Last summer
Je me souviens de cette année. L'année 1989. Avec ma famille, nous étions partis dans un camping, dans l'arrière-pays. Celui où nous allions depuis mes 14 ans. Tout était calme et beau. La plage n'était qu'à quelques kilomètres à pied. Le temps était au beau fixe, et malgré la convivialité et la gentillesse de tout le personnel, je me demandais pourquoi j'étais ici ? Pourquoi n'étais-je pas restée à la maison sous la surveillance de ma tante ? J'aurais pu passer l'été avec mes copines, et je me serais moins ennuyée. Enfin ça, c'est ce que je pensais au début des vacances.
En effet, alors que les jours passaient, mes parents nous avaient inscrits à plusieurs activités quotidiennes. Il y avait du tennis, des randonnées, de l'aquagym, mais aussi de la danse. Mon activité préférée.
Je n'avais que 16 ans à l'époque. C'est là que j'ai rencontré Enzo. Le professeur de danse. D'après les dires, il avait 25 ans et c'était sa première année à travailler dans ce camping. Il nous apprenait particulièrement des danses latines, alors que j'étais plutôt branchée contemporain. Mais ce n'est pas grave. Les cours me plaisaient quand même.
Au fil des jours, nous devions former des duos, et à cause de mon jeune âge, personne ne voulait de moi. Tout le monde disait que j'étais trop jeune. Ou encore que je n'avais pas assez d'expérience. C'était drôle, car la plupart pensaient danser pour gagner quelque chose, alors qu'il n'en était rien. Quant à moi, j'y allais juste pour apprendre et pouvoir me libérer. Si je voulais continuer les cours, je devais absolument trouver un partenaire. Sauf que je n'en avais pas puisque personne ne voulait de moi. Alors, le professeur fit quelque chose d'inattendu. Il s'était proposé d'être mon binôme. J'avais accepté, car je n'avais aucune raison de refuser.
Nous formions donc le plus jeune duo de ce cours. Et, même si mes parents voyaient ça d'un mauvais œil, je m'en fichais. Après tout, ce sont eux qui m'avaient inscrite à ces cours, pas moi.
Je dansais tous les jours avec Enzo, apprenant le rythme caliente des danses latines. Mais, après plusieurs heures passées à danser à ses côtés, je me sentais mal à l'aise. Pas dans le sens où je voulais tout arrêter, rien à voir. C'est surtout que je m'étais surprise à ressentir des choses que je n'avais jamais ressenties jusqu'à présent. Pour personne. J'étais animée par des sentiments inexpliqués. Je n'aurais pas su dire si Enzo ressentait la même chose quand il dansait avec moi, mais quand il me regardait lors de nos danses, il y avait cette expression indescriptible dans ses yeux. Je ne sais pas. C'était un mélange de passion, d'ivresse et de désir. Tout était mélangé et moi, pauvre ado de 16 ans, j'étais complètement paumée.
Nous avons par la suite commencé à nous voir en dehors des cours. Une chose en entraînant une autre, nous étions devenus proches. Beaucoup trop proches au goût de mes parents, mais peu m'importait, car à ses côtés, je me sentais complètement libre. Je n'avais pas à me cacher et ça, ça n'avait pas de prix.
Un soir, alors que nous longions la plage, par un beau coucher de soleil, Enzo retira ses fringues alors que j'étais complètement surprise de son comportement, mais surtout très gêné de le voir se déshabiller sans aucune pudeur devant moi. Par réflexe, je me tournais, quand quelques instants plus tard, j'entendis le bruit de l'eau s'agiter. Je me retournais et aperçus Enzo plonger dans la mer. Il s'éloigna du bord, nageant sous l'eau avant d'en ressortir sa tête un peu plus loin. Puis là, il me sourit. Avec ce sourire si rayonnant. Si sincère. Il me demanda alors de le rejoindre. Je le regardais un instant, hésitante, mais comment pouvais-je résister face à lui ? C'était impossible. Alors, c'est timidement que je retirais ma robe d'été, la laissant tomber le long de mon corps, me retrouvant ainsi en sous-vêtements. Je le rejoignis, et une fois à sa hauteur, il s'approcha de moi, plongeant son regard ardent dans le mien.
J'étais vraiment intimidée par lui. Il avait ce quelque chose que les autres garçons n'avaient pas, et je suis sûre qu'il le savait, parce qu'il en jouait parfaitement.
Je continuais de l'observer, alors qu'il s'avança encore plus près de moi, jusqu'à ce que nos deux visages soient presque collés. Il était si près, que je pouvais sentir son souffle chaud sur mon cou, alors que sa respiration était saccadée. Je m'avançais à mon tour, posant mes mains sur ses épaules, le regardant droit dans les yeux. Il me sourit maladroitement, puis caressa délicatement ma joue, avant de replacer une mèche de mes cheveux derrière mon oreille, et là, il vint délicatement poser ses lèvres sur les miennes. Je répondis tendrement à son baiser, caressant ses épaules, avant de passer une main derrière sa nuque, l'autre dans ses cheveux. Il m'attira ensuite à lui, me tirant par la taille, s'accrochant fermement à celle-ci avant d'intensifier notre baiser.
À cet instant, peu importe qui pouvait me voir ou me surveiller. Plus rien ne comptait autour de moi. Ce soir là, Enzo m'avait fait découvrir la vie en toute intimité, et m'avait offert l'une des plus belles nuits d'amour qu'il puisse exister. Du moins, c'est comme ça que je la décrivais, car c'est précisément ce que je ressentais. Je m'étais abandonnée corps et âme à lui. Je m'étais donnée à cet homme sans aucune retenue, ni pudeur. Il avait été d'une attention incroyable. D'une douceur exceptionnelle et d'un amour infini.
C'est cette nuit-là que nous nous étions avoué nos sentiments. On s'était promis de ne jamais se quitter, et pourtant. Comme tout bon rêve, on finit par se réveiller, et là, c'était l'heure de l'alarme. C'était la dernière fois que je partais en camping avec mes parents. Mon dernier été.
Notre relation avec Enzo était calme, douce. Sereine, mais par-dessus tout, elle était au-dessus de toutes les espérances et éxigences que je pouvais attendre. À mes yeux, il était l'homme parfait. Celui qui me correspondait. Mais bien sûr, à force de jouer avec le feu, nous avions fini par nous brûler. Mes parents avaient appris notre relation, ainsi que la direction du camping.
Il nous restait plus que quelques jours à passer dans cet endroit, mais évidemment, j'étais privée de sortie, et j'avais formellement interdiction de revoir Enzo. Mes cours de danse avaient donc été annulés.
J'étais triste. J'avais mal, et le mutisme dans lequel je m'étais enfermée, ne faisait que s'accentuer au fil des jours qui passaient. Je voulais le revoir. Sentir une dernière fois sa peau contre la mienne. Ses lèvres sur les miennes. J'en avais besoin. Notre histoire ne pouvait pas se terminer comme ça.
Une nuit, j'étais donc sortie en douce et avait commencé à le chercher. J'avais d'abord fait le tour du camping, les alentours également, mais sans le trouver Je métais donc rendue à la plage, où je l'avais trouvé. Il était assis face à la mer.
Je l'avais rejoint et m'étais assise à ses côtés. Il m'observa et me sourit. Je pris alors sa main dans la
mienne, et lui souris à mon tour, avant de poser ma tête contre son épaule.
C'est cette nuit là que nous nous étions dis au revoir, passant probablement la plus belle nuit de notre vie.
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