Journal de Raphaëlle Roland : 6 Août
La première fois que je vis Alik, il me parut totalement ridicule. Il fallait le voir, en train de fouiller les petits bois autour des champs, un morceau de nourriture à la main et émettant des petits bruits d'animaux absolument grotesques.
La nuit était sombre, comme j'ai si peu l'habitude : il n'y avait pas le moindre éclairage dans les champs, et les deux lunes éclairaient faiblement ma route pour retourner dans les petits bois où je me cachais le jour. La nuit je pillais et me nourrissait, le jour je me cachais et dormais. On aurait dit un animal, mais je n'avais pas réellement le choix. De plus les granges n'étaient pas fermés, peut-être à cause des récoltes en cour ou bien parce qu'ils ne craignaient pas les vols. Je n'en sais rien. Mes vols seraient passés inaperçus si je n'avais pas eu l'audace de m'aventurer en ville. Un enfant m'avait surpris, fouillant dans les poubelles et j'eu alors si peur de me faire prendre que je devins plus prudente et ne retourna plus en ville.
Ce soir-là je retournais donc dans le petit sous-bois où je me cachais, quand je vis Alik pour la première fois, accompagné d'une étrange créature. On aurait dit une sorte d'insecte géant avec sa carapace noire et brillante, ses grandes mandibules et ses deux immenses pinces. J'appris plus tard qu'il se nomme Noktos, Alik a dû le récupérer comme moi, et l'apprivoiser.
En voyant ce Noxum émettre des bruits ridicules et tendre son morceau de viande séché dans le vide. Je fus prise de fou rire. Pourtant, et ce à cause de mon comité d'accueil je craignais les Noxum, et je m'en tenais toujours aussi éloignée que possible. Ce soir-là je fus repérée à cause de mon rire. C’est peut être une chance au final, ce qui rit est plus humain… Enfin Noxum aussi…
Il me vit alors et je pu lire de la surprise sur son visage. Apparemment l'enfant avait raconté partout au village qu'il m'avait vu mais il n'avait pas pu voir que je ressemblais juste à un Noxum avec la peau blanche. Il devait s'attendre à autre chose, une créature plus animale et moins semblable.
Ce soir-là, je pris la décision de le suivre. Il me cacha dans les sous-sols de la demeure familiale. On aurait dit une ancienne prison avec ses cellules. Il me fit confiance et me donna une cellule comme chambre mais laissa la grille ouverte, comme un signe d’hospitalité ou de respect je pense. Il m'apporta de quoi me laver, s'occupa de mes vêtements et surtout m'apporta de la vraie nourriture: une sorte de galette me rappelant le pain, et un morceau de viande séchée.
Pendant ces quelques semaines, j'appris à lui faire confiance. On dessinait pour se comprendre, il nommait des objets, je répétais et j'appris ainsi son nom : Alik. Peu à peu, et grâce à lui, je pu redevenir humaine. Je me surprenais chaque soir, grâce à la lampe qu'il m'avait donnée à lire et relire l'île au trésor de Stevenson. Quand Alik comprit que je lisais, il me donna également ce carnet de cuir bleu dans lequel j'écris en ce moment même.
Puis je vis sur le visage d'Alik que quelque chose n'allait pas. Je le comprenais en regardant les deux iris blancs de ces yeux. Il allait devoir partir mais je ne compris ni pourquoi ni ou.
Une semaine après je prenais la route avec Larani.
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