chapitre 12 - Eva

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J'ouvre un œil et le ferme aussitôt sous la douleur. J'enfouis mon visage dans les oreillers en gémissant. C'est pas possible d'avoir autant mal. Je me suis fait rouler dessus hier soir en rentrant du bar. Je dois avoir des bleus, des contusions. J'ose pas me regarder, de toute façon je n'arrive pas à ouvrir les yeux. Je me mets un oreiller sur la tête essayant vainement de calmer le marteau piqueur qui me vrille les tympans.

- Alors mouton, on a la gueule de bois ? me murmure une voix grave.

Grrr... je déteste ce mec. Je déteste sa voix qui pourtant résonne à mes oreilles comme un baume. Son corps chaud s'approche de moi, et je me retiens de ne pas coller mon visage contre sa peau, comme un cataplasme à ma migraine.

Il faut qu'il se casse.

- Ferme-la, grogné-je entre les dents. J'ai dû me faire renverser par une bagnole, hier soir... Je n'arrive plus à bouger.

- Tu crois vraiment que c'est une voiture qui t'a fait ça ? rit-il doucement. Tu n'as vraiment aucun souvenir de notre nuit... Je ne sais pas comment je dois le prendre.

Je me redresse sur un coude, soufflant sur une mèche qui barre mon visage. Les rayons qui traverse la pièce me transpercent les yeux et je dois cligner plusieurs fois des paupières pour voir le spectacle indécent qui se trouve devant moi : Jay au saut du lit avec un simple boxer pour tout vêtement. Beaucoup trop de peaux, de muscles, une odeur boisée qui émane de son corps, ses cheveux en bataille et son sourire charmeur. Son regard s'attarde sur mon soutien-gorge push up que j'avais mis sur un coup de tête la veille. À ma décharge, je n'avais pas prévu de sortir. Je baisse mon regard plus bas et vois que je porte toujours ma culotte. Je soupire de soulagement, même si me savoir en sous-vêtement à côté de Jay... en sous-vêtement lui aussi n'a rien de bon pour la suite. Mais on n'a pas couché ensemble la nuit dernière.

Jay n'a pas bougé et me regarde, avec ce regard, vous savez ? Celui qui vous appelle et qui pourtant vous retient. On est dans le même lit et je ne songe qu'aux choses scandaleuses que je pourrai faire avec mon camarade de chambre. Le monde est injuste ! Des images sulfureuses passent en boucles dans ma tête. Mes yeux glissent sur ses larges épaules, ses abdominaux sculptés. Qu'est-ce que cela me ferait si je les touchais ? Merde ! J'ai vraiment trop envie de toucher Jay, de sentir sa peau bronzée sous mes doigts. Je me mords la lèvre et essaie d'ignorer tous les symptômes d'un désir violent. Je serre les cuisses et me lève pour aller dans la salle de bain.

Je titube en me levant. Mon corps ne veut pas s'éloigner de Jay, tout mon être me crie de rester dans ce lit et de m'enrouler autour de cet apollon.

- Je vais prendre une douche....

…bien froide.

Je mets le mitigeur au plus froid et lance l'eau glaciale sur ma peau. Je suis dingue de faire ça, mais c'est probablement la seule chose à faire pour m'enlever Jay de la tête. Je reste longtemps, espérant qu'à ma sortie, il n'y aura plus de Jay. Que cette colocation impossible ne serait qu'un mauvais rêve. Que je ne serai pas en train de tomber physiquement amoureuse du meilleur pote de mon frère, et du pire séducteur.

Je sors habillée et maquillée. Je ne veux prendre aucun risque de laisser ma peau entrer en contact avec la sienne. Je me rends compte qu'il est déjà l'heure du déjeuner. Jay et moi avons fait la grasse matinée dans le même lit.

Oh. My.God.... une telle chose ne se reproduira plus. Ça ne doit plus se reproduire ! Je n'ose pas imaginer ce qui aurait pu se passer si j'avais été consciente de ça. Ce que mon corps m'aurait fait faire. Ce que j'aurai fait à Jay. Ce que...

Mon rythme cardiaque augmente, et j'ai soudainement horriblement chaud. Je tire sur le haut de mon col roulé (oui j'ai voulu ne rien laisser à vue).

