Chapitre unique

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Il était une fois, dans un calme petit village aux abords d'une forêt. Alors que les villageois vivaient comme à l'accoutumée, un horrible hurlement surgit de la forêt. Tous les oiseaux de la forêt s'envolèrent. Un grondement suivit. Il s'intensifia. La terre se mit à trembler.

Surgit des arbres, une énorme masse sombre. Elle s'approchait des habitations. Ne ralentissant aucunement. Cette masse semblait être un ours.
Oui, c'était un immense ours. Il fonçait en renversant paniers et charrettes. Les villageois terrifiés fuyaient aussi vite qu'ils le pouvaient.
Seul une petite fille resta au milieu du chemin. Elle regardait l'ours comme une bête curieuse. A la fois intriguée et interrogative. Il avançait toujours de son allure rapide et impressionnante. Il galopait dans sa direction. Rien ne résistait à sa fougue.
L'enfant, immobile, émit un petit grognement. L'ours s'arrêta net devant elle. Il rugit comme un monstre cauchemardesque. Sans aucune peur, la fillette tendit la main pour caresser le museau fumant.

"Qu'y a-t-il ? Pourquoi hurles-tu comme ça ?" demanda-t-elle. Car oui, cette petite entendait bien obtenir une réponse de la grosse bête hirsute. Le fait d'être la fille d'une sorcière aidait certainement un peu dans cette certitude.

"J'ai mal, grogna l'ours. Mon oreille tombe. Un chasseur m'a blessé."

Effectivement, en y regardant de plus près, l'oreille en question était fort amochée. Déchirée en grande partie et tâchant la fourrure d'un sang épais.

"Viens avec moi, je vais t'aider, proposa la petite fille."

L'ours la suivit jusqu'à l'autre extrémité du village, en lisière du reste des bois. De la maisonnette, elle ramena un linge propre, une aiguille, un fil et un pot de miel.

"Je vais te recoudre, ça va faire un petit peu mal sur le moment mais ça passera vite. Baisse-toi que j'œuvre plus aisément.

- Je te fais confiance, petite qui parle mon langage."

Ayant passé le fil dans l'aiguille, l'enfant piqua dans l'oreille endolorie. L'ours grogna sans bouger d'un poil. A chaque point, la douleur enflait. Cependant, il resta immobile.
Après avoir fini ses sutures, enduit la blessure de miel et transformé le linge en bandages, elle caressa l'animal.

"J'ai fini. Tu vas guérir. Mange un peu de miel, ça t'aidera à cicatriser plus vite.

- J'adore le miel, c'est une aubaine. Qui dois-je remercier et louer les soins ? reprit l'ursidé.

- Je suis Abigaelle. Et toi, quel est ton nom ?

- Je suis le roi des ours, le roi de la forêt, affirma-t-il fièrement.

- Tu n'as pas de nom ?

- Chez nous, nous n'avons pas besoin de nom.

- Alors, je t'appellerai … Oberon. Oui, c'est un beau nom pour un roi.

- Soit, je serai Oberon. Et désormais, j'ai une dette envers toi. Je te protègerai des multiples dangers et des hommes, jusqu'à ton dernier voyage.

- Mais tu es si grand et si impressionnant que tout le monde va avoir peur de toi.

- Toi qui sembles connaître les arts mystiques, tu as peut-être un charme pour que je sois auprès de toi sans éveiller de soupçons ou d'inquiétude. Désormais, je suis ton humble serviteur."

Dans le grimoire de sa mère disparue, Abigaelle trouva une formule parfaitement adaptée. Quelques signes obscures tracés dans la fourrure ainsi qu'une petite incantation transformèrent Oberon, le grand roi ours en une petite peluche d'ourson.
Elle le plaça sur sa table de nuit.

Le soir venu, son oncle vint lui souhaiter la bonne nuit, comme lui avait conseillé la lavandière. Il aimait se rapprocher de sa fille d'adoption.
Il commença par lui raconter une histoire de princesse, comme lui avait conseillé la bergère. Il aimait être considéré comme un bon père.
Il lui caressa les cheveux, comme lui avait conseillé la boulangère. Il aimait sentir le contact de sa peau douce.
Il lui caressa la joue, comme lui avait conseillé la courtisane. Une larme coula des yeux d'Abigaelle.
Il lui caressa les lèvres, comme il aimait le faire.
Soudain un grondement atroce retentit et en un éclair, l'oncle s'enfuit en serrant son bras lacéré de trois énormes griffures.

Jamais plu, l'oncle d'Abigaelle n'entra dans sa chambre. D'ailleurs, il n'osa plus jamais la toucher et devint très respectueux. L'ourson passa de nombreuses nuits dans les bras de la fillette.

Le temps passa et la petite fille devint femme. Elle se trouva un doux mari avec qui elle partageait de nombreuses passions. Leur amour était fort et fusionnel. Leur vie fut longue et remplie.
Abigaelle s'éteint la première. Son mari la veilla trois jours et trois nuits durant, sous le regard immobile de la vieille peluche nommée Oberon. La tristesse de l'époux finit par s'assécher faute de larmes.

Avant d'accompagner sa tendre femme dans sa dernière demeure, il alla se changer. Lorsqu'il revint pour lui mettre des fleurs dans les cheveux et son ourson adoré dans les bras, il ne le trouva point. Il chercha partout. Aucune peluche. Ni sur la table de chevet, ni ailleurs.
Alors que ses fidèles amis venaient pour la mise en bière, il aperçut, dans la cuisine, que le pot de miel manquait.

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