n’arrive même pas à bouger. Putain, qu’est-ce qu’il se passe ?

Je me sens oppressée et privée de tout mouvement ou presque, et ce n’est pas de mon fait. Mes mains sont ligotées l’une à l’autre, mes pieds aussi. Je peux bouger les hanches mais je ne peux pas me tourner. Mon buste est attaché à quelque chose, je ne parviens pas à bouger les épaules… J’ai le ventre à l’air, je suis bâillonnée et je ne vois rien. Je pense que j’ai un tissu sur le visage, mais je ne suis sûre de rien, j’ai la sensation que mes sens sont à moitié paralysés, endormis, ou qu’ils se sont volontairement mis en veille pour que je ne réalise pas les choses telles qu’elles le sont. Je me croirais presque dans un film. Oui, je me suis déjà retrouvée dans cette posture et mon personnage en prenait pour son grade avant d’être sauvée par un beau héros qui était aussi l’homme de sa vie. Ouais… un film. Là, c’est la réalité. Ou alors, je suis en train de rêver ? Je fais un cauchemar ?

Les choses me reviennent en tête lentement tandis que je comprends que je suis en voiture aux sons que j’entends comme aux mouvements que mon corps subit. Bien joué, Rafaela. Quelle bonne idée d’aller courir seule au lever du soleil ! Tu voulais prendre l’air, te voilà enfermée dans une bagnole avec quelqu’un que tu ne connais même pas, ou qui n’a même pas un semblant de respect pour toi. On ne traite pas les gens comme ça, enfin ! Et pas besoin d’être une Diva pour le penser. Qui a bien pu faire ça ?

Mon cerveau cogne dans ma tête et j’essaie de réfléchir à ce qu’il s’est passé pour que j’atterrisse ici. Les liens ont du mal à se faire, mais l’image de ces yeux me revient en tête. Des iris bien reconnaissables que j’ai vus au quotidien pendant deux mois… Comment il s’appelle, déjà, ce technicien lumière ? Et pourquoi est-ce que j’ai l’image floue du fan que j’ai croisé à la librairie ? Celui qui m’a parlé d’Edmond Dantès… Mince, comment j’ai fait pour ne pas le reconnaître et faire le rapprochement ? Et donc… donc, ce type est dingue et vient de m’enlever ? Est-ce que c’est lui, le fan fou ? En tout cas, je suis dans la merde, c’est sûr. Qui va bien pouvoir se rendre compte que je suis absente ? Je passe mes journées dans ma chambre ou dans mon bureau, et il n’y a plus qu’Ellen et Phillip qui bossent pour moi… Phillip qui bosse essentiellement dehors… Ellen que j’évite comme la peste, encore en colère de son omission. Donc, concrètement, personne ne s’inquiètera de mon absence avant au moins trois jours, date où je suis censée rencontrer à nouveau le réalisateur du docu-fiction.

J’ai l’impression d’être deux fois plus secouée durant quelques minutes et mon palpitant s’emballe encore davantage quand la voiture se stoppe. La portière claque, la panique me gagne. Qu’est-ce qu’il va me faire ? Où est-ce qu’il m’a emmenée ? Pourquoi m’enlever ? J’ai envie de hurler, de rage, de peur… Je voudrais retourner des heures en arrière, des jours, même. Oui, je veux effacer les derniers jours, revenir à ce moment où je me sentais si heureuse et épanouie. Je veux retrouver Ben, discuter avec Ellen, rire avec Phillip. Et plus que tout, je veux retrouver les bras d’Angel.

— Lâchez-moi ! m’égosillé-je en me débattant alors que deux mains se posent sur mes chevilles et me tirent hors de la voiture.

— Ne t’énerve pas, c’est moi, mon Amour. Tu es saine et sauve, enfin loin de ce pervers qui te voulait tant de mal. Je t’aime et nous voilà enfin réunis ! Tu vas être heureuse, je te le promets.