Jay a profité de mon absence pour s’habiller et pianote sur son tél. Quand il m'entend, il lève la tête et me lance un sourire à faire fondre toutes mes sérieuses résolutions.

- Tu viens ? On va manger, me dit-il en se levant et prenant sa veste.

- Euh... non, je ne préfère pas.

- Tu ne veux pas manger ? me demande-t-il étonné.

- Je préfère éviter de sortir avec toi. Je n'aimerais pas que... enfin que toi et moi... tu vois... depuis qu'on a... tous les deux... hier soir...

Termine une phrase Éva ! Jay me regarde avec ce regard légèrement moqueur, et le mien est captivé par son jean, enfin ce qu’il y a à l’intérieur de son jean, je remonte vers son t-shirt, et je veux déjà revenir au creux de ses bras, sentir son étreinte, son odeur, avoir sa chaleur autour de moi.

Non !

- Je t'arrête tout de suite, annonce Jay en riant. On n’a rien fait. Si c'était le cas, tu t'en souviendrais comme l'une des plus belles soirées de ta vie et tu serais encore dans ce lit à gémir mon nom.

Je ne réponds pas, mais rougis férocement. Des images passent dans ma tête. Manger dans un endroit public n'est pas une mauvaise idée, je ne veux pas le tuer.

- Ok, tu veux manger où ?

- Marcus m'a envoyé un texto, ils ont un brunch dans un restaurant du coin.

J'enfile mon manteau et le suit. Il me prend la main en descendant les escaliers, ce geste me surprend, mais je ne fais rien pour retirer ma main. La chaleur de ses doigts autour des miens me réconforte.

- Jay ?

- Éva ? me répond-il en posant sur moi ses yeux vert émeraude.

- Tu tiendras ta promesse ?

Son regard se pose sur moi, hésitant.

- Je t'ai promis la vérité. Je ne me défilerai pas, mais allons boire un café avant de retrouver Marcus. Après tout, tu n'as toujours pas pris ton petit déjeuner.

Jay m'entraîne, j'ai hâte de savoir. On arrive sur le trottoir de notre immeuble. L'air glacial me tétanise malgré un soleil lumineux. Je m'emmitoufle dans mon écharpe en laine et resserre mon manteau. Jay lui ne frissonne même pas dans son simple manteau de cuir.

- Viens, il y a un coffee shop au bout de la rue.

Ma main toujours glissée dans la sienne, je le laisse m'entraîner vers l'endroit indiqué. On s'engouffre dans la boutique et une chaleur bienveillante nous enveloppe. On s'installe à une table près de la façade vitrée. Jay est allé nous chercher de quoi nous réchauffer. Lui, un grand cappuccino et moi un café latté. Cela m'avait étonné qu'il s'en souvienne, mais Jay savait exactement comment j'aime cette boisson chaude que j'avais l'habitude de prendre à la fin des cours. Jay ne m'a pas oublié. Malgré ces années loin de moi, il reste un peu de moi dans sa mémoire. Quelle autre fille pourrait se targuer d'être ainsi dans les pensées de Jay ? Je me fais encore des films... et en quoi ça m'intéresse ?

Jay revient et pose les deux mugs fumants sur la table. Il est vraiment craquant. Il pose sur moi ses yeux verts et je sens mon cœur s'emballer. Il ne m'a pas toujours fait cet effet-là. Je ne sais plus quand ça a commencé. Peut-être quand il a commencé à avoir une tête de plus que moi, ou quand il faisait ses compets' de traction dans le jardin avec mon frère.

Je porte la tasse à mes lèvres et bois à petite gorgée mon café latté.

- Éva, je suis désolé de ne pas te l'avoir dit plus tôt.

Je pose ma tasse et lève les yeux sur lui, lui accordant ainsi toute mon attention.

- Tu te souviens du soir où on a trouvé ton sous-vêtement avec cette inscription ?

- Oui, c'était une mauvaise blague de Luc. C'est tout.

- Il n'y a pas eu que ça, une personne est venue vandaliser la salle de bain. J'ai fait en sorte que tu ne t'en aperçoives pas, je ne voulais pas que ce psychopathe, peu importe qui il est, te fasse peur.

- Oh mon Dieu, m'exclamé-je dans un petit cri étouffé en reposant brutalement ma tasse, me brûlant au passage

- Je sais, j'aurais dû t'en parler, mais je voulais te protéger. Il n'y a que Q qui sait, je lui ai promis de veiller sur toi.

