La claque (15)
- Qu’est-ce que ces Mexicains font devant chez moi ? vociféra Donald Moumoute à Paul Robson qui à cause du boucan des pales dut faire un effort considérable pour comprendre sa phrase.
L’hélicoptère amorçait sa descente devant la maison blanche. C’était le transport de prédilection du number one quel que soit le chemin à parcourir. Deux rues à traverser et hop, on s’envolait ! En l’occurrence, l’engin revenait d’un fast food tout proche. Le président avait eu une envie pressante et comme il adorait manger sur place et taper la commande sur l’écran tactile...
- Je doute que ce soient des Mexicains, mister president, l’informa son conseiller en reconnaissant à travers le hublot le chef d’État français escorté de trois de ses ministres.
- What ?
- Je dis : je doute que...
Mais l’homme trépidant sauta de l’appareil, il avait un tweet à envoyer à ce suppôt de Satan du Turkménistan du nord. Ses six big macs dans le ventre l’avaient inspiré et requinqué ! Il pétait le feu et l’autre allait voir ce qu’il en coûtait de menacer de détruire la Maison blanche.
- Donald ! hurla Manuel Trèbon en courant à sa rencontre. Derrière lui, ses trois ministres eurent beaucoup de mal à rester dans son sillage. Surtout celui des affaires étrangères, Jean-Yves Le Brillant qui brillait de moins en moins avec l’âge et supportait difficilement la chaleur ambiante, proche des trente-cinq degrés.
- Donald ! répéta l’infatigable trentenaire (dont la devise était : si à quarante ans tu ne deviens pas président de la République, tu as raté ta life !). Je viens d’apprendre que tu allais faire la guerre au Turkménistan du nord ! La France peut t’aider ! Nous avons un sous-marin indétectable qui navigue dans le secteur. Et notre porte-avions est sur le point d’être opérationnel ! Donald ! Donald ?
Mais le vieux lion passa devant le jeune coq sans même le regarder. Lorsqu’il atteignit le perron, il susurra à son service d’ordre : « Empêchez ces chicanos de pénétrer ici. Je connais ces sans cent (équivalent anglais des sans dents). Ils prendraient vite leurs aises et établiraient leur bidonville dans le bureau Ovale.
Deux malabars en costumes noirs se postèrent devant l’entrée de la Maison blanche, s’ajoutant aux deux agents de sécurité déjà présents. Autant le dire tout de suite : un mur ne l’aurait pas mieux condamnée.
Livide, Manuel Trèbon clignait des yeux comme après un mauvais rêve.
- Il... Il ne m’a même pas regardé.
- Je dirai pas ça, majesté, tenta de nuancer Bruno Ledéputé. Je dirai que...
- Si, si, il ne m’a même pas regardé, insista l’élyséen prépubert en mode zozotement et poings serrés.
- Peut-être était-il préoccupé par le conflit à venir, suggéra Christophe Castagnette qui craignait un nouveau caprice.
- Où est Jean-Yves, demanda subitement le zébulon du pouvoir.
Les deux ministres regardèrent derrière eux.
- Il arrive, dirent-ils en chœur.
Les traits tirés et le visage luisant de sueur, le ministre des affaires étrangères s’intercala péniblement entre ses deux collègues.
Hochant de la tête, le Rastignac picard sourit.
- Très bien. On ne va pas se laisser abattre, décréta-t-il. On passe au plan B.
- Au plan B ? s’écrièrent les trois serviteurs du roi avec surprise.
- Oui, on va rentrer dans ce bâtiment par la ruse !
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