Au nombre de sept
Ils étaient tous là, à se regarder dans le blanc des yeux. Assis autour de la table ronde, les sept se fixaient en chien de faïence. L'heure était grave... Il fallait prendre une décision.
Le premier à prendre la parole fut Colère. Ses yeux rouges fulminaient et ses cheveux désordonnés ainsi que ses gestes brouillons montraient son profond désarroi.
" C'est hors de question ! Nous ne pouvons pas ! "
Son cri résona dans la salle avant que le calme ne revienne. Le souffle court, Colère se rassit, les bras croisés sur son torse. Puis, Envie se leva.
" C'est vrai que... Moi, j'en ai envie... Je ne peux pas les lui laisser alors que je veux prendre les siennes... " murmura-t-il, les yeux brillants.
Son temps de parole écoulé, il se posa dans son siège alors que Avarice reprenait, levant son corps malingre. Ses longs doigts crochus tapotèrent nerveusement la table, à la recherche de quelque chose à attraper.
" Moi, je l'ai déjà dit auparavant, c'est hors de question que l'on partage ! C'est à nous ! "
Son corps sec retomba silencieusement dans son petit fauteuil en cuir alors qu'il s'épongeait le front à l'aide d'un délicat mouchoir en soie.
Ce fut ensuite au tour d'Orgueil de donner son avis. Ses cheveux couleur des blés tombaient impeccablement en une élégante mèche tandis que ses vêtements raffinés montraient bien son bon goût. D'un air un peu snob, il toisa ses collègues avant de prendre la parole, son accent aristocratique bien prononcé.
" Moi, je serais d'avis de les laisser faire. Si ces manants les veulent, qu'ils les prennent ! Cela ne prouve-t-il pas notre supériorité sur eux ? "
Il lâcha un petit rire satisfait, rajustant son col blanc avant de se rasseoir doucement, prenant garde à ne pas faire le moindre pli sur son ensemble coûteux.
Gourmandise regarda autour de lui, un gâteau dégoulinant à la main. Se léchant les doigts bruyamment, il se leva, sa bedaine rebondissant doucement sur la table de bois.
" Eh bien... Moi, j'ai faim... Et j'aime bien ça... Alors je dirais que nous devrions les garder ! " dit-il avant de reprendre sa place tant bien que mal, son gros ventre dépassant de sa chaise.
Luxure se leva sensuellement, replaçant une longue mèche rousse derrière son oreille délicate. La jeune femme posa une main sur la table, son profond décolleté en faisant baver plus d'un autour. Sa voix mélodieuse résonna dans la salle, les autres convives retenant leur souffle.
" Personnellement, je n'ai rien contre le fait de les donner... Cela nous permettrait de faire connaissance avec eux ~ Mais en même temps, l'on peut faire tant de choses amusantes avec ~ " sourit-elle de sa voix particulièrement enchanteresse.
L'atmosphère bouillonnante qui s'était installée retomba aussi vite qu'elle était apparue lorsque Luxure reposa son séant sur son confortable fauteuil.
Un silence s'installa dans la salle tandis que les amis se dévisageaient silencieusement, semblant attendre quelque chose. Un ronflement résonna alors dans le petit bureau et Orgueil poussa un soupir agaçé, suivit de Colère et d'Avarice. Luxure, quant à elle, retint un petit rire gracieux derrière sa fine main blanche tandis que Gourmandise, bien trop omnubilé par son gâteau, ne remarquait pas Envie qui tentait de lui en dérober un morceau. Avarice se racla la gorge en regardant Colère avec insistance. Ce dernier lâcha un grognement et abattit sa main sur le dos de Paresse qui, profondément endormi, n'avait rien suivi du débat.
Le pauvre releva son nez de ses bras et regarda les autres en bâillant avant de secouer la main mollement, un air las au visage.
" Faites comme vous voulez... Moi, je suis fatigué... " marmonna-t-il d'une voix pâteuse avant de se rendormir, sa tête retombant mollement en arrière.
Les autres se levèrent tous en même temps, défendant leurs points de vues à grands coups d'arguments et de remarques cinglantes.
C'est alors que la lourde voix de Conscience s'éleva.
" Cessez ce vacarme dans l'instant ! La décision est déjà prise ! "
Piteusement, les septs péchés capitaux sortirent de la pièce, sauf Paresse qui dormait si bien...
Anne regardait la grande femme face à elle. Ses petits doigts potelés jouaient entre eux alors qu'une goutte de sueur dévala dans sa nuque. Puis, soudainement, les voix dans sa tête s'arrêtèrent. Elle put alors s'exclamer, reçevant en échange un doux sourire de la maîtresse :
" Si j'ai 5 pommes et que j'en donne 3 à Tom, il m'en restera 2 ! "
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