Les informations s'imbriquent dans ma tête.

Jay reste pour moi.

- Merci Jay, soufflé-je, mais tu ne peux pas rester à veiller ainsi sur moi. Tu as ta carrière. Ta cheville sera bientôt remise. Ton équipe a besoin de toi.

- Il y a plus important qu'une carrière.

Moi ?

- Non, réponds-je fermement. Je ne veux pas que tu te sacrifies pour moi. Et je suis certaine que tout cela n'est rien.

- Ma décision est prise, Éva. Je ne te laisserais pas seule.

- Jay…

- Allez, on y va, dit-il sur un ton catégorique. Les gars nous attendent.

Sa grande main se glisse dans la mienne chaude et rassurante. Je commence à m'habituer à cette proximité, à aimer être avec lui. Je marche à ses côtés et rien que cela me rend plus forte. Jay dégage une assurance, une sérénité que tout le monde recherche. Moi, la première.

On arrive au pub blindé de monde, la moitié des mecs sont des géants, enfin des basketteurs, quoi. Je suis plutôt à l'aise avec eux, ce sont des sportifs de haut niveau et malgré ce que l'on peut penser, la plupart d'entre eux sont plutôt timides. Ils font presque tout ensemble et n'ont pas l'habitude de se mêler à l'autre monde, celui où on sort le soir, ou on prend des apéros, ou on va au ciné le dimanche. Leur quotidien est rythmé par les entraînements, les matchs et les rares soirées en famille. Cela ne les empêche pas d'être super sympas quand on arrive à mettre un pied dans leur univers.

Je ris plusieurs fois à des boutades qu'ils font entre eux. Et même si certains posent sur moi un regard intéressé, il y a toujours un geste de Jay qui les dissuade d'espérer plus. Il me caresse légèrement la joue, se baisse pour me dire quelque chose. Toujours très discret, mais révélateur.

La journée est bien avancée quand les garçons décident de se rendre à l'entraînement.

- Tu veux te dérouiller un peu Jay ?

- Faire un entraînement ?

- Oui gars, à moins que tu aies trop peur de te prendre une dérouillée ? Tu n'as pas touché un ballon depuis ton entorse ? T'es en état au moins ?

- Ce n’est pas ça qui va m'empecher de te mettre un déculloté, mon pote. J'aurais toujours un temps d'avance sur toi.

Marcus se met à rire et Jay accepte de participer à l'entraînement. Il m'interroge du regard. Est-ce que je veux continuer la journée avec lui ? Il y avait une époque où j'allais les voir jouer quotidiennement, lui et mon frère dans le gymnase de l'école. J'hésite un quart de seconde. J'observe la bande de géant se mettre de grande claque dans le dos, je souris. Cette ambiance m'a bien manquée.

Je suis le groupe de garçons. On prend le métro, le gymnase n'est qu'à deux stations de là. Les mecs continuent de chahuter gentiment, puis arrivent au lieu de l'entrainement. Là, tous deviennent sérieux. Je m'éclipse discrètement à l'arrière d'une tribune et zappe sur mon téléphone le temps qu'ils se préparent dans les vestiaires. Quand les gars débarquent sur le terrain, le bruit des baskets bruisse sur le parquet, les ballons tapent le sol. Le jeu démarre et je remarque de suite Jay. Il est à part, tel un félin sur le terrain dribblant, esquivant, il arrive à marquer deux paniers en l'espace de dix minutes. Puis les rôles changent. Il est maintenant en défense. Ses gestes sont sûrs et précis, son regard ne lâche pas le ballon. J'admire sa façon de bouger, ses avant bras musclés, son corps vibre sur le terrain. Il prend vie. Il est infatigable. Jay fait des allers-retours sur le terrain, son souffle est court, d'où je suis je peux voir les gouttelettes tomber de son front en sueur, son souffle précipité qui s'échappe de ses lèvres. Je me mords les lèvres en proie à des images pas très innocentes. Qu'est-ce que je fais là ? Jay provoque trop de sentiments confus en moi. Des sensations purement physiques, mais très dangereuses. Il faut que je m'en aille immédiatement. Je n'aurai jamais du venir. Je prends mon sac besace et pars discrètement du gymnase. Dans le métro j'envoie un message à Jay pour l'avertir que je suis partie plus tôt.