Wow… Impossible de ne pas faire le lien entre le fan fou et lui, après ça. Comment est-ce que je vais faire pour me sortir de ce guêpier, moi ? J’ai envie de vomir alors qu’il m’attrape par les hanches pour me lever. Un frisson me traverse tout le corps, suivi d’une grimace quand mes yeux sont frappés par le soleil qui éclaire au-dessus d’un lac qui pourrait être magnifique et agréable si je n’étais pas avec ce type, qui est effectivement le mec qui bossait sur le plateau de mon dernier film… C’est dingue, comment est-ce qu’on a pu passer à côté de ce gars, ne se rendre compte de rien ? Comment a-t-on pu ne pas voir ce regard un peu fou, ces yeux qui me dévorent littéralement ? Bon dieu… Angel en Sherlock ? Tu parles… On l’avait sous le nez depuis le début ou presque. De vrais aveugles !

Je m’apprête à m’énerver quand je réalise que ce n’est sans doute pas la bonne solution pour éviter un nouveau coup sur la tête. Pour autant, s’il pense que je vais me laisser faire, il se trompe totalement, lui. Sérieusement, il pense vraiment que je suis folle de lui ? Que je n’attends que ça, d’être avec lui ? Mais on ne se connaît même pas !

— Pourquoi est-ce qu’on est là ? Vous voulez bien me détacher ? Ça me fait mal aux poignets, dis-je aussi doucement que possible alors qu’il est accroupi devant moi pour enlever les liens sur mes chevilles.

— Eh bien, tu m’attendais depuis si longtemps, il fallait que j’intervienne enfin. On sera tranquilles pendant un moment, ici. On est les seuls à être dans le coin, on ne sera pas dérangés ! On va pouvoir s’aimer sans contrainte !

Je regarde autour de nous et constate qu’effectivement, la petite cabane, qui pourrait être d’un romantisme sans nom si je m’y trouvais avec Angel, est vraiment esseulée dans ce paysage, entre arbres et plan d’eau. De plus, la route n’est pas visible et le chemin s’enfonce dans la forêt, je ne suis pas près de pouvoir rejoindre la civilisation pour demander de l’aide.

— Je ne connais même pas votre nom, soupiré-je alors qu’il m’attrape par le bras pour m’entraîner dans la petite maisonnette.

— Je m’appelle Franck, ma chérie. Je suis content de voir que tu es déjà moins réticente. Tu vas voir, une fois que tu m’auras découvert totalement, tu ne pourras plus te passer de moi.

Là, j’ai un gros doute… mais il va bien falloir que je joue le jeu, non ? En tant qu’actrice, ça ne devrait pas être si difficile que ça, si ? Honnêtement, j’ai tellement la trouille que je doute d’être convaincante… Je risque de finir harcelée, violée et découpée en morceaux. Crime passionnel… Mon dieu, encore une fois, digne d’un film. Un bon thriller qui finira mal. Et j’en suis l’actrice principale, sans avoir de texte à apprendre. Improvisation totale, et vraies émotions, vrai sang, vraie vie. Vraie captivité, aussi. Il faut que je me barre d’ici, je ne vais pas tenir deux jours dans cette position.

La cabane est plutôt rustique et aménagée rudimentairement, le strict minimum se trouve dans la pièce de vie et il n’y a qu’une porte ouverte qui donne sur la salle de bain… Donc, juste un canapé qui doit se changer en lit. C’est bien ma veine, ça. Il est vraiment dans le délire des amoureux… OK, Angel avait sans doute raison, il est capable de tout.

— Est-ce que… est-ce que je peux aller me doucher ? J’ai couru, je me sens toute poisseuse…

— Tu n’as pas vraiment couru, répond-il immédiatement. Tu m’as juste sauté dans les bras. Pourquoi te sens-tu si sale ?

Mon cerveau carbure à vive allure pour trouver une réponse qui lui conviendra et saura le convaincre de me laisser seule.

— Je… Je ne me suis pas douchée hier soir, et puis… j’ai fait du Yoga, cette nuit. Vous… Tu vois ? Je voudrais être toute propre.

— Ah mais tu sais, ça ne me gêne pas que tu sois couverte de sueur… C’est naturel. Mais je ne veux pas non plus te mettre mal à l’aise pour notre première fois. Va donc prendre ta douche, mais fais vite, je suis prêt pour toi.

