Contrôle d'identité
Toulouse, Quartier du Busca & Hôtel de Police
Antoine Delprat, adjoint de surveillance de la voie publique avait repéré le véhicule signalé lors d’une patrouille de routine dans le quartier du Busca. Le signalement de la Range Rover Evoque avait été communiqué à toutes les équipes municipales un peu plus tôt, spécifiant qu’aucune action ne devait être entreprise, hormis avertir la police judiciaire. Juliette Delhuine dépêcha immédiatement Olivier Lacaze et Antony Marchand sur place.
Le véhicule était stationné dans la rue du Japon, à proximité du musée Georges Labit. Olivier Lacaze se fit envoyer les images de la vidéosurveillance du parking réalisées le dimanche précédent à Basso Cambo. À l’exception de l’immatriculation, tout concordait. Le service des cartes grises confirma que le véhicule était bien immatriculé au nom de la société Homeland Security. Le lieutenant appela Juliette pour confirmer l’identification probable du véhicule et demander des instructions.
« Nous ne pouvons pas mettre le véhicule sous surveillance électronique sans l’accord d’un juge d’instruction. Je vais contacter le substitut pour lui demander son avis. En attendant, vous restez en planque, photos, filature… je ne vous apprends pas le métier. »
Lacaze rapporta à son équipier les instructions de la capitaine. Le brigadier Marchand soupira, résigné.
« Dire qu’il suffirait de lui coller un traceur ! Foutues procédures…
— On pourrait même faire plus simple, toutes ces voitures ont une puce GPS intégrée, il suffirait d’y avoir accès, seulement, ce n’est plus autorisé depuis dix ans ! Espérons juste que nous n’allons pas y passer la nuit, il n’y a pas grand-chose pour se ravitailler dans le quartier.
— Il y a une station-service sur l’allée des Demoiselles, je peux aller chercher quelque chose à manger si tu veux.
— Je n’ai pas faim, mais je veux bien un Coca ! »
Juliette Delhuine passa la tête dans le bureau du commissaire.
« On a localisé la Range Rover dans le quartier du Busca ! Lacaze et Marchand sont sur place.
— Entre, Juliette. On ne peut pas le mettre sous surveillance électronique. Tu as parlé à Madur ?
— Non, pas encore, je voulais te voir d’abord. Cette voiture peut nous permettre d’identifier le tueur et aussi nous mener au commanditaire.
— Je suis d’accord. Tu vas appeler le substitut et lui expliquer la situation, nous verrons bien ce qu’il dira. En attendant, tu mets un dispositif de surveillance en place autour du véhicule. Trouvez un moyen d’intercepter le conducteur pour un motif banal, contrôle d’alcoolémie ou infraction routière. Je veux son identité officielle ainsi que ses empreintes. On les passera ensuite dans nos bases de données et chez Interpol. Si Madur fait la sourde oreille, j’appellerai de Mazière. »
« Monsieur le Substitut, c’est le capitaine Delhuine. Nous pensons avoir localisé la voiture que le tueur du marché a utilisée dimanche, la Range Rover noire. Nous souhaitons mettre en place un traçage du véhicule, en espérant que son conducteur nous mènera à son donneur d’ordre.
— Vous savez qu’à ce stade de l’enquête, je ne peux pas vous y autoriser, il nous faut l’accord d’un juge d’instruction.
— Je connais la procédure, Monsieur, mais à ce stade, nous n’avons pas beaucoup d’autres éléments à notre disposition.
— Laissez-moi en parler avec le procureur, capitaine. En attendant, vous pouvez mettre en place une surveillance humaine ?
— C’est déjà fait, Monsieur. Nous pensons également à un contrôle pour obtenir l’identité et les empreintes du conducteur du véhicule, quelque chose d’anodin qui ne lui mette pas la puce à l’oreille.
— Entendu, faites au mieux.
— Merci Monsieur. »
Juliette appela Lacaze pour lui expliquer le plan à mettre en œuvre.
