Les chats

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J'aime les chats, mais à condition. Ni leurs griffes ni leurs crocs, ni les souris en cadeaux ne m'en éloignent. C'est autre chose qui me répugne : ce musc impossible qu'ils déposent partout, d’ammoniaque et d'urine. La sueur quelques fois ressemble à cela, comme si l'effort marquait son territoire.
Quelques hommes, comme les chats, sont insupportables à sentir, dont la peau d'aigre s'habille et l'haleine lourde est chargée d'un souvenir mort, de quelque chose d'atroce : la pourriture des corps.
Je pardonne aux bébés l'acide émanation d'un lait digéré quand, fétide, le liquide se dépose sur mon linge. Lui qui avait encore dans ses fibres le fumet du vent.

J'entre en apnée et je fais vivre d'autres effluves...

Sur les volutes s'enroulant dans l'air se posent les miettes d'un croissant doré, comme elle se lève dans le four, la pâte roussie éveille mon appétit, la travaille au corps et gouverne mon esprit. Ainsi procède chaque douceur à dévorer. Qu'elle soit salée ou sucrée la nourriture a un filet, comme un appât, un arôme qui lui est propre et réveille ma faim en sommeil.

Il est d'autres faims qui trouvent leurs satiétés ailleurs que dans l'assiette ; quand mes pas se posent sur la terre moelleuse habitée d'odeurs cachées. Les petites molécules à cheval sur l'eau en gouttelettes, chevauchent les hauteurs et portent leurs fragrances à mon nez. Un rien ferreux, un rien décomposé, le végétal enferme les parfums de la vie, les laideurs de la mort et dans une danse improbable s'évapore et augmente la joie d'une promenade, la caresse d'un air frais.

Des poisons chimiques se déguisent, proposent parfois un visage irrésistible. Mon homme me chavire quand il les dépose sur sa peau : un lit de vanille et de santal, bordé de cèdre et d'oranger, de cannelle, de menthe poivrée… le voilà qui se faufile, pénètre les galeries de mon nez enchaîne mon désir, m'entraîne dans ses contrées. Les toxines rampent masquées dans les pores de son derme, charmant ainsi mon épiderme d'un frisson de plaisir.

Quelques fois, le laid porte beau et le beau porte laid, il en est de l'odeur comme de la vie : rien n'est simple, mais tout me nourrit

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