Il conclut en faisant tomber son pantalon pour dévoiler son sexe dressé. Ce type est vraiment un gros malade et je ne me fais pas prier pour lui tourner le dos et aller m’enfermer dans la salle de bain… qui n’a pas de verrou. Je suis gâtée, c’est pas possible. Je regarde autour de moi, le dos contre la porte, et constate que la fenêtre est minuscule. Impossible de sortir par là. Dans cette pièce aussi, tout est minimaliste. C’est la galère. Genre, la grosse merde, et je me dépêche de me déshabiller et de me glisser sous la douche pour ne pas le faire attendre. J’ai trop peur de le voir débarquer et me tripoter… Bon sang, comment est-ce que je vais pouvoir me sortir de là ? Et déjà, comment faire pour ne pas me retrouver à copuler avec ce dingue ?

Je me frotte vigoureusement la peau comme si le simple contact de ses mains sur mon corps m’avait marquée. Il veut qu’on couche, mais il est hors de question que je le laisse m’approcher ! Comment peut-on partir dans de tels délires ? Il doit clairement avoir un problème psychologique, on ne peut pas aller s’imaginer que quelqu’un qu’on ne connaît pas nous aime, aller jusqu’à monter un plan pour kidnapper la personne et croire qu’elle va vivre tranquillement dans cette cabane sans se rebeller, quand même ?

Je fais un bond dans la petite douche et manque de m’étaler en entendant frapper à la porte. Putain, même ici, je n’aurai pas la paix.

— J’arrive ! Une minute, j’ai presque fini !

Il faut que je me sèche et me rhabille avant qu’il entre… Il faut que je trouve une excuse pour ne pas le laisser m’approcher, il faut… que j’arrête de paniquer et que je me concentre.

Je sors de la douche et pousse un cri qui n’a rien de gracieux en constatant qu’il est déjà là… Franck, je sens que je vais détester ce prénom et sans doute haïr encore plus celui qui le porte. Edmond, gentil fan, c’était quand même plus sympa, non ?

— Qu’est-ce que tu fais ? Je… j’ai dit que j’arrivais, bafouillé-je en attrapant la serviette sur le portant pour m’enrouler dedans.

— Je suis prêt, ma Chérie. Regarde comme tu me fais bander ! ajoute-t-il en se collant dans mon dos, son horrible sexe pressé contre mes fesses. Maintenant que tu es propre, on va pouvoir s’aimer.

— Je… Peut-être qu’on peut prendre notre temps, non ? Je veux dire… Apprendre à se connaître un peu plus ? Je pourrais nous préparer un petit repas, peut-être…

— Oh ! Tu veux me faire à manger ? Mais c’est trop mignon, ça ! Tu es sûre que tu ne veux pas profiter de moi, avant ? Tu préfères me garder pour le dessert ?

— Heu… Vraiment, Franck, j’ai besoin de prendre mon temps, tu sais ? Je ne voudrais pas brusquer les choses, et puis… tu sais, plus on patiente, meilleur c’est.

Je le vois grimacer à mes côtés et j’ai peur qu’il se jette sur moi, mais il se contente de caresser doucement mes seins. J’essaie de cacher la révulsion que ce simple geste crée chez moi et lui adresse un sourire aussi vrai que possible dans les circonstances.

— D’accord, mon amour. Fais-moi à manger alors. Mais nue. Je veux au moins pouvoir admirer le spectacle.

Je mets quelques secondes avant d’acquiescer. Il faut que je me positionne comme une actrice. J’ai déjà tourné des scènes où j’étais totalement nue, devant plus de personnes que ça. Bizarrement, l’idée de vivre nue me plaît beaucoup moins ici que d’ordinaire, et je risque de regretter mes vêtements, contrairement à d’habitude où je les abandonne dès que possible… Mais je dois jouer le jeu, au moins le temps qu’Ellen et Phillip remarquent mon absence. Seulement, je me demande bien comment on va pouvoir me retrouver. Après des semaines d’enquête, Angel et son assitante n’ont pas réussi à mettre la main sur lui. Comment vont-ils pouvoir remonter sa piste et me retrouver dans ce coin perdu ? Ouais, je suis vraiment dans la merde, et c’est peu dire.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire XiscaLB ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0