« La rue du Japon est à sens unique et au bout c’est le canal, expliqua le lieutenant. Le conducteur de l’Evoque n’a que deux options, remonter le quai vers le nord, et on peut le coincer au port Saint Sauveur ou bien prendre à gauche vers l’allée Frédéric Mistral et le Boulingrin.
— OK, je vais te faire envoyer deux véhicules et tu te débrouilles pour le bloquer sur l’un des deux itinéraires. Espérons qu’il ne partira pas à pied ! Surtout pas de gyrophares ni de sirène, on ne veut surtout pas l’effrayer. Il faut que ça paraisse totalement fortuit. »
La nuit était tombée quand le brigadier Marchand remarqua l’allumage du plafonnier de la voiture.
« La cible bouge ! »
Lacaze transmit l’information aux deux véhicules de patrouille prépositionnés.
« Nous allons suivre l’Evoque et selon l’itinéraire qu’elle prend, vous mettez en place le barrage. S’il y a des voitures devant elle, arrêtez aussi celle qui précède, pour rendre l’opération plus banale. Il nous faut son identité, son adresse et ses empreintes. Ensuite, vous le laissez repartir !
— Et s’il est positif ? demanda l’un des policiers dans la radio.
— On s’en fout, vous le laissez repartir sans histoires. »
Igor Polounin quitta le stationnement et remonta vers le boulevard Montplaisir. Il ignora la rue Montplaisir à sa gauche et continua le long du canal.
« Il remonte vers le port, il sera sur vous dans une minute, annonça Lacaze. On le suit à cent mètres.
— Je vois une Clio blanche et un SUV noir derrière. On intervient. »
Un policier en uniforme se plaça sur la chaussée et fit signe à la voiture blanche de stopper. La conductrice fut surprise et interrogea le fonctionnaire.
« Je ne comprends pas Monsieur l’Agent, je n’ai rien fait de mal, je ne roulais pas vite.
— C’est un contrôle de routine, Madame, pouvez-vous me présenter les papiers du véhicule. »
Le deuxième policier confirma dans sa radio tactique.
« Le véhicule cible est arrêté en numéro deux. Pas de signe d’impatience de la part du conducteur.
— Parfait, répondit Lacaze. Continuez comme ça, jouez la bon enfant. »
La Clio redémarra après deux minutes et ce fut le tour de la Range Rover. Igor pouvait voir dans son rétroviseur les phares des voitures qui s’accumulaient derrière lui. Le policier lui fit signe de baisser sa vitre.
« Bonjour Monsieur, pouvez-vous arrêter le moteur ?
— Oui, bien sûr, répondit Igor. Qu’est-ce qui se passe ?
— Rien de particulier, c’est juste un contrôle de routine. Pouvez-vous me présenter les papiers du véhicule ainsi que votre permis de conduire ? »
Igor ouvrit la boite à gants et en sortit un étui qu’il tendit au fonctionnaire. Il lui présenta ensuite un permis de conduire international. L’homme remit les documents à son collègue qui se dirigea vers la voiture de patrouille.
« Avez-vous consommé de l’alcool avant de prendre le volant ?
— Il est encore un peu tôt, vous ne trouvez pas ?
— Il n’y a pas d’heure, vous savez ! Si vous n’avez pas bu, vous ne verrez aucun inconvénient à souffler dans l’éthylotest ?
— Non, en effet, pas de problème. »
L’agent lui tendit l’instrument. Après quelques secondes, Igor lui rendit le ballon gonflé. Le policier jeta un coup d’œil sur la sonde.
« Tout est en ordre, mon collègue vous rapporte vos papiers et vous pourrez repartir. Veuillez nous excuser pour le dérangement. »
Les deux agents regardèrent la voiture noire s’éloigner à allure modérée, puis retournèrent à leur véhicule. Lacaze et Marchand arrivèrent au même moment.
« C’est bon lieutenant, nous avons vos informations. L’homme s’appelle Igor Polounin, nationalité Russe, carte de séjour en règle. Domicilié au trente-sept rue du Japon à Toulouse. Nous avons ses empreintes et son ADN sur l’éthylotest.
— Je vous remercie, répondit Lacaze en glissant le ballon dans un sachet de plastique. Bonne soirée les gars ! »
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