Chapitre 16
Joan,
Après le café,
Son regard m’a déstabilisé. Elle m’a vu. J’ai même cru qu’elle m’avait reconnu. Mais comment aurait-elle pu ? Je ne suis qu’un souvenir flou de ses rêves ou à la limite qu’une voix qui flottait dans sa tête.
Pendant 3 minutes je suis resté devant la porte, William me hurlant dans les oreilles de bouger de là, au risque de passer pour un malade mental en plein bug.
Alors je cours jusqu’à chez moi. N’étant toujours pas assez épuisé pour calmer toutes ces pensées, je me change, enfile un jogging et me décide à aller courir au Parc Borely. C’est une passion que je partage avec Lilly. Courir plus vite, plus fort, sentir les hormones se propager dans le crâne et l’anesthésier. Les voix et les doutes deviennent moins fortes. Cette brulure dans le ventre aussi est agréable. Elle tue tous les papillons.
Je ne peux pas rester ici, ma présence n’a aucun sens. Je me fais du mal, parce que je ressens ce sentiment renaître chez elle : l’amour. Elle devient fragile mais à la fois magnifique. C’est lorsqu’elle tombe amoureuse qu’elle est rayonnante et plus ouverte, comme une jolie fleur qui renait à chaque saison.
Mon appartement est situé à la limite des quartiers nord, dans un appartement au deuxième étage. Sur le palier nous ne sommes que deux à nous partager un petit studio d’une trentaine de mètre carré. Il est à la fois assez grand pour ne pas se sentir à l’étroit, mais assez petit pour ne pas se sentir seul. De toute façon, les murs sont assez fins pour ne jamais avoir le sentiment de l’être.
- William ? T’es encore là ?
- Ouais mon pote je te surveille, je te rappelle que ta présence peut détruire tout l’équilibre que je suis en train d’établir pour Lilly.
Lilly. Jamais je ne pourrais risquer de lui faire du mal. Elle en a assez bavé.
- Tu penses que je devrais m’éloigner ? Pour les 7 ans qu’il ne reste à vivre comme un mortel ?
- Où pourrais-tu aller ? Ton implication pour ce dossier était tellement important que tu n’as pas forgé des liens assez puissants avec tes autres protégé pour sentir leur présence.
Je me prépare à lui répondre de manière cinglante, mais il n’a pas tord. Lilly a été ma priorité dès l’instant où j’ai lu son nom sur ce dossier. Je savais qu’il comporterait des challenges, mais pas au point de subir cette punition. Dans mon ancienne vie, William serait mort. Je pense que la leçon est là : changer mon pattern, grandir, apprendre pour la prochaine vie.
- Je ne peux pas partir d’ici, même si je le voulais. J’ai comme un mauvais présentement tu sais, comme si quelque chose allait surgir, genre un tsunami, un tremblement de terre ou je ne sais quoi qui va faire basculer la vie des gens.
- C’est étrange que tu dises ça, c’est exactement ce que je ressens depuis quelques jours.
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