Lily,

Peter entrouvre sa fenêtre, je ressens son malaise. Nous étions dans notre monde qui vient de s’écraser contre la météorite de la réalité.

• Mec t’as oublié qu’on devait célébrer ton futur poste ?

Mon regard se tourne vers Pete. De quel poste parle-t-il ? Tout d’un coup, je me sens étrangère à Peter et réalise combien ce dernier a passé du temps à m’écouter, même dans mes silences, à être présent, à me soutenir, sans pour autant en attendre de même en retour.

J’avais totalement oublié qu’après cette année, il faudrait chercher quoi faire de nos vies. Choisir une entreprise, un poste qui nous définira pour le restant de nos vies. Comme le choix de nos études, celui de notre premier poste à une importance cruciale.

• Comment vous avez su ? Et non, je ne pensais pas qu’on fêterait ça, et encore moins ce soir, dit-il en m’attrapant la main.

À travers cette action, il montre qu’il avait d’autres plans qui m’incluait. Auprès de Pete, je n’ai jamais ressenti cette peur d’abandon, ni qu’il puisse me faire du mal. J’ai toujours eu la douce impression que mon bonheur et mes besoins passaient en premier plan dans sa conception de la vie, et ce, bien avant que mes lèvres rencontrent les siennes.

Peut-être est-il comme ceci dans l’unique but de m’avoir ? Mais il n’avait aucune certitude à l’exception de ce soir, que ce jour arriverait, étant donné que je m’interdisais de m’y risquer à nouveau.

• Pete, je t’assure, on peut reporter notre soirée, et passer celle-ci avec tous tes amis. Ils ont l’air de vouloir partager cette nouvelle avec toi. Cela pourrait être une bonne idée aussi ?
• Lil, je sais que tu n’as pas envie de cela…
• Je veux célébrer aussi ta réussite, et nous pouvons attendre encore un peu non ?

Pete encre son regard au mien, pour analyser si mes mots sont en cohérence avec mes sentiments. Ce qu’il ne sait pas c’est que j’ai des années d’entrainement dans ce jeu là et que plus personne depuis Sylvie, cette femme pompier, n’a su lire dans le reflet de mon âme, la vérité.

• Tu es sûre ?
• Oui, Pete. Allez ouvre ce portail, qu’on fasse la fête !

J’entends Lucas avertir les autres que la soirée va pouvoir se poursuivre, et le reste de la bande se met à hurler et à sauter partout.

Ma seule motivation est que je vais pouvoir continuer de boire pour chasser les démons, m’endormir dans le lit de Peter et me sentir en sécurité quand son bras s’enroulera autour de mon corps endormi. Je n’aurais plus besoin d’être en alerte, de ce sursaut pour me maintenir réveiller, ni de subir ce sommeil superficiel afin d’être consciente au moindre bruit.

Quand tu as trop peur de fermer les yeux, parce que cela t’obligerais à rêver. Parce que tes rêves te ramènent toujours là où tu as échoué, te remémoreront les pires moments, tes pires angoisses. C’est horrible quand la vie te tient éveillée, pour tout sauf les bonnes raisons.

Le portail s’ouvre. La grande maison de Peter nous fait fasse. Les voitures de ses papas ne se trouvent pas dans l’allée ce qui donne la première place à la Mini Cooper de Peter.

Vont-ils rentrer ce soir ? J’adore ses papas, et me réveiller en les trouvant amoureux tous les matins dans la cuisine m’a aidé à combattre mes peurs des hommes et m’ont redonné espoir d’avoir un jour, un grand amour qui m’épaulera dans la construction de notre famille.

Jusqu’à présent je haïssais les hommes de m'avoir rendu si peu confiante, je les détestais de m'avoir rendu si insécure. Aujourd’hui, un sourire nait sur mon visage. Je me sens chez moi ici, dans cette ville, dans cette maison vie, dans cette vie, auprès de ce garçon.

Pendant que chacun de se amis se débarrassent de leurs habits et chaussures, je me dirige vers le fond du salon où se trouve l’enceinte. Pendant que celle-ci se connecte à mon iPhone, un mouvement derrière la bais vitrée attire mon regard. C’est un homme, je dirais d’une trentaine d’années. Il nous fixe depuis l’extérieur.