Je m'arrête à une librairie pour regarder quelques livres. Je n'ai pas envie de rentrer tout de suite, de retrouver cet appartement vide, sans Jay et pourtant... C'est bien ce que je demande à Jay. De partir. De me laisser seul. Je suis un méli-mélo tellement complexe que j’ai moi-même du mal à me comprendre. Je soupire, cela fait plus de trois quarts d'heure que je suis dans la librairie. Je me décide d'acheter le livre du moment, histoire de me changer les idées. Je remercie la vendeuse et fourre le tout dans mon sac. Je me dirige vers l'appartement qui est plus qu'à dix minutes de marche. Le soleil a rapidement baissé, il fait presque sombre dans la ruelle.

Je n'ai jamais eu peur le soir en rentrant, le quartier est plutôt bien fréquenté et sûr. Alors pourquoi ai-je l'impression désagréable que ma nuque picote ? Est-ce la conversation que j'ai eu avec Jay sur une personne qui me voudrait du mal ? J'ai eu du mal à y croire. Je n'ai jamais eu d'ennemis. Je suis insignifiante comme fille.

Malgré moi, je presse le pas. Le rythme cardiaque de mon coeur s'accelère et j'ai hâte de me trouver dans la tranquillité du hall de mon immeuble, mais surtout de mon appartement. Je monte les escaliers quatre à quatre, insère les clés dans la serrure et pousse avec soulagement la porte d'entrée pour la claquer derrière moi. Je m'appuis contre le bois froid et prend quelques minutes pour calmer mon esprit.

Tout va bien...

Je pose mon sac à main sur le petit guéridon prévu à cet effet et me traite d'imbécile parano, peur de quoi franchement ? Q n'a jamais eu de soucis et moi je n'ai jamais eu l'ombre d'un ennui. J'enlève ma veste que je pose à l'entrée à côté de mon sac et me tourne en direction de la cuisine. Là. Devant moi se trouve un homme habillé de noir et cagoulé. Il est grand, ses yeux sont presque noirs, et je ne vois rien d'autres. Mon cœur s'arrête de battre. J'en suis sûre, je suis en train de m'effondrer sur le sol. Je devrais hurler, me jetter sur lui et pourtant rien ne sort de ma gorge. Je me contente de fiwer ses yeux noirs, remplis de haine. Que me veut-il ? Pourquoi reste-t-il là à me dévisager ?

Les poils se hérissent sur ma peau et je m'attends au pire. Mon inconscient me souffle des choses horribles que je refuse d'admettre. Non ! Il va s'en aller. Il n'a rien à gagner à me brutaliser. Qu'il prenne tout ce qu'il y a à prendre, mais qu'il me laisse..

Mon regard balaie rapidement de l'appartement et je pousse un cri angoissé. Rien n'a bougé. Il n'a même pas vidé un tiroir. Ce qu'il chercher, ce qu'il veut : c'est moi.

L'horrible vérité me prend à la gorge. Je me recroqueville sur moi-même et le supplie d'une voie tremblante. Je me tasse d'avantage avec qu'il fait un pas vers moi, me fixant du regard. Mon cœur bat dans ma gorge. Réfléchis ma poulette et réfléchis vite ! J'ai verrouillé derrière moi, impossible de m'enfuir. L'appartement n'est pas grand, impossible de me cacher. Il n'y a pas d'issues, je suis pris dans la souricière. Je peux deviner le sourire derrière sa cagoule comme s'il avait suivi le fil de mes pensées et qu'il présageait l'avenir. Muée par un instinct primaire de survie, je me précipite vers la cuisine. Au moins, j'aurai des objets tranchants à porter de main pour me défendre. Je suis consciente que cette technique peut se retourner contre moi, mais je préfère mourir que de subir ce que présage ce regard lubrique.

Ca y est j'y suis ! J'ai repris plusieurs fois ce chapitre. Désolée si j'ai été longue à publier, mais je promets de faire plus rapide les prochaines fois :-)

Alors vous en pensez quoi ? Qui est sous cette cagoule ?

Je me suis fait un compte Instagram et Facebook, pour celle qui veulent en savoir plus sur moi :-) Je partage aussi les astuces d'auteures :-) sur insta : lysa_watt ; sur FB : lysaWatt auteure

merci à vous mes petits nuages sucrés :-)

Lysa Watt

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