Marie et Franck (wip)
Résumé des chapitres précédents : Juan, Miguel, Franck, Julie et Marie faisaient partie d'une expédition qui visait à sécuriser une grotte dans une mine. Suite à un effondrement, ils ont émergé dans un désert inconnu. Après avoir perdu connaissance, ils se sont réveillés dans un village de montagne. Les habitants y parlent une langue inconnue et cet endroit est bercé par le cycle de deux soleils. Par un concours de circonstances obscur, Julie a appris la langue locale. Le groupe s'est fait capturer par des soldats chevauchant des griffons, qui les ont emmenés vers une forteresse. Prisonniers dans une geôle sordide, ils s'apprêtent à y passer leur première nuit.
Franck fut tiré de ses rêveries de plans d'évasion par des bruits de tapotements sourds. Assise contre le mur le plus loin possible du courant d'air, Marie se frictionnait les bras pour se réchauffer. La vue de son ancienne compagne en difficulté réveilla chez le spéléologue un instinct protecteur opportuniste. Il s'assit à ses côtés et passa son bras autour d'elle pour tenter de la réchauffer. Recroquevillée en position foetale, Marie tremblait de tous ses membres.
- Je comprendrais que tu m'en veuilles, Franck. C'est vraiment la merde. Dans quoi je nous ai fourrés ?
Marie parlait doucement, comme si cette conversation lui était réservée.
- Tu n'y es pour rien, répondit-il. J'ai accepté de venir et de descendre. C'est mon métier, et j'en ai toujours assumé les risques.
- C'est quand même moi qui t'ai fait venir jusqu'au Mexique.
- Tu voulais me faire partager une superbe découverte, ça partait d'une bonne intention.
- Et bien, j'espère que tu n'es pas déçu ! soupira-t-elle avec un brin d'humour, puis toussa avec difficulté.
- Ces grottes étaient superbes. Tout le reste était impossible à prévoir.
Il posa sa joue sur les cheveux cuivrés de Marie, son odeur et la sensation de sa peau envahirent ses sens comme une douloureuse madeleine de Proust. Il marqua une pause. Son coeur s'emballa quand il posa la question fatidique.
- Tu ne m'avais vraiment fait venir que pour ça ?
Elle ne repondit pas immédiatement, faisant mine de ne pas avoir compris. Mais à leur tour, les battements dans sa poitrine avaient accéléré.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- Sur les centaines de spéléos pros dans le monde que tu connais, pourquoi m'as-tu fait venir moi ?
- Je voulais partager ça avec toi.
- Mais ça ne pose pas de problème à ton mec ?
Elle ne répondit pas et se posa contre lui.
- Après ton départ aux US, j'ai rencontré un gars. Un géologue passionné d'alpinisme. Nous avons vécu plusieurs années ensemble. Puis lorsque j'ai dégoté ce poste au Mexique, il m'a suivie à reculons. Mais ça s'est vite dégradé. Un jour j'ai appris qu'il s'était acoquiné avec une pétasse de Chihuahua où il avait trouvé un boulot. Je lui ai pardonné sur le moment. Mais je pense qu'il a continué à la voir en cachette. Il a fini par me planter il y a un an, et depuis, plus de nouvelles.
- C'est moche, je suis désolé pour toi.
- Quand on a découvert cette grotte, c'était vraiment quelque chose de dingue. Ce genre de moments que tu as envie de partager parce que ça n'a pas la même saveur si tu le fais seul.
Elle marqua une pause.
- Toi, tu pouvais comprendre la portée de cette découverte, et je me rappelle que tu adorais les géodes. J'avais simplement envie que tu sois là, un visage amical à mes côtés.
Marie toussa à nouveau. Pour Franck, le couperet était peut être tombé, le mot ami avait été lâché. Ils restèrent ainsi serrés dans la pénombre et le froid. Les heures passèrent, puis les jours, mornes et inquiétants, l'obscurité régulièrement percée par le mince filet de lumière de la meurtrière du plafond. Seuls les gardes rompaient la monotonie de l'enfermement en venant déposer une miche de pain, des bols d’eau, et vider les seaux qui servaient de toilettes.
Lors d'une fin d'après-midi semblable à tous les autres, un cliquetis se fit entendre au bout du couloir, suivi de pas appuyés rythmés de tintements métalliques. Trois soldats se présentèrent devant la cellule. Ils ne quittaient pas Julie des yeux, ce qui la terrorisait. Ils ouvrirent la grille de métal, et tandis que deux d’entre eux poussaient les hommes vers le mur de leurs lances émoussées, le troisième fila directement vers Julie. Il tenait une chaîne métallique, terminée par de grossières menottes de fer. Juan se précipita sur lui dès qu’il comprit son intention, mais le soldat l'intercepta avec une matraque et le roua de coups. Son tabassage terminé, il ferma sans méangement les menottes sur les frêles poignets de Julie. La sensation glaciale et pesante lui fut très désagréable. Tandis que le geôlier la tirait vers la porte de la cellule, une seule chose lui traversa l'esprit : elle allait probablement passer un sale quart d’heure. Résignée, la jeune femme se laissa traîner le long du couloir tandis que les gardes verrouillaient la geôle derrière elle. La voix de Marie résonna au loin :
- On te retrouvera Julie ! Tiens bon !
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