Chapitre 4 : Sur les traces de Jaskier
Retranchés derrière leur palissade en bois, les villageois virent arriver l’étrange homme blanc vêtu de noir et d‘argent avec une certaine appréhension. Ils n’avaient jamais vu personne ressemblant autant à un spectre. Chez eux, les peau étaient sombres, tannées par le soleil et même les anciens n’avaient pas les cheveux aussi dépigmentés.
Ils eurent tous un mouvement de recul en découvrant ses yeux jaunes de félin et l'horrible cicatrice marquant son visage. L’individu brandissait néanmoins trois têtes de smilodonis ce qui lui octroyait le droit d'être au moins être accueilli pour ce service. Les guerrières du village l’escortèrent jusqu’à leur chef, lance en main, prêtes à intervenir, si besoin.
Pour avoir côtoyé Trois Choucas et ses compagnes zerrikanes, Geralt connaissait quelques mots dans la langue. Le chef pratiquait lui la langue commune. Cela leur permit donc de se comprendre et Geralt indiqua qu’il cherchait un autre homme blanc, un musicien coiffé d'un petit chapeau à plume d'aigrette et porteur d'un luth.
Le chef lui confirma l’avoir accueilli une lune plus tôt. Il devait se rendre dans les mines de diamants à quelques lieues de là mais était resté une bonne semaine au village à "prendre des renseignements auprès des différentes guerrières" avant de s'y rendre. Celles qui l'avaient accompagnées avaient patienté une semaine durant à l'entrée de la mine maudite mais le barde n’était pas reparu. Elles avaient fini par revenir au village. "Je l’avais pourtant averti que les lieux étaient hantés mais il n’a rien voulu entendre…", conclut-il avant de convier Geralt pour la nuit, en remerciement de sa chasse fructueuse.
Fidèle à lui-même, le Sorceleur la passa en bonne compagnie après s’être copieusement rempli la panse et avoir profité de l’alcool local. Il se mit en route dès l’aube suivante, accompagné par les deux guerrières qui avaient partagées sa couche.
Alba, qui ouvrait la voie, était armée d’une épée fixée, comme celles du Sorceleur, dans son dos tandis que Gaya, qui les suivait tous deux, portait un arc splendide. Geralt profitait de la vue de leurs silhouettes élancées, graciles et bien proportionnées, enveloppées dans leurs tuniques de cuir tanné ornementées de broderies et de perles colorées. Leurs cheveux tressés avaient été savamment relevés sur leurs têtes et maintenus ainsi par une couche de boue rouge séchée, révélant leurs cous fins et délicat. Leur allure féminine presque fragile contrastait avec ce qu’il savait de la férocité légendaire des zerrikanes.
Après une bonne heure de marche, ils arrivèrent à l’entrée de la mine abandonnée. Geralt étudia les environs, il repéra le symbole que Jaskier aimait utiliser comme repère quand il s’aventurait. Il était sur la bonne piste. Malheureusement, il constata aussi des traces de créatures peu recommandables, "au bas mot de noctules, peut-être quelques goules ou autres graveirs", remarqua le Sorceleur dont le cœur se serra pour son ami. Plus d'une demi-lune dans ces mines… Il était au mieux perdu, au pire… Il ne préférait pas y songer.
Les fières guerrières lui annoncèrent qu'elles n'iraient pas plus loin et lui fournirent une torche qu'il rangea à sa ceinture. Pour l'heure, une potion chat lui permettrait de dilater totalement ses pupilles et d'y voir ainsi comme en plein jour. Elles eurent un mouvement de recul quand ses veines se teintèrent de sombre sur son visage devenu encore plus crayeux et que ses yeux virèrent au noir total. Il ne ressemblait plus réellement à un homme sous cette apparence.
Le Sorceleur les salua d'un signe de tête, s'engagea dans le tunnel et poussa la porte donnant accès aux mines. L'air froid sentait la moisissure et la décomposition. Des craquements sous ses pieds révélèrent la présence d'ossements anciens. "Un vrai piège à rat", grommela-t-il, "pourquoi diable Jaskier a-t-il accepté de rentrer ici ? Cela ne lui ressemble pas du tout !"
Il s'engagea malgré tout, soucieux de retrouver son ami.
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