Chapitre sept

3 minutes de lecture

Godric circulait dans la forêt, au milieu des animaux et des végétaux tel un esprit de la nature, libre. Son chant s'associait parfaitement à celui de la forêt et de ses habitants. Il avait tout le loisir de réfléchir. Godric commençait à entendre le chant de chaque être.

Mais Yawa trouvait que Godric devait apprendre plus vite, sinon il n'aurait pas le temps d'apprendre tout ce qu'il devait savoir. Aussi du-t-il trouver une façon de lui faire apprendre plus vite encore. Yawa décida d'avoir recours à une technique toute simple, de ne pas chercher plus loin. De toute façon, chercher plus loin n'aurait servi à rien, il avait ce qu'il fallait.

Il choisi un jour au hasard, un jour qui lui semblait bon. C'était une de ces journées où il y avait dans le ciel presque autant de bleu que de nuages. Il fit comprendre à Goldric qu'il fallait le suivre. Il le mena jusqu'à une clairière assez peu connue des animaux, et inconnue à Goldric, située à environ trois heures de marche. L'humain se demandait bien où le menait ainsi le loup, et pour quelles raisons. Mais il savait que Yawa ne faisait rien sans raison et il lui faisait confiance.

Lorsque les deux frères arrivèrent dans la clairière, Yawa poussa Goldric afin de le faire tomber, puis posa ses pattes sur sa poitrine pour lui faire comprendre qu'il ne fallait pas qu'il se redresse. Puis il s'assit sur son arrière-train, une patte contre son flanc et fixa son frère d'un regard qui devint hypnotique, donnant à l'humain l'impression de s'endormir. Peut-être n'était-ce d'ailleurs pas qu'une impression.

Et alors, Goldric vit. Il vit tout ce qu'il n'avait jamais vu depuis son arrivée. Il comprit. Goldric su qu'après ça, il ne serait plus jamais le même. Il ne verrait plus jamais les choses pareille.

Il vit une multitude de choses en... une seconde, une heure, trois heures, un jour, trois jours, un an, qui sait ? Bref, il vit. La renarde et ses petits. Le papillon dans l'air. La coccinelle sur le brin d'herbe. La grenouille dans son étang. Yawa, ses frères et soeurs et leur mère. Le merle ramenant de la nourriture à ses petits. Le vers dans la terre. L'aigle volant tel un roi dans les cieux. Le petit singe sur sa branche. Le chat sauvage se déplaçant avec grâce et discrétion. Les nuages qui défilent. Yawa voyant deux autres loups s'accoupler. Deux cygnes avançant gracieusement, avec magnificence sur un miroir aux reflets bleus. Un arbre grandissant au fil des ans, de jeune pousse à très vieux. Yawa et lui...

Et il vit tant d'autres choses encore. Tant de choses.

Puis, soudain, un choc. Violent et doux. Il naissait et mourait simultanément, d'innombrables fois. Il était le début et la fin de la vie. Simultanément, il était les deux. C'était douloureux et solitaire. Mais aussi, c'était chaud.

Lorsque Goldric revint de là ou Yawa l'avait expédié, ce dernier était couché au-dessus de sa tête. Il faisait nuit et les étoiles étaient bien visibles. Goldric resta là, étendu, encore quelques instants. Il était mort et il était né. La forêt l'avait refait naître, il était à présent son fils, son véritable fils. Elle lui avait montré la vie. Elle le jugeait digne d'être son fils. Elle avait fait de Yawa et de la forêt sa véritable famille. Ce n'était plus une famille d'adoption.

Après avoir contemplé les étoiles, le nouveau-né se releva et fit le tour de la clairière, sous l'oeil attentif de Yawa. Il sentait son entourage en lui. Il n'avait plus vraiment besoin de ses yeux, son nez, ses oreilles, sa langue... C'était comme si son coeur voyait, sentait et écoutait. Le coeur était bien plus précis et informé. Il n'avait plus besoin de s'approcher une fleur pour en sentir le parfum. D'observer le ciel pour savoir s'il allait pleuvoir. D'observer longtemps pour voir les petits êtres. Tout cela, il le savait par son coeur. De même, il entendait Yawa. Bien que le verbe entendre ne soit pas celui qui correspondait le mieux. Il sentait, voyait et entendait ce que sentait, voyait et entendait Yawa. Et il voyait des sortes d'images et de sentiments que Yawa lui transmettait. Il se voyait, lui, des yeux de Yawa. "Frère". Et il pouvait faire de même avec tout ce que la forêt avait enfanté d'autre. Il pouvait lui aussi transmettre. Il montra à son frère comment il le voyait. Et comment il les voyait. Frères de vie, enfants de la forêt.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Azelma R. Roy ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0