Le temps que je me retourne pour voir si je suis la seule à mettre rendu compte de sa présence, l’homme a déjà quitté le jardin.

Je sens une main m’attraper par la hanche et me tirer vers le salon, pensant naïvement que c’était Peter, je suis surprise de constater qu’il est en pleine conversation avec un autre de ses amis, Valeri, si je ne me trompe pas. Lui et sa famille sont russes. Ils ont fui le pays pendant les guerres qu’ont connu le pays et la famine. Il est très grand, très musclé mais n’a jamais fait usage de sa force. Il est très calme et revendique que pour se distinguer des animaux il faut chasser nos instincts primaires. J’aime son discours. J’aime encore plus assister à cette scène et voir Pete acquiescer à beaucoup de valeurs qui me sont chères.

Je repousse Lucas, avec un sourire.

• Lucas, tu es a combien de bières ce soir ?
• Assez pour réaliser combien tu es belle, et capter ce qui attire Peter.
• Tu es adorable, merci,

Non, il ne l’est pas, mais j’ai appris au fil des années que certaines batailles ne méritent pas de se battre et que parfois, la meilleure technique pour mettre fin aux combats est de donner le sentiment à l’adversaire qu’il a gagné.

• Oh, où vas-tu ? Accorde moi une danse !
• Je ne sais pas danser, Lucas, c’est dommage que tu n’ai pas emmené ta copine,
• Oh ça va, il n’y a que toi comme fille ici, tu vas devoir donner un peu de ta personne pour nous divertir.

Son regard me ramène 10 ans plus tôt. Quand j’avais le sentiment de n’être qu’un corps conçu pour divertir, assouvir les besoins d’un homme. Je sens mon poing se serrer et je m’apprête à le cogner lorsque Peter intervient.

• Eh Lucas, si tu appelais les filles pour se joindre à nous ? Lil doit se sentir un peu seule, tu ne penses pas ?
• Mec, trop bonne idée, tu pourras garder cette bombe rien que pour toi !

Pete garde le silence, mais je ressens que sa haine est aussi forte que la mienne. Je sais combien il a hâte de quitter cette ville, de quitter cette vie, et je ne peux que comprendre ses sentiments. J'ai connu ce sentiment. Contrairement à lui, c'est ici que je me sens le mieux. Il se tourne vers moi, baisse les yeux vers moi, et le monde s’arrête. Je réalise que mon coeur est bien plus épris que ce que je pensais. Je ne contrôle plus rien lorsque son odeur parvient jusqu’à mes narines, jusqu’à ce que sa chaleur corporelle m’atteint. Peter a tout pour lui, il n’a rien à faire avec une fille abimée comme moi.

Je ne peux pas en parler ce soir, l’alcool est bien trop émotive et risque de tout gâcher.

• Il y avait un homme dans …
• Pete, le livreur de pizzas est là, t’as du cash ?

Pete soulève son doigt pour m'indiquer qu'il revient et que la conversation n'est pas finie. Il m’abandonne deux petites secondes, mais malgré le bruit aux alentours et aux nombres de personnes dans le salon, l’espace me semble tellement vide.

J’entends également des voix féminines dans le couleur de l’entrée, je suppose qu’il s’agit des filles de leur groupe, et que la fameuse fille que j’avais aperçu le premier soir doit faire parti du lot.

Evidemment qu’elle est là, et même si je ne l’avais pas reconnu, son attitude l’aurait trahi. Dès qu’elle m’aperçoit dans le salon, elle se retourne en furie pour avertir ses copines de ma présence. J’ignore son comportement puérile, et me ressert un verre de vin issu de la cave des papas de Peter.

Je ne sais pas combien de temps s’écoule avant que la pièce soit complètement remplie, je réalise même que les papas de Peter sont rentrés et semblaient être au courant pour la soirée. Daddy agitent les bras en regardant Pap’s. Ils sont si mignons et dégoulinent d’amour que je me retrouve entre deux salles, deux ambiances.

Fatiguée de supporter les jeux d’alcool débiles et les potins des filles, je décide de les rejoindre.